
Aylan, mort un jour de fuite

Rejeté par les vagues sur les plages de Bodrum, station balnéaire touristique turque très fréquentée et particulièrement prisée par la bourgeoisie d'Istanbul et les touristes étrangers, Aylan Kurdi, 3 ans, a la tête tournée vers l'île grecque de Kos vers laquelle cinglaient deux petites embarcations chargées de 24 personnes où il avait pris place, comme des milliers d'autres candidats à l'exil avant lui. Les embarcations ont chaviré.
La lecture de votre article continue ci-dessous
Et le voilà, la tête dans le sable... Pour enfin nous faire retirer notre tête du sable à nous, Européens frileux à tendre la main, méfiants face à ces étrangers "si différents de nous", ces "migrants" inquiétants. Car Aylan, dans son T-shirt rouge mouillé, son petit short bleu et ses petits baskets ressemble tellement à nos enfants, et son frère Ghalib, 5 ans, également mort dans le naufrage, sûrement aussi.
Il faut que cette photo serve, pour que, c'est dur à dire et c'est "bateau", Aylan ne soit "pas mort pour rien". Qu'il devienne l'icône capable de faire basculer l'opinion des plus indécis à estimer que oui, il faut aider les réfugiés à conjurer leur vie de cauchemar; oui, il y a urgence humanitaire; oui il faut sauver toutes ces familles en danger jetées sur les routes et les mers. Comme ce fut le cas aussi dans notre Histoire.
Oui, chaque fois qu'on leur tend la main ou qu'on est tenté de ne pas le faire, il faudra penser à Aylan et oublier notre confort égotiste d'occidentaux qui anesthésie trop souvent la profonde tradition d'accueil et d'humanisme qui a construit l'Europe. Des valeurs qui renvoient dos à dos Etat islamique et régime syrien, les trafiquants d'être humains et passeurs de là-bas et d'ici, tout autant que les démagogues politiques. Des valeurs qui sont notre dignité. Notre avenir. Et leur avenir. En gardant en tête, l'image d'Aylan. Horrible, insoutenable, désespérante, définitive, mais on l'espère, utile à faire évoluer les esprits.