Cet été, c’est la ruée vers Mars

D’ici à la mi-août, trois missions décolleront vers la planète rouge. Le but : rechercher des traces de vie ancienne, et préparer le terrain pour une future exploration humaine.

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C’est une petite fenêtre de tir, un alignement des planètes (littéralement) qui ne se produit que tous les 26 mois. Autant dire qu’il vaut mieux ne pas la rater. Pendant un mois, de la mi-juillet à la mi-août, les orbites de Mars et de la Terre présenteront une configuration optimale pour entamer un voyage le plus court possible. Un voyage qui devrait tout de même durer de 6 à 8 mois, le temps de couvrir les 55 millions de kilomètres reliant les planètes bleues et rouges. Initialement, quatre missions devaient se lancer à l’assaut de Mars cet été. ExoMars, menée par l’Agence spatiale européenne (ESA), n’a pas surmonté d’importants problèmes techniques et a déjà dû déclarer forfait, au moins jusqu’en 2022.

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Enjeux symboliques

La première des trois rescapées sera la mission Hope, des Émirat arabes unis, qui devrait décoller ce jeudi à 8H43 GMT (le lancement, prévu pour mardi, a été reporté pour cause de mauvaise météo). Son objectif est de mettre en orbite une sonde, chargée d’étudier la météorologie martienne. Première mission arabe à s’élancer dans le Système solaire, Hope revêt également une fonction symbolique, puisqu’elle devrait rejoindre Mars en 2021, pile à temps pour fêter le cinquantenaire de la naissance des Émirats.

Le lancement de la chinoise Tianwen-1 est lui programmé pour le 23 juillet. La mission, plus ambitieuse sur le plan scientifique - elle comprend un orbiteur mais aussi un atterrisseur et un rover capable d’analyser les roches martiennes - est aussi une vitrine pour Pékin : elle est censée couronner le centenaire du Parti communiste chinois (PCC) l’année prochaine.

Enfin, la Nasa pilotera Mars2020, à partir du lancement de la mission le 30 juillet, qui partira du Centre spatial Kennedy, à Cap Canaveral (Floride). Son but : faire atterrir sur Mars l’équivalent d’une petite voiture, un rover nommé Perseverance, lourd de plus d’une tonne et long de 3 mètres. Initialement prévu le 17 juillet, le lancement a déjà été décalé plusieurs fois pour des problèmes sur la fusée. Avec le début de la saison des ouragans sur la côte Atlantique, il flotte un petit parfum d’incertitude sur Cap Canaveral. Pour les Américains, une annulation de la mission serait en effet un camouflet si dans le même temps, les Chinois parvenaient à faire décoller Tianwen-1.

Remonter aux origines de la vie

Éminemment symboliques, ces trois missions martiennes ne sont pas pour autant dépourvues, à des degrés divers, d’un intérêt scientifique certain. « Mars est la priorité des explorations spatiales car on sait qu'il y a des milliards d'années, elle a été habitable », a expliqué lors d'une conférence de presse Jean-Yves Le Gall, le président du CNES, l'agence spatiale française ayant participé à la mission Mars 2020 de la Nasa.

Si l’on sait depuis 1976 et le programme Viking que la vie est absente de ce désert glacé, la question est désormais de savoir si Mars fut dans un loin passé, habitée. Sur Terre, la tectonique des plaques a fait disparaître les traces des moments ayant précédé l’émergence de la vie. Mars, qui dans son histoire ancienne a connu une période humide en même temps que la Terre, a pu elle, garder des vestiges de ces premiers temps. Retracer l’histoire de Mars, c’est donc aussi retracer celle de l’eau, et donc, remonter aux origines de la vie sur notre planète bleue.

Pour entamer ce voyage dans le temps, la Nasa compte poser son rover Perseverance dans le cratère Jezero, une zone qui fut autrefois inondée. Le robot devra procéder à des petits carottages de régolithe (le sol martien), afin de prélever ce qui était à l’origine de la boue. Vinciane Debaille, chercheuse à l’ULB, fait partie des cinq scientifiques participant à la mission de la Nasa. Elle devra, entre autres, se prononcer sur les décisions de forage. « Le problème reste le nombre limité d'échantillons qui pourra être ramené sur Terre. Il faut donc réfléchir de manière très précautionneuse aux échantillons qu'on va forer, afin d'optimiser les questions scientifiques qui pourront être adressées », a-t-elle expliqué. Si tout se passe comme prévu, une future mission sera en effet chargée de collecter les échantillons forés par Perseverance, et de les ramener sur Terre à l’horizon 2031.

À quand un autre petit pas pour l’homme ?

Ces trois missions seront aussi l’occasion de récolter de précieuses informations pour un objectif plus lointain : un homme sur Mars. Dès 1990, le président américain George Bush Sr. l’annonçait : un astronaute posera le pied sur la planète rouge avant le 20 juillet 2019, cinquantième anniversaire du premier pas sur la Lune. Une deadline manifestement manquée, et les promesses similaires de trois de ces successeurs (Bush fils, Obama et Trump) n’ont découlé sur aucun programme concret.

D’innombrables problèmes techniques se posent encore (tant pour le voyage proprement dit que pour le séjour sur place), ce qui fait dire à Michel Viso (propos recueillis par l’AFP), exobiologiste et membre de l’agence spatiale française CNES, qu’une exploration humaine de Mars n’aura pas lieu avant « 20, 30, ou 40 ans ».

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