Wallonie: des personnalités de la société civile bientôt ministres ?

Après Paul Magnette (PS), c’est au tour de Jean-Marc Nollet (Ecolo) de proposer ce lundi un gouvernement minoritaire au sud du pays. Mais le coprésident vert va un cran plus loin avec l'idée de ministres indépendants.

Premier round de discussions après les élections du 26 mai dernier

Albert De Smaele fut jadis propriétaire et administrateur du groupe de presse flamand De Standaard. Raoul de Fraiteur travailla à la Défense nationale avec le grade de lieutenant-colonel. Leurs points communs ? Tous les deux ont exercé un mandat ministériel dans un gouvernement fédéral belge comme techniciens. Le premier durant l’année 45-46, le second en 48-49. Devenir ministre sans étiquette politique et en venant de la société civile est donc possible dans notre pays. Et on y revient, car il s’agit d’une des propositions émises ce lundi dans le Soir par le coprésident Ecolo Jean-Marc Nollet. Une piste que l'ancien chef de groupe au Parlement fédéral a assortie d’un projet de gouvernement minoritaire de gauche PS-Ecolo. Le CDH ou le PTB pourraient ainsi par exemple faire l’appoint dans cette optique texte par texte. L’idée est-elle possible? Et que permet ce nouveau champ des possibles ? Balayée, à l’heure actuelle en tout cas, par le parti humaniste, la proposition comporte néanmoins certains avantages. Voilà ce qu’expliquent deux politologues consultés par Moustique

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Un besoin de redynamiser la démocratie

Il n’aura échappé à personne que la démocratie représentative se trouve en crise. Faire preuve de créativité pour tenter de nouvelles formules n’est donc pas illogique. "De manière générale, la proposition d’Ecolo s’inscrit dans un débat qu’on voit depuis plusieurs années, celui sur la manière de redynamiser la démocratie. Il y a une attente pour redynamiser le débat démocratique. Et puis on n’avait jamais vu avant à ma connaissance une défaite électorale de l’ensemble des partis qui ont exercé une fonction exécutive lors de la législation sortante, sauf Défi", explique le politologue d’ULiège Pierre Vercauteren. On a enfin une balkanisation de l’électorat qui rend la constitution de coalitions plus délicate. Ca nécessite effectivement de lancer des hypothèses et faire preuve de créativité, rentrer des schémas classiques a montré beaucoup de limite". Un autre élément peut enfin jouer, selon le directeur du Crisp Jean Faniel : la recherche d’une cohérence idéologique. "C’est plus facile de mettre en concordance les programmes d’Ecolo et du PS que avec le MR. Et puis Paul Magnette a déjà pointé dans des interviews que, c’est quand on ne gouverne pas à gauche, que la social-démocratie se casse la figure', indique-t-il.

Une société civile ? Oui, mais laquelle ?

Des personnalités de la société civile qui viennent en renfort au gouvernement fédéral? L’hypothèse s’avère plausible. Elle ramène aussi à ce besoin de réoxygénisation du système démocratique actuel. Même si elle ne voyait pas le jour finalement durant cette législature, la proposition a déjà le mérite de nourrir le débat. "L’idée d’un tirage au sort pour élire des élus émise par le parti Agora s’inscrit aussi dans la tendance d’une volonté de faire les choses autrement. Des personnalités de la société civile ministres sans être membres d’un parti, c’est aussi arrivé dans un passé récent. C’est par exemple le cas de Marie-Dominique Simonet ou d'Antoine Duquesne, qui n’étaient pas encore membre de l’ex-PSC ou du MR avant leur mandat. Mais souvent, ici en Belgique, ces personnalités rentrent généralement ensuite dans le circuit politique. En France c’est un peu différent, il y a eu récemment Nicolas Hulot et Luc Ferry", explique Pierre Vercauteren. "Il faudrait aussi s’entendre sur ce qu’est un représentant de la société civile. Qui le désigne et sur quels critères?"

BelgaCommunication ou sincérité

Le PS et Ecolo sont-ils sincères avec leurs propositions de coalition minoritaire wallonne ? Ou bien s’agit-il seulement pour le premier de montrer à sa base qu'il  a tout fait pour mouiller le PTB et pour le second qu'il a tenté l’impossible pour éviter une inconfortable tripartite avec le PS-MR ? Sans doute un peu des deux, mais on ne doit surtout pas exclure une partie de sincérité, insiste Jean Faniel." On a l’impression que du côté du PS et d'Ecolo, on essaie de tout faire pour ne pas aller rechercher le MR. Avec leurs propositions, on peut se dire que quelque chose est en train de changer. On envisage des gouvernements minoritaires, ce qui n’est absolument pas la pratique en Belgique", explique le politologue. "Il y eu le gouvernement Michel II qui a ouvert une voie, puis Borsus maintenant en Wallonie. Sans compter le développement de gouvernements minoritaires ailleurs en Europe. Au fédéral, ce n’est même plus possible pour les six partis traditionnels d’avoir ensemble la majorité". Oui, il y a donc bien sûr une part de communication dans le chef des deux partis de gauche. On le voit : les élections sont encore récentes et tous les acteurs politiques se positionnent et font monter les enchères. Mais pas uniquement. Il s’agit aussi au moins en partie de lancer des ballons d’essai et de tenter d'explorer des nouvelles manières de faire de la politique.

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