30 millions de masques insatisfaisants: comment la Belgique a été bernée?

Depuis le début de la crise, près de 30 millions de masques achetés par le gouvernement fédéral pour le secteur médical ont été refusés car ils ne répondaient pas aux normes. La Belgique, comme d’autres pays eux aussi arnaqués, pointe un responsable: la Chine.

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Les soignants se sont souvent plaints d’un manque de masques et maintenant, ils en savent la raison. Depuis mars, l’État fédéral a eu la mauvaise surprise de constater qu’environ 30 millions de masques achetés pour le personnel médical étaient d’une qualité insatisfaisante. Dans le détail, cela concerne plus de la moitié des 20 millions de FPP2 livrés et un masque chirurgical sur dix. Autrement dit, c’est comme si chaque Belge était passé à côté d’avoir un FFP2 et deux masques chirurgicaux.

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Ce samedi 27 juin, le ministre Philippe De Backer, en charge du dossier, reconnaît les faits. «Pour tous les dossiers dans lesquels la qualité n’était pas au rendez-vous, une procédure a été lancée», déclare-t-il à Belga en insistant sur les conditions difficiles dans lesquelles les commandes ont été passées. Dans le détail, il a surtout de quoi en vouloir à la Chine et à des commerçants peu scrupuleux.

Made in China

Pour comprendre, petit retour en arrière. Mars 2020: la Belgique n’a pas assez de masques pour faire face à la crise sanitaire qui se profile, comme d’autres pays européens. Il faut donc que l’État en achète en grosses quantités et vite. Or à ce moment-là, les principaux fournisseurs sont chinois et le «Made in China» est resté fidèle à sa réputation de marchandise de moins bonne qualité.

«Beaucoup de premiers arrivages étaient mauvais, c’était frappant», confirme Yves Van Leathem, porte-parole interfédéral et infectiologue au CHU Saint-Pierre. «Les hygiénistes se sont rendus compte qu’un certain nombre de masques, venus de Chine pour la plupart, avaient des fuites particulièrement importantes. Il se peut qu’une partie du problème réside dans le fait qu’ils n’étaient pas adaptés à des visages européens».

De nombreuses arnaques

Outre cet aspect plutôt technique, le problème réside aussi dans les ventes en tant que telles. Belga fait savoir que 90% des milliers d’offres pour l’achat de masques reçues par le gouvernement fédéral ont été jugées frauduleuses. «Ce qui a posé souci, c’est que l’on devait faire confiance à des fournisseurs que l’on ne connaissait pas bien, un peu comme pour un achat sur Amazon. Des personnes provenant du commerce de tissu se sont lancées dans le secteur des masques et ont commencé une production sans avoir les connaissances suffisantes pour créer de bons produits. Leur but était surtout de faire du chiffre d’affaires. Il leur a suffi de se targuer d’avoir les normes suffisantes pour écouler leurs stocks», explique Yves Van Leathem.

Ces ventes peu scrupuleuses n’ont d’ailleurs pas frappé que la Belgique. Au début de la crise, plusieurs pays ont eu la même blague avec la Chine. C’est le cas de l’Allemagne, comme le relève le Spiegel, avec un arrivage à Munich de onze millions de masques jugés inutiles. En Autriche, la télévision publique révèle qu’il en est de même pour les FFP2 passés par l’aéroport de Vienne et destinés au Tyrol. Maintenant, est-ce que la Belgique a été plus roulée dans la farine que les autres? «Je ne sais pas le dire», avoue Yves Van Laethem, «il faudra voir ce que chaque pays pourra dire à ce sujet avec le recul».

Problème (en partie) réglé

Depuis, d’autres producteurs de masques plus sérieux se sont présentés comme des alternatives pour que les États évitent d’acheter des masques pour rien. Même si la qualité n’est pas toujours au rendez-vous, cela a permis d’éviter des défauts d’adhérence au visage, de fuites sur les côtés du masque, etc. «Je suis pratiquement sûr qu’au fil des mois, ce problème s’est atténué», juge Yves Van Laethem.

Il n’en reste pas moins qu’il y a encore aujourd’hui des couacs, et ce surtout dans le commerce. Début de cette semaine, Test-Achats l’a encore démontré en analysant la qualité des masques. Bilan: sur cinq masques chirurgicaux (vendus surtout en pharmacie), seul un répond aux normes d’efficacité. Les masques jetables trouvés dans les supermarchés s’avéraient même meilleurs alors qu’ils étaient moins chers. Enfin, quatre masques en tissu sur dix ne convenaient pas. Test-Achats a ainsi appelé à «davantage de contrôles des pouvoirs publics sur la qualité et la certification des masques vendus, ainsi que des normes de qualité plus contraignantes pour les fabricants».

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