Justice: "Nous sommes de mauvais musiciens, mais on a fait des progrès"

En rendant hommage à Goldorak et au rock progressif des seventies, le duo parisien signe la musique du futur. Bluffant.

134258

[...]

Nos dernières vidéos
La lecture de votre article continue ci-dessous

Vous justifiez la longue gestation de cet album par le fait que vous êtes de mauvais musiciens. Une boutade?
Gaspard Augé. - Non, c'est la vérité. Nous ne sommes pas des virtuoses de la guitare comme Steve Vai ou Joe Satriani, mais nous tenions à jouer de tous les instruments. Pour notre premier album, nous avions enregistré note par note et tout collé ensuite comme dans un puzzle. Avec "Audio, Video, Disco", nous avons réussi à aligner des suites d'accord. Il y a donc du progrès.

A la demande de la maison Dior, vous avez composé en 2009 Planisphere, un morceau influencé par le rock progressif. Le point de départ de votre nouvel album?
Dior nous avait demandé d'écrire la bande-son pour sa collection hommes printemps-été. Ils s'attendaient à recevoir plusieurs morceaux et on leur a proposé Planisphere, un quadriptyque de vingt minutes. A ce jour, ça reste l'une de nos chansons préférées et elle a effectivement servi de moteur pour "Audio, Video, Disco". On aime le rock progressif pour ses changements de tempos et les références au Moyen Age. Mais ça reste généralement très chiant comme musique. Les instrumentistes s'écoutent jouer et ça me gonfle.

Quel est le plus gros malentendu concernant Justice?
Justice est catalogué à tort "groupe électro". Nous avons atterri dans la culture dancefloor par hasard, mais ce n'est pas notre truc. Nous avons longtemps réfléchi à la manière de se sortir de ce cliché et de casser tous les codes de la musique dance dans laquelle on ne se retrouve pas. Sur scène, nous jouons avec des amplis Marshall, on n'utilise pas de lasers ou d'écrans géants. L'approche est plus rock.

Le premier disque que vous avez acheté est "Kill Them All" de Metallica. Compte-t-il encore pour vous?
Oui. Je l'ai acheté 50 francs français (7,50 € - NDLR) à mon cousin qui faisait son malin en revendant ses disques rock parce qu'il venait de découvrir la jungle à Londres. J'ai gardé ce disque précieusement. Le métal signifie toujours beaucoup de choses pour moi. Vu de l'extérieur, le métal peut sembler ridicule avec ses groupes au look grotesque, des paroles très premier degréet les références à la mort ou la religion. Mais c'est à la fois très naïf et très sincère. Comme la musique de Justice.

Quelle est la part de naïveté dans votre nouvel album?
Les clins d'œil que nous adressons dans cet album sont sans peut-être maladroits, mais profondément sincères. La chanson Brianvision est un hommage respectueux à Brian May, le guitariste de Queen. Il y a un autre morceau qui s'appelle Ohio en référence à un titre de Crosby, Stills, Nash & Young. On aime vraiment ça, comme on aime Michel Berger, AC/DC ou Michael Jackson.

Il y a un romantisme très juvénile qui se dégage de cet album. Comment l'expliquez-vous?
Nous sommes restés enfermés en studio pendant un an sans écouter les trucs hype du moment. Assez bizarrement, ce sont les musiques liées à mon enfance et à mon adolescence qui sont revenues à la surface: les disques folks de Malicorne qu'écoutaient mes parents, le générique de Goldorak, le "Who's Next" des Who, les albums de Led Zep. Pour les textes, nous avons volontairement banni les lieux communs comme "I Love You", "Move your ass" et "Don't you want" qu'on entend dans toutes les chansons qui passent à la radio. Nous ne nous prenons pas pour Bob Dylan ou Leonard Cohen, mais on voulait des paroles universelles qui ne soient pas trop stupides.

Justice a-t-il un message particulier à faire passer?
Non, on veut seulement véhiculer des émotions. Les titres de nos chansons sonnent comme des slogans. Tout tient dans un mot suffisamment évocateur qui oriente la perception de l'auditeur: Civilization, Canon, Horsepower. Nous suivons exactement le même procédé lorsque nous réfléchissons à nos clips ou aux pochettes.

Le DVD A Cross The Universe qui montrait les coulisses de votre tournée américaine a choqué par sa violence. Vous le regrettez?
Non, on a filmé près de 300 heures de rushes au cours de cette tournée et on a gardé les moments les plus excessifs. Il y a un ou deux passages trash (allusion à la séquence où Xavier de Rosnay frappe un fan éméché avec une bouteille en verre - NDLR)et pour le reste, je vois surtout des gens qui s'amusent. Pour nous, c'est ce qu'il y a de plus grisant comme sentiment. Nous savons que les gens qui viennent voir Justice en concert ne vont pas se tourner les pouces.

Justice
Audio, Video, Disco
Warner

Débat
Sur le même sujet
Plus d'actualité