
Elle s’appelle Ruby (Ruby Sparks)

Les plus physionomistes reconnaîtront peut-être l’une des naufragées du western La dernière piste, sorti au printemps dernier. Mais c’est avec le chatoyant Elle s’appelle Ruby, réalisé par Valerie Faris et Jonathan Dayton, le duo géniteur de l’excellent Little Miss Sunshine (2006), que Zoe Kazan va définitivement exploser aux yeux du grand public. Dans cette comédie romantique imprévisible un brin barrée, sautant parfois au-delà de la frontière du fantastique, elle campe une héroïne de papier qui prend réellement vie sous la houlette de son auteur (Paul Dano, l’ado mutique de Little Miss Sunshine).
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L’écrivain ne tardant évidemment pas à tomber amoureux de sa créature. Verdict: un film frais, original et savoureux. Notre coup de cœur du moment tant il prouve que le cinéma américain peut aussi accoucher d’autre chose que de superproductions formatées au kilomètre. "C'est une histoire que je résumerais par un titre genre Quand Harry rencontre Frankenstein", assène d’emblée Zoe Kazan, armée d’un accent de sa Californie natale à dépecer à l’opinel. "Puisque je suis une héroïne construite de toutes pièces par son créateur, et que je risque ensuite d’échapper à son contrôle."
Mais la comparaison s’arrête là. Car le cas Kazan ne partage évidemment aucun attribut physique avec la créature de Mary Shelley. Son sourire lunaire et sa démarche à la fois joyeuse et énigmatique de farfadet déambulant pieds nus dans la moquette épaisse de l’hôtel londonien où elle nous reçoit, achèvent d’ailleurs de nous persuader qu’elle était la bonne personne pour le rôle principal du film.
Dans une veine entre l’humour aérien de 500 jours ensemble et la légèreté grave de Juno. "Elle s’appelle Ruby ne répond d’ailleurs pas à un genre unique. Mes films préférés sont souvent ceux qui ne rentrent pas dans une case précise, comme Le lauréat ou Un jour sans fin. Avec du comique, un peu tragique. Voire du carrément flippant à certains moments."
Bien consciente que l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, Zoe a aussi écrit le scénario du film. "Parce que les personnages féminins dans les comédies romantiques sont souvent à sens unique, voire carrément stéréotypés. Je ne m’y reconnais vraiment pas. En fait, je ne veux pas passer comme une p… de pétasse prétentieuse", poursuit celle qui a obtenu son diplôme en arts dramatiques à la prestigieuse et sélecte Université de Yale (comme quoi…).
"Mais j’écris assez facilement. Cette histoire est certes élaborée, mais elle ne m’a pas coûté tant de travail que ça. J’ai exactement écrit le film dans lequel je voulais jouer. La facilité de raconter des histoires me coule dans le sang." En effet, question hérédité, la donzelle a de qui tenir.
Puisqu’elle est la petite fille d’Elia Kazan, réalisateur d’Un tramway nommé désir. Et que sa mère Robin Swicord a signé le scénario de Mémoires d’une geisha. "Peut-être que mon nom m’a aidée à débuter lorsque j’étais actrice de théâtre à mes débuts. Mais maintenant, c’est à moi et à mon travail de prouver que je peux durer", conclut-elle avec une gourmandise qui lui illumine l’œil comme un rubis.
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Elle s’appelle Ruby (Ruby Sparks)
Réalisé par Valerie Faris & Jonathan Dayton. Avec Zoe Kazan, Paul Dano, Chris Messina - 104’.