Qui est Roger Stone, le roi des coups bas sauvé par Donald Trump?

Donald Trump a commué la peine de prison de son ami et ancien conseiller Roger Stone, qui l’a lancé en politique. Portrait.

Roger Stone est désormais un homme libre - BELGA IMAGE/Brendan Smialowski

Il se fait appeler le magouilleur professionnel. Après près d'un demi-siècle de coups bas politiques, Roger Stone devait enfin tomber. En février dernier, l'ex-conseiller et vieil ami de Donald Trump avait été condamné à quarante mois de prison pour mensonge sous serment, subornation de témoin et entrave à la justice dans le cadre de l'enquête sur l’ingérence russe dans la campagne de l'élection présidentielle de 2016. Sa peine devait commencer la semaine prochaine, mais le Républicain en a décidé autrement. « Aujourd'hui, le président Donald J. Trump a ordonné une mesure de clémence exécutive pour commuer la peine injuste de Roger Stone », a annoncé vendredi soir la Maison Blanche dans un communiqué. Il est désormais un homme libre.

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Il a inventé les fake news avant que le terme n'existe

Avec son style de dandy et son portrait de Nixon tatoué dans le dos, le consultant est l'une des figures les plus controversées de la politique américaine. Son mot d'ordre? Tous les coups sont permis. Il le prouve dès le plus jeune âge, en primaire. En 1960, lors d'une simulation de l'élection présidentielle, le jeune garçon dit à ses camarades que Richard Nixon compte rendre l'école obligatoire le samedi. Son candidat, JFK, l'emporte haut la main. Si sa première victoire politique a été acquise « contre » le futur président républicain, c'est bien pour lui et sa réélection qu'il travaillera douze ans plus tard, à même pas 20 ans. C'est à cette époque qu’il signe son premier coup tordu, qui lui vaudra d'être mentionné dans l'affaire du Watergate: sous le pseudonyme de Jason Rainier, il verse 6.000 dollars à un détective privé, qui infiltra la campagne du candidat démocrate Pete McCloskey, et effectue une fausse donation au nom d'une organisation de jeunes socialistes au profit d'un candidat républicain afin de le discréditer.

Roger Stone fait le V de la victoire devant les photographes

© REUTERS/Joe Skipper

Reagan, Bush et Trump

Ce scandale n'a pas découragé ses ambitions, loin de là. Adepte des fake news avant l'heure, Roger Stone a contribué depuis, de près ou de loin, à toutes les campagnes présidentielles victorieuses des Républicains. Ce qui lui vaut des surnoms aussi flatteurs que « le Parrain » ou « le prince des ténèbres ». Lui-même s'autoproclame d'ailleurs « dirty trickster », soit « sale filou ».

Tout au long de sa carrière, il suit la même recette: discréditer les adversaires politiques en diffusant de fausses publicités et de fausses accusations. « Attaquer, attaquer, attaquer, ne jamais se défendre », résume-t-il. Dans les années 80, le fin stratège participe à l'essor des comités d'action politique, des organisations privées qui dépensent des millions de dollars pour influencer les élections et l'adoption de certaines lois. C'est à ce moment qu'il devient ami avec Donald Trump et l'incite à se lancer en politique, dès 1987. Il lui conseille notamment de semer le doute sur le lieu de naissance de Barack Obama en 2011. Quand le magnat de l'immobilier décide finalement de se présenter quatre ans plus tard, Roger Stone est l'un des premiers à s'engager derrière lui, avant d'être rapidement écarté pour des raisons obscures. Mais son soutien pour le futur président ne se dément pas pour autant. Pendant la campagne, « l'homme de l'ombre » n'hésite pas à se montrer en public, en portant un t-shirt à l'effigie de Bill Clinton avec la mention « violeur » ou en criant haut et fort « Enfermez-la », le slogan des partisans de Trump contre sa rivale démocrate Hillary Clinton.

"Enfermez-le" est-il écrit sous une photo de Roger Stone

© BELGA IMAGE/Amy Beth Bennett

« Il vaut mieux être tristement célèbre que pas célèbre du tout »  

Si son influence auprès des Républicains est indéniable, Roger Stone ne s'est pas fait que des amis au sein du parti. Surtout que ce libertarien revendiqué est pro-choix, pro-légalisation des drogues douces et pro-mariage gay. Dans Get Me Roger Stone, documentaire qui retrace ses magouilles et son ascension, une scène mémorable le montre défilant torse nu lors d'une Gay Pride. « Il vaut mieux être tristement célèbre que pas célèbre du tout », aime répéter l'agent provocateur. Son sauvetage par Donald Trump, alors que le président américain est décrit par sa nièce dans un livre sulfureux comme un manipulateur narcissique qui « a fait de la triche un mode de vie », pourrait lui donner une nouvelle règle d'or: « Qui se ressemble s'assemble ».

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