Cannes 2013: Kechiche prêt à choquer la Croisette

Abdellatif Kechiche s’apprête à choquer la Croisette avec La vie d’Adèle, portrait d’amours lesbiennes.

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Au cours d’un film de trois heures qui sera sans doute remonté lors de sa sortie en salles, Kechiche raconte une histoire d’amour entre deux jeunes femmes, l’une (Léa Seydoux) faisant découvrir à l’autre (Adèle Exarchopoulos, révélation du cinéma français de 19 ans) la jouissance féminine.

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Habitué aux portraits de jeunes femmes (on pense à Sara Forestier de L’Esquive, à Hafsia Herzi de La Graine et le mulet ou à Yahima Torres de La Vénus noire), Kechiche adapte Le Bleu est une couleur chaude et en profite pour mener à bout son enquête sur l’adolescence et sa fièvre, qu’il filme ici quasiment uniquement à travers la sensualité de son actrice principale, Adèle Exarchopoulos, qui bouffe littéralement l’écran.

 

Adèle habite chaque plan, donne son nom au personnage et au film, qui en devient presque un documentaire sur sa sensualité, ses larmes, ses non-dits, son corps généreux, encore plein des rondeurs de l’enfance. Introverti, le personnage d’Adèle aime Marivaux mais parle comme une caillera, jouit mais n’arrive pas à dire ses sentiments. Elle dort, mange, se mouche et pleure pendant presque tout le film, avec un naturel déconcertant. Les autres personnages n’existent presque pas. Ni les parents ni les amis, seul compte le corps d’Adèle.

 

Les scènes de sexe non simulées, à la frontière de la pornographie, constituent alors les moments-choc d’un film qui s’apparente au portrait de jeune fille par ailleurs plutôt banal. Adèle s’ennuie au lycée, n’aime pas vraiment faire l’amour avec les garçons, et flashe tout d’un coup sur une fille aux cheveux bleus, jeune artiste lesbienne assumée qui va lui permettre de vivre enfin l’amour comme elle l’entend. Mais Adèle ne milite pas pour son homosexualité, contrairement au personnage de Léa Seydoux. Adèle n’a aucune ambition et ne semble pas avoir d’autre conscience que celle d’aimer cette fille aux cheveux bleus.

 

On peut dès lors s’interroger sur le but de ce film. Que souhaite vraiment Kechiche en nous filmant sur la longueur ces scènes de sexe très réalistes et finalement peu dramaturgiques ? Montrer jusqu’où ses deux jeunes actrices peuvent aller par passion pour lui et sa caméra ? Ou vraiment nous raconter une histoire de passion ? dans ces cas-là il manque quelques ingrédients.

 

Notamment une profondeur psychologique qui puisse montrer la vraie différence de cet amour lesbien. La Vie d’Adèle n’est pas L’Empire des sens, et la sexualité d’Adèle (qu’elle soit lesbienne ou pas) ne l’amènera finalement vers aucune forme de libération. Seulement le souvenir d’un amour de jeunesse perdu.

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