
Facebook sait tout de moi (et de vous)

Sans nous en apercevoir depuis notre inscription, on se vend chaque jour un peu plus à Facebook pour lequel nous n’avons visiblement plus beaucoup de secrets. En téléchargeant mes données, j’ai découvert que ma vie virtuelle, mais pas seulement, tenait en un fichier ZIP de 2,1 gigaoctets contenant un nombre interpellant de conversations, photos, vidéos et pistes audio. Première étape dans ce gros dossier décompressé: le fichier “Index”. Il me rappelle mes adresses e-mail, les groupes dont je suis membre, les pages que j’ai administrées et likées ainsi que mes anciennes relations amoureuses datant de l’adolescence. Je m’aventure ensuite dans le dossier “stickers” qui reprend les centaines d’images de chats, de pouces bleus géants et d’émojis que j’ai un jour envoyées en privé, du moins c’est ce que je croyais, à mes contacts.
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Facebook et mes amis
Ces dernières interpellent moins que le dossier “ADS”. Il contient toutes les pages likées qui, selon Facebook, pourraient intéresser les annonceurs. Mais aussi les publicités sur lesquelles j’ai un jour cliqué et la liste des entreprises - une bonne centaine parmi lesquelles Proximus, Deliveroo, Pearle Opticiens, Nieuwsblad.be, Lotto et Airbnb - qui ont ajouté mes informations à “leur liste de contacts”. Je passe rapidement sur l’historique des applications installées depuis 2008, les événements auxquels j’ai participé, ceux dont j’ai refusé l’invitation et l’historique de mon “mur”. Je m’arrête plus longuement sur les fichiers “friends” et “contact_info”. Ils contiennent ma liste d’amis, de mes anciens amis, de ceux en attente de réponse ou dont j’ai refusé la demande. Facebook connaît en plus leurs coordonnées. J’aperçois aussi celles de dizaines de personnes avec lesquelles je n’ai jamais été lié sur le réseau social dont - il sera le premier surpris - le numéro de portable du rédac’ chef de Moustique.
Rien ne disparaît jamais vraiment
Plus j’avance dans cette aventure virtuelle, plus je crois rêver. Dans le dossier “messages”, je tombe sur des centaines de conversations. Certaines ne sont pourtant plus disponibles dans mon historique visible. Comme quoi, sur Facebook, rien ne disparaît jamais vraiment. Ce gros fichier ZIP contient en plus toutes les photos partagées en privé, ainsi que les fichiers textes et les vidéos. Puis j’aperçois un dossier “audio” contenant une dizaine de pistes. J’écoute. Certaines sortent tout simplement de nulle part. Je reconnais vaguement ma voix et, dans l’une d’elles, celle de ma nièce de quatre ans avec qui je n’ai jamais eu de conversation virtuelle. Comme si Facebook avait un jour activé le micro de mon ordi à mon insu alors qu’on parlait à proximité… Lors de son audition devant le Congrès américain la semaine dernière, un élu suspectait justement Mark Zuckerberg de procéder de la sorte afin de mieux cerner les centres d’intérêt des utilisateurs. Le grand patron a assuré que Facebook ne se rabaissait pas à ça. Alors peut-être que c’est moi, et tous ceux qui dénoncent de telles pratiques sur la Toile, qui tombons dans la paranoïa.
Comment obtenir et supprimer les données
Pour télécharger tout ce que Facebook sait de vous, il suffit d’aller dans les paramètres de votre compte et de cliquer sur “télécharger une copie de vos données Facebook”. Vous recevrez un e-mail de confirmation et un lien de téléchargement. Faire disparaître vos données est moins évident. Accrochez-vous, voici le parcours du combattant. D’abord, cliquez sur l’onglet “aide” en bas de page et rendez-vous sur “gestion de votre compte”, puis “désactivation ou suppression de votre compte”. Si vous désactivez, Facebook gardera vos données en mémoire. Le réseau social tentera de vous dissuader de procéder à la suppression définitive. Il faut donc persévérer et cliquer sur “comment supprimer définitivement mon compte”. Après, appuyez sur “faites-le-nous savoir”. Une nouvelle page apparaît vous proposant enfin de supprimer votre compte… Facebook a annoncé que la procédure de suppression sera bientôt facilitée. On attend.
Protéger son compte
Effacer son compte et ses données Facebook est une décision radicale. Il est aussi possible d’utiliser les réseaux sociaux avec prudence en sécurisant au maximum son profil. Plusieurs astuces permettent de le faire. D’abord, il est plus que jamais conseillé de lire les conditions générales et de choisir précisément ce que vous partagez. Ensuite, dans les paramètres, vous pouvez contrôler quelles applications ont accès à vos données et interdire celles qui ne vous plaisent pas. Enfin, vous pouvez limiter le ciblage publicitaire dans l’onglet dédié.
Les autres réseaux sociaux suivent
Twitter et Google proposent également à leurs utilisateurs de télécharger leurs données. Instagram devrait bientôt suivre. On ignore à ce stade si les archives contiendront les “like” ou le contenu partagé dans les “stories” du réseau social. Plus largement, en Europe, le Règlement général sur la protection des données qui entrera en vigueur le 25 mai prochain devrait obliger toutes les entreprises à rendre accessibles les données qu’elles possèdent sur leurs utilisateurs ou leurs clients.