
Les Ardentes : le hip-hop à l'honneur jeudi soir

Tee-shirt blanc XXXXXL, barbe rousse et verve d'enfer, Action Bronson s'est illustré ce soir sur la plaine des Ardentes face une foule éparse. Arrivé pile à l'heure sur la Main Stage, l'ogre du Queens qui avait enflammé l'Ancienne Belgique le 27 septembre dernier, n'a pas démérité malgré l'absence de soutien du public lors des premiers morceaux. Charge d'éléphant dans une boutique de porcelaine, Action Bronson né Ariel Asllani, parade en slashes, nonchalant, et se vante de son look avec raison. Il détonne à Liège et c'est ce qui plaît. D'autant que son flow, porté par des titres comme Actin' Crazy, Easy Rider ou Galactic Love, rameutent la foule petit à petit. Le lascar, cuisinier dans une autre vie, se balance des bouteilles d'eau dessus pour contrer l'effet de la transpiration, appelle la foule à allumer un joint tandis qu'il tire de longues bouffées lui-même. Un show hypnotisant, grâce à une décontraction extrême, mais surtout à un ton de voix nulle part égalé. Seul bémol peut-être, son backeur arrivé à mi-parcours, sur qui il se repose pour occuper les trois quart de la scène, jusqu'au grand final. Un moment hors du temps. Du moins hors de l'espace temps des Ardentes, qu'on a connu plus enflammées. And, Action !
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Thundercat, alias Stephen Bruner, est le bassiste jazz le plus heureux de la planète. Non content d'être reconnu par les siens, le Californien est hyper-coté dans la famille hip-hop. Kendrick Lamar, qui l'a convié sur le phénoménal « To pimp a butterfly » le cite dans toutes ses interviews tandis que Flying Lotus (également ce jeudi aux Ardentes) en a fait son collaborateur attitré. Ce jeudi, Thundercat se présente sur la scène HF6 des Ardentes en formule trio basse, batterie, claviers. En quelques notes contrastées, Burner nous ramène au jazz fusion seventies des New-Yorkais Weather Report. Une voix soul aérienne, un batteur qui ne peut pas cacher ses amours funk et cette propension à emmener loin, très loin les compositions, transforme un concert de Thundercat en expérience radicale dont ne sort pas indemne.
Nous avons encore l'esprit embué par les secousses rythmiques de Thundercat qu'une immense clameur nous provient du main stage. Le phénomène français PNL débarque aux Ardentes. Nous sommes fans de hip-hop, curieux, ouverts et même intéressés « sociologiquement » par des musiques qui ne nous touchent pas mais qui rencontrent un public. Mais là, on ne pige pas. On est largué. PNL, c'est donc deux frangins, Ademo et N.O.S., qui ont fait de la nonchalance et de l'auto-tune leur signature. Sur le papier, ça s'appelle du cloud rap, le rap du nuage. Trop cool. Sur scène, ça se résume à deux mecs qui marchent de gauche à droite en déclamant des trucs sans jamais articuler. De temps à autre, on capte un « Nique ta mère », « la weed c'est ma vie », « QLF (« que la famille ») et encore une petite louche de « nique ta mère ». Il n'y a aucun message, aucune revendivation. Nada. Un DJ fait semblant de bouger ses curseurs tandis que quatre autres gugusses sont plantés à côté du desk en bayant aux corneilles. Il y en a un qui doit être mieux payé que les autres car il est le responsable « briquet » d'Ademo dont il allume deux fois la clope. PNL a ses codes, aime parler en verlan avec les doigts de la main, empile les millions de vues sur YouTube mais n'en a strictement rien à foutre d'être là. Buzz sur le web, dans les cours de récré et les cabines d'essayage de H&M peut-être. Mais en live, c'est le degré zéro de la créativité. Circulez, il n'y a rien à voir.
Photo: Vincent « Kmeron » Philbert.
Texte: Marie Frankinet et Luc Lorfèvre