L’ibuprofène peut causer des problèmes de fertilité masculine

Et une nouvelle étude rappelle que les médicaments disponibles sans prescription peuvent impacter votre santé à tout jamais. En tant que malades, on n’en est pas toujours conscients…

Médicaments sans ordonnance ©Fotolia

Si un médicament est disponible en vente libre, c’est qu’il est forcément inoffensif, non? C’est ce que pense une personne sur quatre dans un sondage commandité en France par une grande mutualité (MNH). Contre une sur trois qui estime qu’ils peuvent s’avérer néfastes s’ils sont consommés à très haute dose et 40 % qu’ils sont potentiellement dangereux, mais uniquement pour certains profils particuliers… Sauf que la réalité est moins rassurante que ça et les complications causées par l’automédication ne sont pas si rares. La dernière étude franco-danoise sur l’ibuprofène (qui concerne aussi les Nurofen, Advil, Antarène, etc.) est venue nous le rappeler en envoyant un impressionnant pavé dans la mare: l’anti-inflammatoire le plus vendu au monde peut causer des infertilités chez les hommes, s’ils en ingurgitent 1.200 mg par jour pendant 6 semaines.

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On a trop tendance à considérer les médicaments comme des marchandises comme les autres.

Cette consommation n’est évidemment pas courante. Mais il s’agit là d’une énième occasion, s’il en fallait, pour rappeler qu’il est essentiel de se méfier de ce classique de nos pharmacies. D’autres risques sont déjà connus depuis sa mise en circulation dans les années 70. L’ibuprofène est en outre formellement interdit aux femmes enceintes, aux enfants atteints par la varicelle et aux personnes qui prennent des coagulants… Si les professionnels de la santé dont la formation continue est chez nous obligatoire sont au courant de cela, ce n’est pas le cas de tous les citoyens, susceptibles de succomber à ses effets secondaires. “On a trop tendance à considérer les médicaments comme des marchandises comme les autres, regrette Alain Chaspierre, porte-parole de l’Association pharmaceutique belge. Dans plusieurs pays, on en vend même dans des pompes à essence, et chez nous, de plus en plus sur Internet. Or, la mise en garde d’un spécialiste est essentielle.” 

Malheureusement, l’ibuprofène n’est pas un cas isolé. Sur 4.000 remèdes passés au crible, Test-Achats a des “doutes sérieux” sur l’efficacité et la sécurité de 460 médicaments et en “déconseille fermement” 113 autres. Fin 2017, son pendant français 60 millions de consommateurs en a remis une couche en publiant sa liste noire. On y retrouve les “best-sellers” anti-rhume comme Actifed Rhume et Nurofen Rhume, des sirops pour la toux de type Siroxyl et Lysomucil, ainsi que des sprays pour la gorge comme Medica ou Colludol.

Pas de risque zéro

Certes, une directive européenne retranscrite dans la loi belge garantit des mesures de sécurité minimales. Elles confient par ailleurs au Comité des médicaments à usage humain la responsabilité de décider objectivement s’il faut autoriser la vente libre ou exiger une prescription, selon le type de molécules, les conditionnements, les doses, etc. “Avant qu’un médicament arrive sur le marché, on réalise des examens sur les molécules utilisées et des essais cliniques, explique Ann Eeckhout, porte- parole de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS). À chaque fois, le rapport bénéfice-risque doit pencher vers le bénéfice. On se base pour réaliser nos évaluations sur trois critères: la qualité, l’efficacité et la sécurité. Mais ces tests sont évidemment limités. Il n’est jamais possible d’établir avec certitude qu’un médicament ne comporte aucun risque à la consommation.” 

Certaines pathologies ou effets secondaires apparaissent des années plus tard.

Il fallait s’en douter. Impossible en labo de reproduire les conditions de la vraie vie, ni de considérer tous les profils de consommateurs. “Les tests dureraient trop longtemps, sans doute des dizaines d’années, poursuit Ann Eeckhout. Certaines pathologies ou effets secondaires apparaissent des années plus tard et parfois en combinaison avec d’autres substances ou même des compléments alimentaires ou des vitamines.” C’est pourquoi les tests continuent une fois les produits sur le marché. On découvre ainsi, parfois des années après, des effets bien trop sérieux pour être acceptables. Ça a été le cas, notamment, du Motilium retiré de la vente en 2014 après 10 ans d’examens et, à en croire l’AFMPS, 11 décès en Belgique…

Rester fidèle à son pharmacien

La vente libre n’en demeure pas moins essentielle ne fût-ce que pour limiter le coût des soins de santé et éviter de perdre trop de temps chez son généraliste. Il ne faut pour autant jamais avaler ses pilules les yeux fermés. Quand vous êtes vraiment livré à vous-même, défend Alain Chaspierre, mieux vaudrait au moins bien lire les notices. Il serait encore plus prudent de consulter. Les médecins, mais dans le cadre de la vente libre surtout les pharmaciens, sont là pour vous aider à répondre à vos besoins. “La grande majorité des professionnels jouent ce rôle avec énormément de sérieux, poursuit Alain Chaspierre. Ils posent les bonnes questions au patient. Quels sont ses antécédents? Prend-il d’autres médicaments? Si l’acheteur n’est pas le malade, à qui est-il destiné? Et en tant que patient, il ne faut pas non plus hésiter à délivrer des informations sur son propre cas spontanément.” Pour plus de facilité, il conseille à cette fin de rester fidèle à son pharmacien, comme le font déjà 86 % des Belges. Il a ainsi accès à votre dossier pharmaceutique au complet et peut mieux vous sensibiliser aux risques…

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