
L’état de la biodiversité en Wallonie? "Majoritairement défavorable"

Restaurer la biodiversité: c’était un des objectifs annoncés du gouvernement wallon dans sa déclaration de politique régionale. Depuis, la coalition PS-MR-Ecolo a dévoilé sa stratégie « biodiversité 360° », qui vise « à enrayer le déclin de la biodiversité régionale » dès 2030, avec 2050 en ligne de mire. Parmi les mesures avancées, la promesse de planter 4.000 km de haies et/ou un million d’arbres, ou la désignation, chaque année, de 1.000 hectares d’aires protégées. Fin mai, la ministre wallonne de l’environnement, Céline Tellier annonçait la création de 1.098 ha d’aires protégées pour 2020.
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Un bon début, mais qui ne peut masquer tout le chemin qui reste à parcourir. Ni les échecs passés. L’administration wallonne a en effet mis à jour cette semaine les indicateurs en ligne évaluant l’état de la biodiversité en Wallonie. Et ils ne sont pas bons. C’est même l’administration qui le dit : l’objectif pour 2020 « d’enrayer la détérioration des habitats et espèces d’intérêt communautaire et d’améliorer leur état de manière significative et mesurable » fixé par l’Europe, reste à ce jour, « non atteint ».
Tendance négative
On parle ici d’espèces végétales ou animales, en danger, vulnérables, rares ou typiquement européennes. On en dénombre 75 en Wallonie, réparties dans la région « atlantique » (nord du sillon Sambre-et-Meuse) et « continentale » (au sud). Entre 2013 et 2018, sur les 56 espèces que compte la région « atlantique », 40 étaient dans un état de conservation défavorable (relatif à la dynamique de la population de l’espèce, à la diminution de son aire de répartition naturelle et à la sauvegarde de son habitat). Seules 8 espèces étaient dans un état favorable ; 8 dans un état inconnu. Pour la région « continentale », 52 des 72 espèces étaient dans un état défavorable (pour 15 dans un état favorable et 5, inconnu).
Des résultats qui n’augurent rien de bon, surtout si on les compare avec la précédente période d’analyse, entre 2007 et 2012. Malgré certaines modifications méthodologiques qui compliquent la lecture des données, la tendance observée reste claire : « le nombre global d’espèces dans un état de conservation défavorable a augmenté », note l’administration wallonne de l’environnement.
Encore trop de pesticides
Une des principales causes de cette tendance négative reste la pratique de l’agriculture intensive. On peut notamment pointer l’usage excessif de pesticides ; selon des chiffres avancés dans le cadre du Programme wallon de Réduction des Pesticides, la Belgique était en 2013 dans le « top 5 » des plus grands consommateurs de pesticides en Europe. Et en 2014, la quantité d’azote minéral appliquée sur les surfaces agricoles wallonne était deux fois plus élevée que la moyenne européenne. Si les engrais favorisent la production végétale, ils peuvent aussi, apporter aux sols des éléments indésirables, ou être entraînés vers les masses d’eau, altérer leur qualité (on parle d’eutrophisation) et dès lors impacter la biodiversité.
D’autres facteurs sont également à prendre en compte, comme l’artificialisation et l’urbanisation des terres (les terrains artificialisés ont progressé de plus de 40% entre 1985 et 2019) ou le développement des infrastructures de transport. Ensemble, ces phénomènes provoquent la fragmentation et de la diminution des habitats naturels des espèces et augmentent leur isolement.
Après avoir loupé les objectifs 2020 fixés par l’Europe, la Wallonie va donc devoir cravacher pour remplir les siens, dans le cadre de sa stratégie « Biodiversité 360° ». D’autant que dans l’intervalle, la Commission européenne a déjà dévoilé une prochaine échéance. Pour 2030, 30% des terres et des mers d’Europe devront être placés en zones protégées, dont 10% sous la forme de réserves naturelles. En Wallonie, seul 1% du territoire est pour l’instant couvert par des réserves naturelles.