La reprise des consultations en hôpital paralysée par la «cacophonie gouvernementale»?

Depuis ce lundi 5 mai, les hôpitaux peuvent rouvrir leurs services pour accueillir les patients non-Covid-19 mais plusieurs facteurs les empêchent de le faire réellement. Le gouvernement est directement désigné par les médecins comme responsable de cette situation et la tension est très palpable.

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La décision était attendue par de nombreuses familles: dès ce lundi, les consultations reprennent dans le milieu hospitalier. Outre les «soins urgents» déjà traités lorsque la vie du patient était directement en danger, les services accueillent de nouveau les «soins nécessaires». Autrement dit, les patients présentant une «problématique menaçant un organe, un membre ou la vie du patient à moyen ou long terme» sont de nouveau pris en charge… du moins en théorie. En effet, les hôpitaux n’arrivent pas à honorer totalement cette mission, voire pas du tout comme dans le cas du réseau Iris à Bruxelles. Pour expliquer cette situation, un coupable est clairement désigné: le gouvernement.

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Une réouverture à la va-vite

Pour comprendre ce mécontentement vis-à-vis du fédéral, il faut remonter à la réunion gouvernementale de jeudi dernier. Depuis le début de la semaine passée, les organisations médicales ont reçu pour consigne d’attendre ce moment-là pour savoir ce qu’elles devraient faire pour commencer la reprise des consultations. L’état d’esprit était alors d’opérer un retour progressif mais beaucoup d’incertitudes pesaient encore.

Mais, jeudi soir, coup de théâtre: le SPF Santé demande à ce que pour le lundi 5 mai, les hôpitaux reprennent à 100% leurs activités de consultations. «Alors qu’il y avait le congé du 1er mai et le week-end, on a appris que l’on devait réagir en un temps record. Question timing, on pouvait difficilement faire pire», explique Philippe Devos, président du syndicat médical ABSyM. «De plus, on n’a par exemple pas eu de précisions sur les délais d’attente entre chaque patient. De ce fait, il n’a pas été possible de s’organiser efficacement et on a dû inventer sur le terrain la manière de redémarrer. Une majorité d’hôpitaux n’ont pas pu le faire, comme pour les réseaux Iris. Quant aux autres, personne n’est revenu à 100% des capacités. Par exemple, à Liège, le CHU n’a rien repris, l’Hôpital régional de la Citadelle a redémarré à 30% d’activité et le MontLégia 50%».

Une sélection difficile des patients

Ce couac de communication gouvernementale serait donc à l’origine de ce blocage. C’est également le sentiment qui prédomine du côté d’Étienne Wéry, administrateur-délégué d'Iris. «Le gouvernement préfère que chaque hôpital se débrouille seul», déplore-t-il à Belga. Et s’il y a une critique aussi franche, c’est que les médecins ont d’autres griefs à présenter. «Des jours avant que l’on nous transmette la circulaire du jeudi, la ministre avait écrit noir sur blanc dans une de ses slides qu’il y allait avoir une réouverture de la médecine non-Covid. Mais de notre côté, on n’avait pas encore les instructions. Cela fait donc dix jours que des gens nous contactent par milliers par jour alors qu’il y avait cette incertitude», se désespère Philippe Devos.

Face à une telle demande, la question qui taraude les call centers des hôpitaux est de savoir comment gérer cet afflux alors que les services ne commencent vraiment à rouvrir que depuis ce lundi. Les organisations médicales et les syndicats ont établi une catégorisation en quatre ensembles et seuls les deux premiers, les «soins urgents» et «nécessaires», sont acceptés. Mais il n’est pas toujours facile de trancher si tel ou tel patient se trouve ou pas dans ces classes. Les call centers sont souvent obligés de demander au médecin traitant de trancher à leur place, du moins lorsqu’ils ont la logistique nécessaire pour cela.

Une fois ce tri réalisé, les patients qui n’auraient pas été retenus devront attendre. La question est: combien de temps? «Quand on voit le nombre de patients que l’on a déjà, on devrait en avoir pour un mois selon moi pour commencer à les accueillir dans certains hôpitaux. Pour couronner le tout, les épidémiologistes annoncent la possible arrivée d’une vaguelette de nouveaux cas Covid-19 avec le déconfinement. De ce fait, on ne devrait donc pas pouvoir retourner à plus de 70% de notre activité habituelle en hôpital», prévient Philippe Devos.

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