
James Bond - Surprends-nous un autre jour

Des poursuites, de la bagarre, des dialogues ciselés, du charme... 007 retrouve donc le Spectre et lui fait passer un sale quart d’heure. Même si le tout manque de tension et d’intensité de temps en temps. La faute à un scénario un peu elliptique (un message cryptique venu tout droit de son passé pousse Bond à enquêter sur une sinistre organisation criminelle, et à révéler la terrible vérité derrière… le Spectre) et à une réalisation paresseuse à l’occasion.
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Bourre-pif à Mexico le long de quelques scènes spectaculaires avec Le jour des morts en toile de fond, course-poursuite en voiture à Rome sur les berges du Tibre version tôle froissée et Aston Martin pas trop amphibie… Le film démarre un peu bourrin. Mais s’améliore quand il prend davantage son temps: Bond/Craig retrouve donc finalement la trace de son vieil ennemi (du temps de Casino Royale et Quantum Of Solace): Mr. White. On arrive enfin à un sous-texte intéressant: les années qui ont passé et leurs ravages. Et puis c’est à ce moment-là que le héros se lance sur la piste de l’héroïne: une magnétique Léa Seydoux. On les retrouve tous deux partis pour Tanger. C’est comme si la paire plongeait dans le passé: lui Bogart, elle Monroe plus que Bacall… mais tous deux fragments d’un glamour passé.
Cependant, et à l’exception d’une partition de Sam Smith aussi passe-partout qu’insipide, ce 24e Bond comporte tout ce que la plupart des fans attendaient de lui: de super-gadgets, de l’action, quelques références aux anciens chapitres, et Monica Bellucci en porte-jarretelles, pompée de l’univers esthétique des pin-up des années 50. De son côté, le bad guy en chef, Christoph Waltz, a bien du mal à exposer des motivations plausibles. Et sa grande révélation dans la dernière demi-heure ne tiendra pas du choc pour quiconque est vaguement familier de l’univers de 007.
En fait, la vraie pertinence - et en même temps la réelle valeur ajoutée - de ce Spectre se niche ailleurs. Et transpire quand certaines scènes du film comparent Bond à un dinosaure à l’ère de WikiLeaks. Avec une question connexe digne de thèses universitaires: quel est encore l’intérêt d’hommes de sa trempe à une époque où des drones peuvent faire son travail à sa place, et en plus sans se froisser le smoking? Bilan final: ce Spectre est donc aussi globalement réussi que malheureusement prévisible. Toutefois, on rassure définitivement les légions d’aficionados qui portent leur Licence To Kill en bandoulière: le film contient suffisamment de morceaux de bravoure pour maintenir la marque Bond à flot. Même si on ressort de la projection avec le sentiment d’avoir été un peu bluffé. Comme si Sam Mendes avait fait semblant d’avoir une super-main au poker pendant deux heures, avant de poser sur la table une paire un peu trop faiblarde vu ce qu’il nous avait fait espérer.
> SPECTRE, réalisé par Sam Mendes. Avec Daniel Craig, Christoph Waltz, Léa Seydoux - 150’.