
Morts de footballeurs: ce qu’il faudrait vraiment faire…

La mort récente des jeunes footballeurs belges Grégory Mertens et Tim Nicot, foudroyés par une crise cardiaque sur le terrain, a ravivé la question de l’examen obligatoire pour ceux qui s’adonnent à une activité physique. Pour l'instant, en Belgique, pour s'inscrire dans un club sportif, il faut un "simple" certificat médical signé par un généraliste. Est-ce suffisant? On sait que la société européenne de cardiologie recommande à tout athlète qui pratique au moins trois heures de sport intensif par semaine de faire un électrocardiogramme (ECG). Une recommandation que l'Italie a suivie, mais pas (encore?) la Belgique. En Wallonie, s'il existe bien un décret "relatif à la prévention des risques pour la santé dans le sport", on attend toujours qu'une commission définisse précisément son contenu (Qui doit être examiné? A quelle fréquence? Avec quels examens?) et que soient publiés les arrêtés d'application. En attendant, le Dr Pierre Devos, pédiatre et président du club de foot CS Sart Tilmant, a décidé de prendre les devants pour débroussailler le terrain.
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Nos enfants devront-ils ou non passer un examen plus poussé avant de s'inscrire dans un club de foot?
Pierre Devos - Le décret wallon est encore vague et ne devrait pas être d'application avant 2017. J'ai proposé à l'Association des clubs francophones de football (ACFF) de travailler sur la situation des jeunes de 5 à 18 ans qui pratiquent le football. J'ai réuni un groupe de médecins spécialisés dans les différents domaines de la pédiatrie et de la médecine du sport pour réfléchir à trois choses: quand faut-il faire les examens, quel serait leur contenu et quelles seraient les contre-indications absolues à la pratique du football?
Avez-vous déjà pu avancer?
P.D. - Nous avons établi un questionnaire préalable qui permet au médecin de cibler certains examens en fonction de l'historique familial et personnel de l'enfant. Nous avons également déterminé qu'il faudrait trois consultations entre 5 et 18 ans: une au moment de l'affiliation, un autre en U13 (vers 12-13 ans) parce que c'est le début de la puberté et le moment où l'enfant va commencer les compétitions et un en U17, à la fin de la puberté.
On parle beaucoup de l'électrocardiogramme (ECG). Le préconisez-vous?
P. D. - C'est une question très délicate, pour plusieurs raisons. D'abord, les pathologies dont sont morts les deux joueurs récemment n'auraient par exemple pas été détectées par ECG. Donc la question du coût-bénéfice de la systématisation d'un tel examen se pose. En plus, il y a un risque de faux-positifs: on fait paniquer les parents, on fait des examens complémentaires alors qu'il n'y avait pas de problème. Un autre problème, c'est qu'il est prévu que l'examen d'aptitude soit mené par le médecin traitant. Or, vers 12 ou 13 ans, l'ECG est particulier et ne peut être interprété que par un cardio-pédiatre. Enfin, un rapport du KCE (Centre fédéral d'expertise des soins de santé) a conclu qu'il ne fallait pas faire d'ECG dans l'examen des sportifs. Par contre, le cardiologue pédiatrique de notre groupe insiste pour qu'il y en ait un. Je ne sais pas encore ce qu'on va décider.
Vous, qui être expert auprès de l'ACFF, vous allez pousser pour ce genre d'examen pour les jeunes footballeurs francophones dans tous les cas?
P. D. - Oui. Mais la question, c'est: qui paye? Ce que j'ai proposé au ministre, c'est qu'il y ait une intervention des mutuelles pour ce genre d'examens. Car elles ont intérêt à ce que les enfants pratiquent un sport et, en plus, les trois moments que nous avons prévus pour les examens correspondent à des rappels de vaccins.
Conseillez-vous aux parents de faire, dès maintenant, ce genre d'examen si leur enfant s'inscrit au foot par exemple?
P. D. - Pas tout de suite. Mais d'ici quelques mois, nous pourrons communiquer aux médecins les lignes de conduites pour cet examen, peut-être via un site. Donc je conseille aux parents d'attendre encore un an.