C'est quoi cet été pourri?

Juillet maussade, août pas meilleur: cet été, le climat semble nous tirer la gueule. Faux, prétend l'IRM. Pourtant, cette météo "normale" a de fâcheuses conséquences. Et vous, votre moral, comment va-t-il?

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On pensait que le printemps tout chaud allait augurer d'un été aussi beau. On s'est complètement mis le doigt dans l'œil… Mais où est donc ce réchauffement climatique dont on nous rebat les oreilles? OK, la vérité météorologique est plus subtile. N'empêche, le mois d'août déroule déjà ses dernières semaines, une pub sur deux pue déjà la rentrée, et on n'a toujours pas l'impression que l'été a réellement démarré: pluies, temps couvert, température pas terrible. Un temps pourri diversement dommageable pour de nombreux secteurs de la vie économique en Belgique: tourisme, agriculture, loisirs de plein air.

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Un temps de merde qui n'en est pourtant pas vraiment un, paraît-il. Malgré la pluie de juillet, malgré les 4° dans la matinée de mercredi dernier à Virton… "Je sais que c'est dur à croire, mais le temps actuel est sensiblement normal pour cette saison en Belgique, lanceMarc Vandiepenbeeck, météorologue à l'Institut royal météorologique d'Uccle. Il ne faut pas oublier que la Belgique ne vit pas sous un climat méditerranéen: nous avons un climat océanique, humide et pluvieux par essence, à hiver doux et été frais. Frais, ça ne veut pas dire chaud."

Derrière les paroles du météorologue, on sent la pointe d'agacement. "Je trouve toujours assez absurde qu'on s'interroge et vocifère dès que le temps n'est pas à la hauteur des espoirs des vacanciers. S'il n'y a pas grand "beau temps" deux week-ends d'affilée, les gens considèrent que le mois a été mauvais. Et il leur faut trois jours de temps sec et dégagé pour qu'ils oublient un seul jour de pluie. On se souvient tous des températures exceptionnelles de l'été 1976, 2003, 2006. Mais qui a retenu les mois de juillet 1980, 1988, 2000, très semblables à celui-ci?"

Météo d'automne

Quasi normal, l'été 2011? Oui, si l'on s'en tient stricto sensu aux écarts-types tolérés. N'empêche, en juillet, il a fait 2° de moins que la moyenne des trente dernières années. Pour le météorologue Luc Trullemans, qui fait la pluie et le beau temps sur RTL-TVI et Bel RTL, c'est parce qu'on a eu droit à un déphasage entre l'été chronologique, officiel, et l'été météorologique. "Les périodes de temps sec associées aux anticyclones se sont déclenchées beaucoup plus vite cette année; en avril, mai et juin. Résultat: pendant l'été chronologique, on a connu une situation plus proche de ce qu'on connaît en automne."

Un phénomène pas techniquement prévisible, mais qui avait tout de même de grandes chances de se déclencher. Luc Trullemans: "On sait que quand on est confronté à une telle période de temps anticyclonique, on peut s'attendre ensuite à ce que la nature rééquilibre ses forces, et donc laisse plutôt apparaître des courants ou des dépressions associés à du mauvais temps. Je me souviens avoir dit en mai, sur antenne, qu'on risquait de payer ce magnifique printemps tôt ou tard. La question était de savoir quand. Maintenant, on sait."

La dictature du beau temps

Pour Marc Vandiepenbeeck, la problématique du mauvais temps est aussi question de présentation des bulletins météo. "Affirmer, comme je l'ai entendu plusieurs fois cet été, qu'on était en dessous des "normes saisonnières" me paraît abusif. On est certes plus bas que la moyenne, mais des étés comme celui-ci, on en rencontre tous les trois ou quatre ans. Mais bon, je comprends les contraintes des présentateurs météo. Ils sont soumis à la dictature du beau temps. Si le climat n'est pas immédiatement adapté aux loisirs d'extérieur, il est automatiquement considéré comme mauvais. Mais on oublie que ce mauvais temps, c'est le meilleur pour les cinémas, les vendeurs d'impers et les restaurants."

Les présentateurs météo tenus d'annoncer le temps que la grande majorité des téléspectateurs souhaitent? Luc Trullemans s'en défend, mais reconnaît la pression naturelle dont il fait l'objet. "Dès que les prévisions laissent entendre qu'il y a peut-être une lueur d'espoir de beau temps, j'ai tendance à le préciser. Et c'est sans doute seulement cette info-là que le téléspectateur privilégiera." Quitte à pousser parfois le présentateur à devoir s'excuser. "C'est arrivé la semaine dernière, j'ai moi-même été victime de mon optimisme..."

Le temps, ça s'apprend

Car, comme le vélo, écouter et comprendre la météo, ça s'apprend. "Les modèles mathématiques qu'on utilise offrent une prévision toute les six heures, détaille Luc Trullemans. Pour savoir quel temps il fera dans les jours à venir, il faut suivre attentivement l'évolution de ces prévisions, jour après jour, et percevoir les tendances." Car les vérités peuvent vite changer, et les modèles dérailler… "La météo, ce n'est pas une bible, ce sont des calculs. Il suffit d'une minuscule erreur d'observation aux USA ou sur l'océan Atlantique, d'où viennent la plupart des vents, pour fausser complètement une prévision." C'est ce qui s'est manifestement passé il y a quelques jours encore. "Il y avait des lacunes dans l'observation quelque part sur l'océan, aux Bermudes, ou sur la côte est du Canada. Du coup, le temps annoncé n'avait plus rien à voir avec ce qu'il s'est réellement produit."

Reste la question à 1.000 €: que nous réservent septembre et octobre? Selon Luc Trullemans, les nouvelles pourraient être bonnes. Comme la nature nous a "volé" l'été, elle pourrait nous rendre un bout d'automne. "Sur la base de ces cycles de rééquilibrage, si juillet et août ont été moyens, et si la fin août est de la même couleur, septembre et octobre ont de grandes chances d'être secs et ensoleillés. Mais avec des températures plus basses." On enregistre et on croise les doigts.

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