
Zuckerberg ce lundi à Bruxelles : que cherche le patron de Facebook ?

L’acronyme GAFA renvoie aux quatre géants économiques de l’économie digitale Google, Apple, Facebook et Amazon. En plus de chasser sur les terres du numérique, ces entreprises partagent deux points communs : un monopole quasi complet au niveau mondial et des techniques d’optimisation fiscale qui ont fait leurs preuves. Ce n’est pas tout. Elles incarnent aussi cette nouvelle économie numérique que les États tardent toujours à réguler. Il faut dire que la tâche n'est pas facile. Ces multinationales proposent des services dématérialisés par-delà les frontières et elles occupent aussi une fonction inédite: celle d'intermédiaire entre des entreprises et des consommateurs. Et puis leurs dirigeants sont souvent plus puissants que la majorité des dirigeants du globe. Leur lobbying impressionne également. Voilà des années que leurs responsables des affaires publiques mettent le paquet pour décourager les autorités de réguler le secteur. La situation est pourtant en train d’évoluer. La Commission européenne a en effet fait de la régulation numérique une priorité. Un consensus se dégage en outre, même aux Etats-Unis, sur la nécessite d’une taxation plus grande des Gafa.
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Pourquoi Zuckerberg est-il à Bruxelles ?
Il rencontre ce lundi trois commissaires européens : Margrethe Vestager, Vera Jourova et Thierry Breton. La première est compétente pour la concurrence et le numérique, le second pour le commerce intérieur et la troisième gère le portefeuille de la justice. Les rendez-vous se déroulent derrière des portes closes. Les sujets au programme sont nombreux. Il y a d'abord le projet de taxe numérique pour les entreprises non basées en Europe. Viennent ensuite les projets de régulation. Ceux-ci concernent à la fois la modération des commentaires et des publicités mensongères et le respect de la vie privée des consommateurs. La Commission compte bien agir prochainement sur ce dossier. De nombreux scandales ont taché ces dernières années la réputation de l’entreprise. Un des plus célèbres s’avère sans conteste celui de Cambridge Analytica. Il est ainsi apparu en 2018 que Donald Trump a eu recours, lors de la campagne présidentielle de 2016, à cette entreprise britannique pour analyser les données de dizaines de millions d’utilisateurs à leur insu.
Facebook prêt à « payer plus d’impôts »
L’offensive de charme de Mark Zuckerberg ne se réduit pas à une visite à Bruxelles. Avant de passer du côté du rond-point Schuman, le PDG de 35 ans assistait samedi à Munich à la conférence sur la sécurité. Il s’est ainsi exprimé sur le projet de taxation numérique (et donc de Facebook) discuté actuellement au sein de l’OCDE. Il s’est prononcé en faveur d’« une réforme fiscale » même si cela doit conduire le groupe à « payer plus d’impôts ». La déclaration a pas mal circulé ce week-end sur les réseaux sociaux. Il ne s’agit pourtant pas d’une surprise. Marc Zuckerberg n’a en effet fait que répéter la position de son entreprise. Son responsable des affaires publiques avait encore indiqué, pas plus tard qu’en décembre dernier, être un « fervent supporteur des négociations à l’OCDE ». Il est en réalité devenu impossible d’être ouvertement contre une réforme réclamée à cor et à cri par une majorité de dirigeants étrangers et de la population mondiale. D’autant que certains pays comme la France et la Grande-Bretagne ont déjà avancé sur des projets de taxation nationaux. L’idée est donc d’applaudir l’idée pour mieux la torpiller et la vider de sa substance.
Qu’attendre de la rencontre bruxelloise ?
À l’instar du projet de taxation, la régulation des réseaux sociaux et la protection de la vie privée des consommateurs se sont également imposées à l’agenda politique. Pour l’influencer, autant également être à l’intérieur du processus. Puis, un petit aller-retour en avion ne coûte pas grand-chose à l’entreprise, mais fait toujours plaisir à la Commission européenne. Il est d’ailleurs nécessaire de s’interroger : était-il possible pour Marc Zuckerberg de ne pas rendre cette visite de courtoisie à l’exécutif européen ? L’entreprise américaine est de toute façon en demande de plus clarté sur ce qu’elle peut ou ne peut pas faire. En matière de régulation sur les réseaux sociaux, ses dirigeants se rendent compte qu’ils ont besoin d’un cadre plus clair. Un cadre qui leur convient bien sûr, mais un cadre toutefois.
Reste que Mark Zuckerberg ne possède plus uniquement Facebook. Certains l’oublient, mais son entreprise possède aussi les applications Instagram et WhatsApp. Certains élus politiques considèrent que les trois applications ne peuvent pas se retrouver dans les mains d’une seule et même entreprise. Il est parfois question d’une scission forcée. Son patron voit évidemment les choses autrement. Il cherche donc à gagner du temps. Ce délai doit lui permettre d’augmenter au maximum l’intégration entre les trois marques. Objectif : décourager les promoteurs d'une scission de Facebook.