Smartphones - Nos ados sont-ils "accros"?

"Ma fille de 14 ans est complètement "addict" à son iPhone!" Précieux outil de socialisation, le portable "connecté" comporte pour les adolescents de sérieux risques de dépendance. Pire, il peut aussi devenir un instrument du harcèlement scolaire.

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Chaque soir, au moment du coucher, Bruno "confisque" les smartphones de ses ados de 12 et 14 ans et les met sous clé pour la nuit. "Sans ça, ils s'endormiraient dessus, dit-il. Ou ils y passeraient la nuit, comme leurs potes. Je le sais parce que, dans la boîte, celui de ma fille "bipe" jusqu'à deux ou trois heures du matin." Catherinepasse dans le couloir. Par la porte ouverte de la chambre de sa fille, elle entend une étrange conversation avec de très longs intervalles. Via son smartphone, sa fille est sur Skype avec trois copines. Elles ne discutent pas, mais sont virtuellement "ensemble" pendant que l'une lit un magazine sur son lit, l'autre fait ses devoirs et que la troisième range sa chambre. Il y a aussi ce couple d'amoureux qui, de 16 à 19 h, entretient une conversation ininterrompue par texto. Ces échanges semblent totalement vides de sens à leurs vieux cons de parents, qui estiment qu'on ne peut pas s'aimer sérieusement avec autant de fautes d'orthographe. Mais pour Victor et Lucie, c'est une histoire d'amour, peut-être la "bonne". Elle se tisse en un long questions-réponses qui peut atteindre 3.000 ou 4.000 SMS envoyés par mois. Ça semble énorme! Mais est-ce trop?

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C'est la question que se pose Bruno qui n'hésite pas à comparer ses gosses à des "junkies du smartphone", avec les mêmes symptômes de manque: nervosité et crises de colère quand l'objet vibre sur un meuble avec interdiction d'y toucher, parce qu'on est à table. Comme lui, beaucoup de parents s'inquiètent. Un peu. Beaucoup. A la folie quand ils entendent le témoignage de cette mère dont la fille de 13 ans s'est suicidée après avoir été harcelée, notamment par SMS et via Facebook. Au point de pendre symboliquement son GSM à côté d'elle avant d'en finir .

Les smartphones et GSM sont si présents dans la vie de nos enfants qu'ils sont désormais assortis de pathologies spécifiques: la tendinite du pouce ou encore le "text-neck" (la nuque du SMS) dû à leur position pour envoyer des SMS. Quant aux dangers des ondes sur leur santé, les autorités sanitaires ne disposent pas de preuves, mais éprouvent de sérieux doutes. Alors qu'elles recommandent d'éloigner au maximum son portable du corps, trois quarts des ados dorment avec leur GSM allumé sur la table de nuit ou sous l'oreiller et le gardent dans la poche toute la journée, selon la Société Santé Environnement, en France. Beaucoup de jeunes filles le rangent même dans leur soutien-gorge! La grande majorité (85 %) préfère les textos, mais 42 % d'entre eux passent plus d'une demi-heure par jour à téléphoner sans kit mains libres, ce qui selon l'OMS augmente déjà de 40 % le risque de tumeur au cerveau. Mais ce qui inquiète le plus les parents, c'est l'addiction pathologique.

Syndrome de manque

La "Nomophobie" (pour "No Mobilephone Phobia"), l'angoisse ressentie à l'idée d'être séparé de son portable, concernerait surtout les jeunes. En France, une étude Ifop indique que 78 % des moins de 25 ans reconnaissent être accros à leur mobile, contre 42 % de la population globale. Concrètement, cela signifie qu'ils sont incapables de passer une heure sans le consulter (57 %), qu'ils sont stressés à l’idée de le perdre (56 %) et réagissent physiquement (sueur, petits tremblements, irritabilité) face à la menace d'être à court de batterie ou sans couverture réseau. En Asie, il existe déjà plusieurs centres de traitement de la dépendance aux smartphones. Chez nous, les institutions s'occupant des assuétudes sans substance (comme aux jeux en ligne, à la pornographie ou aux jeux d'argent) commencent aussi à s'y intéresser. Mais les spécialistes relativisent: pas d'épidémie chez nous, loin de là!

La suite du dossier dans le Moustique du 11 février 2015

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