CD&V/N-VA : je t'aime, moi non plus...

Le parti démocrate-chrétien serait finalement prêt à lâcher les nationalistes pour tenter l'aventure fédérale, tout en posant ses conditions. Pourquoi est-ce si difficile pour le CD&V de tourner le dos à son ancien partenaire ?

Joachim Coens, président du CD&V, finalement prêt à essayer de former un gouvernement fédéral - Belga

Joachim Coens, le président du CD&V, a donc fini par trancher. D'accord pour essayer de former un gouvernement fédéral sans la N-VA, mais son parti ne sera pas une pièce rapportée. Il réclame des conditions : une certaine rigueur budgétaire, non à loi sur l'IVG et aussi, tant qu'on y est, le poste de Premier ministre. Il ne veut pas d'une Vivaldi, mais d'une Avanti. Ce qui ne veut certes rien dire, sinon qu'il veut prendre la main. C'est le prix à payer pour que le CD&V coupe le lien qu'il conserve avec la N-VA.

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En début d'année, en effet, le parti démocrate-chrétien flamand avait refusé de lâcher Bart De Wever et les siens. Et aujourd'hui encore, c'est difficile. La raison étant que beaucoup de membres du parti sont nostalgiques du cartel formé il y a quinze ans entre les deux formations, cartel qui avait permis à l'ancien CVP de retrouver sa place au sommet de l'Etat belge. D'aucuns appellent d'ailleurs toujours de leurs voeux une réunification. C'est même dans cette direction que le CD&V semblait se diriger jusqu'il y a peu (et vers laquelle il pourrait de nouveau se diriger en cas d'échec des négociations). Car les années du cartel furent les dernières belles années d'un parti en crise existentielle depuis vingt ans.

Yves Leterme et Bart De Wever au temps du bonheur - Belga

Dave Sinardet, politologue à l'Université d'Anvers, expliquait la chose dans Knack en janvier dernier : « La question est la suivante : le CD&V peut-il survivre seul ? Le CD&V est basé sur une idéologie religieuse. Mais cela ne représente presque plus rien sur le plan sociologique. Vous connaissez encore beaucoup de personnes qui laissent leur vote dépendre de leur foi ? Ce qui reste aujourd'hui, c'est un parti qui se divise autour de certains sujets de société plus récents, comme la migration. Néanmoins personne ne sait si le parti est capable de fondamentalement se renouveler. En fait, c'est le même débat depuis vingt ans sans que rien ne change vraiment ».

Le CD&V, une relique de la Belgique de papa?

Parti fondateur (avec les libéraux) de l'Etat Belgique, quasiment hégémonique durant tout le XXe siècle, le CVP n'a cessé de perdre des plumes depuis le milieu des années 80. En 1999, c'est la débâcle et le renvoi dans l'opposition tant au niveau fédéral que régional. C'est à ce moment que le parti décide de se renouveler en ajoutant un aspect nationaliste à son ADN chrétien (le &V pour &Vlaams). C'est à ce moment là qu'un jeune Premier (en devenir), Yves Leterme, crée une alliance avec la toute jeune N-VA.

Le résultat ne se fait pas attendre. Le parti (ou plus exactement, le cartel) redevient numéro 1 et Yves Leterme son nouveau champion – Ah, ces 796.521 voix de préférence en 2007 ! Sauf que le cartel bute sur la réalité belgo-belge. En septembre 2008, c'est l'implosion suite à la démission de Geert Bourgeois, seul ministre N-VA au gouvernement Leterme I, au grand soulagement des partis francophones. Pourtant, la vraie crise institutionnelle arrivera un peu plus tard... Surtout, les liens entre les deux formations sont restés forts. Yves Leterme, encore lui, reconduisant notamment l'alliance dans son fief lors des communales de 2010.

Le fait est que les choses ont changé. Le numéro un n'est plus le CD&V, mais bien la N-VA. Et la question se pose réellement : le CD&V peut-il survivre sans son alliance nationaliste ? Car depuis la bulle Leterme (qui n'était de fait qu'une bulle...), le CD&V ne cesse de perdre des plumes. Au mieux, le parti stagne. Mais il n'est plus du tout indispensable ni à la Flandre, ni à l'Etat Belgique. Sauf aujourd'hui, à l'heure de former un gouvernement fédéral minoritaire, sans la N-VA... 

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