Lulu Gainsbourg: "Mon père peut être fier de lui et de moi"

Vingt ans après la disparition du beau Serge, son fils lui rend hommage sur un album de reprises au casting international.

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Vous parlez de cet album comme d'un cadeau à votre père. Pourquoi?
Lulu Gainsbourg. - Je veux lui dire qu'il peut être fier de moi et surtout très fier de lui. Mon père a souvent pensé qu'il était un moins que rien, que sa musique ne passerait pas les frontières ni les générations. À la fin de sa vie, il a pleuré quand il s'est rendu compte que des ados aimaient ses chansons. Aujourd'hui, c'est le monde entier qui l'adore. Tenez, voici quelques jours, Bootsy Collins, ancien bassiste de James Brown et inventeur du funk, s'est mis à genoux devant moi. "Vous êtes le fils de Seurge? Maximum respect! Your dad was the man." Ça aurait fait plaisir à mon père.

En quoi cet album n'est-il pas un disque de plus dans une liste déjà très longue d'hommages à Serge Gainsbourg?
Il était hors de question que j'essaie de copier les versions originales de mon père. J'ai souhaité mélanger tous les styles musicaux, comme il n'a cessé de le faire tout au long de sa carrière. L'idée était que tous les invités apportent leur propre perception des chansons de mon père, un peu comme le font les jazzmen lorsqu'ils relisent les grands standards. C'est tout sauf un disque de reprises.

Votre père vous a offert votre premier piano quand vous aviez 4 ans. Quels morceaux vous a-t-il appris?
Les 3 petits cochons et la musique de Popeye. Après sa mort, j'ai essayé de m'en souvenir et j'ai réussi à les rejouer à l'oreille.Tout fier, j'ai appelé ma mère qui m'a dit: "Ce don, tu l'as hérité de ton père. Maintenant tu vas étudier la musique".

Votre père n'a cessé de faire l'actualité depuis sa mort. Ça vous a empêché d'en faire le deuil?
J'ai fait le deuil de mon père à 18 ans, quand j'ai compris que je ne le reverrais jamais. C'est tard, je sais… Mais je suis resté longtemps un enfant, j'ai mis du temps à grandir et à accepter sa mort. Aujourd'hui, ça va mieux, même si j'ai encore des périodes un peu difficiles. Les hommages qu'on fait à mon père ne me dérangent pas du tout. Je suis fier chaque fois qu'on reprend son répertoire.

Durant les dernières années de sa vie, qui sont aussi les premières de la vôtre, il a accumulé les excès. Vous lui en voulez d'être parti trop tôt?
Si j'avais le pouvoir de changer le cours des choses, je ne toucherais à rien. Avec tout ce qu'il buvait et fumait, c'était son destin et il le savait sans doute. C'était aussi le mien de perdre mon père à l'âge de 5 ans et d'être élevé par ma mère. Si je suis là aujourd'hui, avec ce disque et un diplôme du Berklee College of Music en poche, c'est grâce à elle.

Est-ce que sa mauvaise hygiène de vie a déteint sur la vôtre?
Non. J'ai essayé de fumer pendant quatre mois et ça ne m'a rien apporté de bon. Je commence à boire, mais tout doucement, pas à me rendre malade. Je n'ai jamais été tenté par les drogues, ça a fait trop de dégâts autour de moi.

Quels sont votre chanson et votre album préférés de Serge Gainsbourg?
La chanson, c'est La noyée qu'il a écrite en 1970 pour la B.O. du film Le roman d'un voleur de chevaux. Pour l'album, je pourrais dire "Histoire de Melody Nelson" comme tout le monde. Mais c'est "You're under arrest" que j'ai le plus écouté.

Si vous fermez maintenant les yeux, quelle est la première image de votre père qui vous vient à l'esprit?
(Il ferme les yeux.) Là, assez étrangement, je vois une photo de lui quand il était écolier. Il tient un cahier dans ses mains, porte un short et des chaussettes jusqu'aux genoux. Il a des cheveux très courts. C'est exactement moi quand j'avais 6 ans. Il n'a pas des origines chinoises, mais on se ressemble pourtant comme deux gouttes d'eau.

Le 10/11 au Cirque Royal.

Lulu Gainsbourg
From Gainsbourg To Lulu
Universal.
Sortie le 14/11.

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