
Avocats: Ils ont défendu le diable. Ont-ils des états d'âme?

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Me Mayence: "Aux assises, vous vivez les histoires des autres"
Clients:
Marc Dutroux
Léopold Storme
Jean-Philippe Mayence a défendu Marc Dutroux, des figures du grand banditisme et Léopold Storme condamné à 26 ans de prison pour le meurtre de ses parents et de sa sœur. Si vous l'interrogez sur la justice et ses prisons, il s'emballe immédiatement: "Ma mère était ministre et on m'a proposé de l'être deux fois, donc je suis à l'aise pour vous dire que nos hommes politiques n'ont plus le temps de se livrer à un vrai débat de fond, un débat nécessaire qu'on remplace par des lois de circonstances. C'est une véritable fuite en avant".
Vous avez déclaré qu’un acquittement, c’était un orgasme professionnel. La condamnation de Léopold Storme, c’était quoi? Une strangulation érotique?
Jean-Philippe Mayence - (Rire.) Vous savez, la justice pénale va beaucoup plus vite que les autres parties de la justice. Obtenir rapidement un résultat inespéré a quelque chose de jouissif. Le terme "orgasme" est un peu excessif, mais il est démonstratif de ce que l’on ressent. Pour Léopold Storme, il faut accepter que les combats que l’on mène n’aboutissent pas aux résultats que l’on souhaite.
Est-ce que vous connaissez la vérité sur cette affaire?
C’est quoi, la vérité? Si la vérité, c’est ce que votre client vous dit, alors la vérité, c’est qu’il est innocent. Dans le cas d’espèce, je n’ai aucune raison de douter de Léopold Storme, mais les éléments matériels sont là aussi.
Vous avez déjà pleuré durant votre carrière?
Souvent. Dans le métier qui est le mien, on vit ses émotions à travers les autres. Vous avez l’impression lorsque vous plaidez aux assises de vivre les histoires des autres. Donc oui, je pleure.
Pour ou contre la peine de mort?
Archi contre. La notion de preuve a évolué avec le temps, regardez ce qui se passe aux Etats-Unis avec l’ADN, ou la balistique chez nous. Et puis c’est une telle négation de l’humanité. Ça ne veut pas dire que je sois laxiste. La perpétuité incompressible ou des peines de sûreté, ça peut se discuter, mais dans une grande réforme de ce qui se fait en Belgique en matière de prisons. De la manière dont c’est organisé actuellement, c’est impensable. Il y a 35 % de la population carcérale qui est en détention préventive. Quand je pense que, sur mes deux ou trois derniers procès, des gens ont fait de la prison pour rien, je me pose des questions.
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