
Daniel Day-Lewis: L’homme du président

La saison des prix commence bien pour Daniel Day-Lewis. En effet, outre sa nomination à l’Oscar du Meilleur Acteur, son incarnation du seizième Président des Etats-Unis lui a récemment valu le deuxième Golden Globe de sa carrière (après There will be blood en 2007).
La lecture de votre article continue ci-dessous
La recette de son succès? Prendre le temps de faire peu. "Hollywood est parfois le théâtre d’une sorte de compétition pour qui tournera le plus, explique-t-il souvent. Moi, au contraire, je prends du temps pour accepter un rôle." La preuve: il n’a tourné que six films ces quinze dernières années. "Ensuite, lorsque j’accepte un projet, je prends toujours des mois pour soigneusement le préparer. Toujours selon ma devise: "La vie en premier!" Et donc, je cherche à adopter dans ma vie de tous les jours, les traits et le style du personnage que je vais incarner à l'écran. Même si ça ne fonctionne pas à chaque fois..."
En témoigne le cas de Nine, comédie musicale, ni très drôle ni très mélodieuse, où l’homme joue faux. Une grosse tache sur un CV presque sans faute (My left foot, Le temps de l'innocence, Gangs of New York, The Boxer). "C’était un faux pas, a-t-il reconnu. Après le saignant There Will be Blood, j’ai eu envie de quelque chose de plus léger. C'était une erreur. Je sais aujourd'hui que je suis fait pour les films plus profonds." C’est donc dans une fresque historique que Daniel Day Lewis signe aujourd'hui son grand retour. En campant un impressionnant Abraham Lincoln, seizième Président des Etats-Unis, dont le nom restera à jamais associé à l'abolition de l'esclavage.
Si le film nous a plu sans toutefois être le chef d'œuvre attendu, Daniel Day Lewis y est impeccable de bout en bout. Constat sans appel: son visage savamment travaillé par le temps était le meilleur choix possible pour la fonction présidentielle.
Lincoln Vs Argo
Day-Lewis, parfait en Président sous la bannière étoilée, donc? Un comble puisque, né à Londres, il a ensuite opté pour la nationalité irlandaise. "Mais, justement, le fait qu’il ne soit pas américain nous a conforté dans notre choix. Pour qu’il attaque le rôle sans préjugés ni opinions préconçues", indiquait Spielberg, alors en pleine préparation du film.
"Nous espérons que cette option sera payante". Verdict: l’option Daniel-Days Lewis fut bel et bien payante pour l’acteur… mais pas pour le film. En effet, il se dit aux Etats-Unis que certains jurés des Golden Globes auraient subi des pressions pour ne pas élire un film dans lequel le président des Etats-Unis n'était pas incarné par un acteur américain.
Et voilà donc Lincoln coiffé sur le poteau pour le Golden Globe du Meilleur Film par Argo, de et avec Ben Affleck. Bien lancé sur la voie d’une totale rédemption à Hollywood après des années passées dans des comédies romantiques basses du front.
Argo et Lincoln se retrouveront le 24 février aux Oscars. Et si le futur vainqueur de la statuette du Meilleur Film fait encore et toujours débat, l’Oscar du Meilleur Acteur fait figure de bataille gagnée d’avance pour Daniel-Day Lewis, déjà double vainqueur de la récompense. Sacré pour My Left Foot (1989) et There Will be blood (2007), l’acteur jouera donc en terrain connu. Sauf que…
Sauf que si les Oscars se limitaient à récompenser uniquement une prestation artistique, ça se saurait! L’enjeu est évidemment de taille car le gain de la précieuse statuette garantit non seulement une enflure à des degrés variables de l’ego et de la cote de l’heureux élu, mais surtout une explosion du nombre de spectateurs. Mais deux obstacles se dressent sur la route de Lincoln!
Tout d’abord, la très vénérable Académie des Oscars a eu tendance, ces dernières années, à récompenser des films produits par des studios indépendants (The Artist, Slumdog Millionnaire, Le Discours d’un Roi, Démineurs). Et ce, au détriment des productions issues de la sainte bande des quatre grands studios: Sony, Universal, Fox et Warner. Pas de chance (si l’on peut dire), Lincoln est produit par le quatrième larron.
Ensuite, pour gagner, les équipes des films en lice doivent choisir les bons cocktails où se montrer, connaître les jurés influents à inviter dans des restaurants étoilés et ne pas se planter en choisissant les petits (ou gros) cadeaux qui sauront entretenir l’amitié et plus si affinités. Et Lincoln devra faire face à un desperado bien plus rompu que lui à ce genre d’exercice: Harvey Weinstein. L’un des plus puissants moguls d’Hollywood, qui a mené Le Discours d’un Roi et The Artist à la récompense suprême. Et qui aligne, cette année, un poulain chic et choc en la personne du Django Unchained de Quentin Tarantino. Bref, comme dirait l’autre, le duel s’annonce serré.