
Jean-Pierre Jacqmin: "Je suis très fier de Matin Première"

Jean-Pierre Jacqmin nous accueille dans sa maison uccloise, entre son jardin et sa bibliothèque squattée par l'œuvre de Simenon. Et plein de souvenirs, en particulier de Matin Première dont les 20 ans sont célébrés ce vendredi matin de 6 à 9 sur La Première. Il en a été le créateur et l'intervieweur politique vedette.
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Matin Première, tranche info que vous avez créée, fête ses 20 ans. Un mot sur cet anniversaire.
Jean-Pierre Jacqmin - Je revendique la totale paternité de cette émission et lui souhaite encore 20 ans de plus. Elle est née grâce à une succession d'événements d'actualité très forts. La chute du mur de Berlin et ses conséquences, la première guerre du Golfe, la guerre en ex-Yougoslavie nous ont obligés à refaire des nuits en info. Ce qu'auparavant on n'avait jamais fait. Après ces nocturnes, on s'est dit qu'il ne manquait plus grand-chose pour faire des émissions d'info intégrées notamment tôt le matin. Christian Druitte, alors administrateur général, m'a dit "Fais un projet pour le matin sur La Première, on verra si cela passe la barre". J'ai eu le feu vert et ainsi est née Matin Première. J'ai d'abord présenté l'émission et Hervé De Ghellinck interviewait l'invité politique. Puis je l'ai remplacé dans ce rôle. Pendant 14 ans.
Vous êtes toujours fier de votre bébé devenu grand?
J.-P. J. - La dynamisation qui vient d'être mise en place porte ses fruits mais c'est vrai qu'il y a eu d'autres périodes où j'ai été moins fier à cause des lourdeurs et du ronron. Mais dans l'ensemble, je suis très fier, y compris des audiences. Si on additionne les audiences des JP de 8 heures sur La Première et VivaCité, c'est 400.000 personnes. Bel RTL est à 200.000.
Depuis que vous êtes patron de l’info, vous n'avez aucune nostalgie de l'antenne et de votre statut d'"intervieweur incontournable des politiques"?
J.-P. J. - Fabrice Grosfilley et moi nous croisons tous les matins et il est vrai que début octobre on s'est dit: "Quand même! Quel dommage de ne plus être maintenant dans nos rôles d'intervieweurs politiques". Avec une petite pointe de frustration nostalgique. En même temps c'est gai aussi de voir les équipes actuelles fonctionner autour de tels événements et puis j'ai fait le job pendant 14 ans et quelque 2.000 interviews, en direct, chaque matin. Mais j'avais fait le tour du monde politique. Donc je suis devenu un responsable plus occupé à voir comment on organise l'info et les rédactions aujourd'hui. Sur les trois supports radio, télé et web et ça c'est aussi passionnant que la politique.
Dans les Belges, quels politiques restent vos meilleurs souvenirs?
J.-P. J. - Un Jean-Luc Dehaene était toujours une bombe à recevoir. Quand il arrivait, même les murs s'écartaient. Et l'interview finie, il remontait son pantalon ce qui montrait qu'il n'était pas asexué linguistiquement. Il disait à son attachée de presse "Monique, on y va " et hop il était parti. Les Guy Spitaels ou les Philippe Moureaux, ce n'était pas non plus de la tarte. Pas des gentils. Louis Michel montait volontiers dans les tours. Mes préférés restent quand même Didier Reynders et Elio Di Rupo. Redoutables. Le premier car suprêmement intelligent et toujours prêt à bondir. Le second car toujours sur la défensive, mais jamais langue de bois. Un drôle à interviewer, c'était aussi Johan Vande Lanotte car ce type arrivait à tenir des propos très réfléchis, sérieux, importants tout en, par exemple, se curant les doigts de pied comme ce fut un jour le cas lors d'une interview en direct chez lui dans sa maison d'Ostende.
A côté de votre passion pour l'info dont vous avez fait votre métier, quelles sont les autres choses qui vous font vibrer?
J.-P. J. - J'adore les sports, dont je suis aussi responsable à la RTBF. Je suis intenable quand je regarde un match de foot. Et je suis fou d'athlétisme. J'ai dû assister à une vingtaine de Mémorial Ivo Van Damme, athlète dont j'étais fan. Et face à un exploit, je peux avoir les larmes aux yeux. Mon autre passion, ce sont les livres. Surtout Simenon et la littérature policière moderne comme Deon Meyer ou Arnaldur Indridason. Je pars en vacances avec autant de polars qu'il y a de jours.
De quoi rêvait le petit Jean-Pierre Jacqmin?
J.-P. J. - De la Lune. Aller sur la Lune, être astronaute. J'ai collé des vignettes paninis de cette aventure spatiale. Et grâce à toutes les connaissances que j'ai engrangées grâce à cette passion, quand Dirk Frimout est allé dans une navette américaine, j'étais au pied du pas de tir. Quand Frank De Winne est parti, j'étais au pas de tir et quand les Belges ont envoyé en orbite des engins, j'y étais aussi. Je trouve toujours cela fascinant et merveilleux, l'espace, le vrai, le plus merveilleux.
Un petit quiz "Info ou Intox".
Originaire de Chassepierre, vous mangez du pâté gaumais à chaque petit déjeuner. Info ou intox?
J.-P. J. - (Rire.) Faux. Mais je suis capable d'en faire.
Jean-Pierre Jacqmin est un mêle-tout. Info ou intox?
J.-P. J. - Vrai. Je le revendique car c'est gai de se mêler de tout. C'est aussi une réponse à l'angoisse du "est-ce que je suis capable de...?"
Jean-Pierre Jacqmin est de gauche. Info ou intox?
J.-P. J. - Faux. Cette affirmation est trop limitative. Je m'estime existentialiste en ligne avec cette manière qu'ils avaient dans les années 50, 60 et 70 d'essayer d'appréhender le monde autrement. Je mets l'humain au cœur de tout, mais je pense aussi que l'individu doit avant tout se prendre en charge, ce n'est ni la collectivité, ni l'Etat qui doit tout faire pour lui.
Jean-Pierre Jacqmin a une passion inavouable pour la chanson "Puerto Rico" de Vaya Con Dios?
J.-P. J. - Vrai. Et avouée car liée à un souvenir fort. Je connaissais la chanson, mais je l'ai entendue chantée et reprise à tue-tête dans une cave de Sarajevo où les jeunes se réfugiaient pendant le siège de la ville par les Serbes. C'était comme un hymne écouté par la jeunesse de Sarajevo. Sinon, c'est surtout Bashung qui me fait vibrer.