Suuns au Bota: soleil sous la pluie

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"Il pleut, c’est malheureux, il pleut. Depuis ce matin…" Dimanche, en début de soirée, cette ritournelle d’Emilie Simon ne nous lâche pas. Pourtant, on voudrait bien se l’enlever de la tête, chantonner autre chose mais là, avec le ciel gris et la flotte qui tombe du ciel pour rallonger les verres de bière, c’est mission impossible. Il convient de s’en faire une raison: les Nuits Bota 2016 s’achèvent "officiellement" sous la drache nationale.

Au sec, dans le Grand Salon, les quatre garçons de Nap Eyes débitent des petites mélodies bricolées à l’aide d’une basse, d’une batterie et de deux grattes électriques. Pop légèrement bucolique et franchement bancale, la musique des Canadiens tire les enseignements du passé (The Clean, Velvet Underground), tout en s’inspirant des codes recyclés par les fines lames du label Woodsist (Ducktails, Real Estate, Woods). Sur scène, le chanteur et le bassiste nous offrent un remake du film Wayne’s World. Détendus comme Wayne Campbell et Garth Algar, les deux musiciens explosent les clichés babas cool avec bonhommie, mais sans réelle plus-value.

Pour rattraper la mauvaise humeur de la météo, on s’en remet aux rayons ultraviolets de Suuns, autre projet canadien venu aux Nuits Bota en vue d’égrener son troisième album ("Hold/Still") sur les planches d’une Orangerie pleine à craquer. Aux confins d’un rock glacial et d’une machinerie électronique suffocante, le quatuor de Montréal arpente le dancefloor sous sirop de codéine et n’hésite pas à tenter l’un ou l’autre pogo sous Lexomil. Progression anxiogène, lente et ultra minimale, la prestation de Suuns s’apparente à un véritable électrocardiogramme : un concert au pouls accidenté, une performance rythmée par son lot de pulsations et de palpitations. Articulé autour des nouveaux morceaux, le show offre néanmoins de parfaits points d’ancrage aux hits épileptiques des deux premiers disques (Pie IX, Arena, 2020). Au micro, Ben Shemie calque sa voix nasillarde sur les inflexions vaporeuses inventées au siècle dernier par Clinic. L’ombre du groupe anglais plane d’un bout à l’autre du récital canadien. Suuns a beau afficher sa singularité musicale, le chant rend la comparaison inévitable et rappelle ô combien Clinic est un groupe sous-estimé. En suiveur intelligent, Suuns s’est contenté d’attaquer au bon moment, de sortir du peloton du rock indépendant pour s’imposer sur la ligne d’arrivée avec un hybride electro-rock aussi froid et précis qu’un coup de bistouri. Un concert tranchant et impeccablement maîtrisé.  

 

PHOTO VINCENT KMERON PHILBERT

 

 

 

 

 

 

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