
La Belgique dit oui au Green Deal, mais finance les énergies fossiles

Aujourd'hui, cela fait deux ans jour pour jour que les élèves de secondaires de toute l'Europe ont décidé de sécher les cours pour réclamer des mesures contre le réchauffement climatique et pour un continent vert. Dans une lettre ouverte, les activistes Greta Thunberg, l'Allemande Luisa Neubauer et les Belges Anuna De Wever et Adélaïde Charlier, dénoncent « deux années d'inaction ».
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« [Les leaders politiques] parlent de crise existentielle, mais quand il s'agit de passer à l'action, nous sommes toujours dans un état de déni. Le vide entre ce dont nous avons besoin de faire et ce qui est réellement fait s'agrandit chaque minute. Concrètement, nous avons perdu deux nouvelles années cruciales en inaction politique ».
Green Deal ou Green washing ?
Ces mots viennent compléter une enquête d'Investigate Europe qui révèle que les Etats membres de l'Union européenne (ainsi que la Norvège, la Suisse et le Royaume-Uni) sabotent leur propre Green Deal en finançant à hauteur de 137 milliards d'euros par an le secteur des énergies fossiles – à titre de comparaison, le budget de l'Union s'élève à 155 milliards d'euros pour 2020.
Ces financements se font de manière souvent détournée, via des avantages fiscaux, des régimes avantageux ou le système d'échange de quotas d'émission polluante entre les pays. Ce qui permet à la plupart des pays incriminés de nier purement et simplement les subsides alloués aux combustibles fossiles. Cet « état de déni » dont parle Greta Thunberg.
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Si l'Allemagne est au sommet de cette liste en chiffres absolus, avec 37 milliards d’euros par an, la Belgique est réellement le meilleur élève européen quant il s'agit de donner un coup de pouce aux pollueurs. Notre pays alloue 6,9 milliards d'euros en chiffres absolus. Concrètement, ce chiffre signifie que chaque année, chaque Belge contribuable débourse 607 euros pour financer les secteurs des énergies polluantes.
Mesure phare de ce système, les avantages fiscaux liés aux voitures de société, cette spécificité bien belge déjà dénoncée par la Commission européenne, dont on estime le manque à gagner pour la trésorerie belge à 3,7 milliards d’euros par an. En 2019, le WWF avait ainsi calculé que la Belgique encourageait cinq fois plus l’utilisation des voitures de société que les transports en commun. La WWF avait également calculé que le subventionnement du mazout, qui compte pour 1,1 milliard d’euros, est 3,5 fois supérieurs au budget alloué à la rénovation et l’isolation des bâtiments.
L'argent public et privé carburent au mazout
Le Green Deal stipule une neutralité carbone d'ici à 2050. Les gouvernements européens se sont ainsi engagés à réduire leurs émissions de gaz à effets de serre de 40% d'ici à 2030. Afin de « décarbonner » l'économie européenne, l'idée est, selon le vice-président de la Commission Franz Timmermans, de « progressivement abandonner » ces subventions. Mais aucun Etat membre n'en prend le chemin. Les Etats membres ont été invités à remettre chacun un plan national intégré énergie-climat fin 2019 (PNIEC) devant tracer la route de la décarbonisation. Et aucun des 26 plans n’apportait des éléments sur la façon de lâcher progressivement ces subventions.
Un coup de pouce au Green Deal viendra-t-il du privé ? Selon Jeremy Rifkin, théoricien de la « troisième révolution industrielle », à savoir, la révolution verte, dans Le New Deal vert mondial, « Les forces du marché sont en train de venir à bout de la civilisation des énergies fossiles » en investissant dans les énergies renouvelables considérées comme plus sûres pour le futur en termes purement financiers. Or, les banques belges misent encore pleinement sur les combustibles fossiles ! En 2017, WWF dévoilait que les quatre banques principales du Royaume (BNP Paribas, Belfius, ING, KBC) plaçaient 40 milliards d'euros dans les secteurs polluants.
Allô, la Terre ? Greta Thunberg au téléphone : « Même un enfant peut voir que les politiques d'aujourd'hui sont incompatibles avec les meilleurs scénarios offerts par la science ».