Les CPAS démunis face à l’arrivée prochaine de victimes de la crise

Pour l’instant, les centres d’action sociale arrivent à gérer la situation. Mais ils craignent les défis posés lors du déconfinement. Les soutiens financiers s’annoncent insuffisants alors que le nombre de demandes d’aides devrait exploser d’ici quelques semaines.

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Dans les services du CPAS, c’est un peu le calme avant la tempête. Tant bien que mal, leurs services continuent à fonctionner, notamment avec une aide alimentaire et en répondant aux demandes en gaz et électricité, même si la recherche d’emploi et de logement s’avère compliquée. Mais la hausse des appels téléphoniques fait pressentir ce qui ressemble à une bombe à retardement, à savoir un afflux considérable de personnes touchées par la crise. Encore limitée aujourd’hui, l’augmentation ne devrait pas tarder et les CPAS s’avouent pour le moment bien mal armés dans cette perspective.

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Une crise de «plusieurs mois, voire années» en prévision

Quelle est donc l’ampleur et la teneur de la vague à venir de demandes ? Plusieurs éléments donnent déjà quelques indications. «On constate l’arrivée d’étudiants, notamment dans une ville comme Namur où 38% des personnes venant au CPAS ont entre 18 et 25 ans», décrit Philippe Noël, président du CPAS de la capitale wallonne. «On a aussi noté un afflux de chômeurs qui soit n’ont pas eu d’aides suffisantes ou assez rapides. D’autre part, il y a ceux en chômage temporaire mais par définition, cela devrait être passager», précise-t-il.

Les indépendants, comme le laisse présager leurs difficultés récentes, sont également attendus. Mais pour l’instant, ils sont encore hésitants à se rendre dans les CPAS. «Nous avons des appels d’indépendants pour se renseigner mais ils n’en sont pas encore au stade où ils introduisent une nouvelle demande», constate ainsi Jean-Paul Bonjean, président du CPAS liégeois.

Il semble toutefois qu’il ne leur faudra pas longtemps avant de franchir le seuil des centres d’action sociale. Ils ne seraient d’ailleurs pas les seuls. «On redoute l’arrivée d’un nombre important de personnes mais avec un décalage dans le temps, au fur et à mesure que des personnes vont perdre leurs emplois. L’exemple des licenciements chez Brussels Airlines montre que la crise a un impact social très important. Ce sont des personnes qui vont arriver au CPAS après être passées par la case chômage. On estime ainsi que nos centres vont voir cette crise s’étaler sur plusieurs mois, voire années», juge Philippe Noël.

Pas les ressources nécessaires face à un tel défi

C’est dans cette optique que les CPAS wallons, bruxellois et flamands ont appelé à l’aide le fédéral la semaine passée. Ils demandent à ce qu’il prenne en charge 200 à 250€ mensuels supplémentaires, accordés aux plus précarisés de manière inconditionnelle pour la durée de la crise. Autres points: un soutien pour le gaz et l’électricité, ainsi qu’une aide aux CPAS en remboursant le revenu d’intégration à hauteur de 90%.

Si pour l’instant, la région bruxelloise a émis une aide de 30 millions d’euros à ses CPAS, les centres wallons ne peuvent compter que sur un geste du fédéral de 15 millions donnés à l’échelle nationale, la région wallonne n'ayant pas encore fait un tel geste. «À l’heure actuelle, il y a 150.000 Belges qui dépendent exclusivement des CPAS. Cela veut dire que si on se limitait à ceux-ci pour distribuer cette aide, on a 100€ par personne et pour une seul fois. Cela ne satisfait donc pas du tout nos demandes, loin de là, d’autant que ce serait oublier ceux qui dépendent partiellement de nous», fait remarquer Philippe Noël.

Jean-Paul Bonjean lui emboîte le pas et appuie cette requête: «Il nous faut des aides supplémentaires afin d’aborder sereinement le tsunami attendu de demandes, c’est certain». Sans cela, les CPAS vont avoir beaucoup de mal à répondre à la surcharge de travail attendue une fois que le SPP fédéral dont ils dépendent aura donné ses directives pour un retour à la normale de leurs services. «Notre crainte est que l’augmentation du nombre de personnes chez nous pèse sur notre budget alors que nous avions déjà une augmentation de la précarité depuis 2018. Mais pour l’instant, nous insistons sur le fait de dire qu’il ne faut pas hésiter à aller au CPAS, ne fut-ce que pour savoir si telle personne a droit à telle aide. C’est notre rôle», rappelle Philippe Noël.

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