So-li-da-ri-té, avec… Avec qui, au fond?

Refugees Welcome… Parfois, derrière un magnifique message d'ouverture se cache le rejet inconscient et implicite de certains de ces exilés.

So-li-da-ri-té, avec…  Avec qui, au fond?

Environ 20.000 marcheurs (15.000 selon la police, 23.000 selon les organisateurs), dont beaucoup de jeunes, ont réclamé, dimanche (27/9) à Bruxelles, un accueil digne pour les réfugiés. Soit le double de ce qui était annoncé. On ne peut que s'en réjouir! Mais justement, parce que l'élan est là, que la conviction est solide, on peut peut-être se permettre d'aller maintenant un pas plus loin. Ce dimanche, il était par exemple intéressant d'entendre un slogan régulièrement scandé par la Coordination des Sans-papiers de Bruxelles ("So-So-So So-li-da-ri-té avec les sans-papiers") repris et transformé en "Solidarité avec… les réfugiés!". Ça n'a l'air de rien, mais ça dit pas mal de choses. Car, sans le vouloir peut-être, c'est sous-entendre que parmi ceux qui cherchent refuge chez nous, il y a les bons réfugiés (dont le statut a été ou sera reconnu) et les (moins "bons"?) sans-papiers.

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Pour rappel: le sympathique Irakien avec qui ces citoyens indignés partagent aujourd'hui un sandwich au Parc Maximilien est, en attendant d'être reçu par l'Office des Etrangers, pour l'instant "sans-papier". Et demain, il a une chance sur deux de voir sa demande d'asile refusée par le Commissariat Général aux Réfugiés et aux Apatrides (CGRA). Dans ce cas, il recevra son ordre de quitter le territoire. Pour aller où? Pour retourner vers le pays en guerre qu'il a quitté au péril de sa vie? Il vivra plus probablement dans une clandestinité qu'il n'a, rappelons-le, pas choisie.

Au risque de se faire arrêter, détenir dans un centre fermé et rapatrier (parfois de force) vers Bagdad, comme ça a encore été le cas le 18/9 et le 23/9  derniers, pour 78 Irakiens. Des personnes, traitées comme des criminels pour n'avoir commis d'autre délit que d'être entré sur un territoire. Illégalement, certes, puisqu'on leur en a interdit a priori l'accès par voie légale. Est-il juste de traiter de voleur quelqu'un qui maraude pour ne pas mourir de faim? Avons-nous à ce point confiance en notre gouvernement, en cette Europe, pour nous en remettre à eux quand il s'agit de déterminer qu'un pays d'origine est "sûr" ou qu'un exilé est un "bon réfugié" ou un "illégal"? Ici et là dans la manif, on trouvait justement des calicots pour rappeler qu'une action peut-être illégale. Pas une personne.

Derrière les réponses trop courtes des "angélistes" et trop dures des extrémistes, il y a surtout ces questions difficiles. Le meilleur moyen d'en sortir est parfois tout simplement l'action, la rencontre. Prendre le risque de se retrouver face à une victime, face à connard ou, parfois, les deux à la fois. Dans tous les cas, oser rencontrer un exilé, c'est devenir, en partie, prisonnier des mêmes questions que lui. Ne plus pouvoir demain, estimer que ce n'est "pas de chance" si le CGRA le condamne par son refus à vivre, ici aussi, dans la peur des uniformes et l'insécurité. Nous en étions là de nos réflexions sur ces slogans "pour" les réfugiés ou "contre" les sans-papiers, pendant la marche de dimanche quand on a croisé un chapeau jaune sur lequel il était griffonné, tout simplement: "Welcome humans".

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