

Se lancer dans des études d’ingénieurs, comme Papa maman le suggèrent (plus ou moins lourdement) ? Partir en Australie, comme tout le monde (alors qu’on n’est pas trop fan des voyages, ou qu’on n’a pas le portefeuille suffisamment garni) ? Pour de nombreux jeunes, la fin du secondaire est un moment charnière, pas toujours évident à négocier. Certains entameront des études, mi-contraints mi-indécis ; d’autres prendront le premier job disponible, sans grand enthousiasme, mais il faut bien payer le loyer… C’est dans l’idée de leur offrir une alternative que des programmes de service citoyen essaiment un peu partout en Europe : 140.000 participants chaque année en France, 100.000 en Allemagne, 40.000 en Italie, etc.
Chez nous, avec moins de 500 jeunes par an, le dispositif est encore marginal. Voilà pourquoi la Plateforme pour le Service Citoyen, appuyée par une centaine de personnalités, parmi lesquels des recteurs d’université, des professeurs, des artistes et des membres du secteur associatifs, signent une carte blanche et veulent saisir la balle au bond : « les sept partis autour de la table [des négociations fédérales], si divergents sur tant de points, se sont tous positionnés en faveur de l’instauration d’un service citoyen volontaire en Belgique ». Ils demandent donc aux membres de la (probable) future coalition fédérale d’inscrire « l’instauration du Service Citoyen dans le nouvel accord gouvernemental », de créer « un cadre légal » et d’affecter « un budget significatif à son déploiement à grand (sic) échelle en Belgique ».
Le service citoyen permet à des jeunes de 18 à 25 ans de s’engager à temps plein et sur base volontaire, pendant 6 à 12 mois, dans des projets utiles à la collectivité (dans l’aide aux personnes, la culture, l’éducation ou l’environnement). Et ce, en contrepartie d’un accompagnement, de formations, d’indemnités et de droits sociaux. Selon les signataires, c’est un « puissant outil de maturation », à créditer de « résultats remarquables en termes d'émancipation de la jeunesse, de cohésion sociale et de renforcement du vivre ensemble ». « C’est un dispositif qui permet de répondre à ce que les sociologues appellent l’espace transitionnel, explique François Ronveaux, Directeur de la Plateforme pour le Service Citoyen.
En caricaturant, on peut dire qu’il y a un demi-siècle, un jeune de 25 ans était marié, avait deux enfants et une carrière à vie. Ce n’est plus le cas. De nos jours, l’espace entre le début de la majorité et la véritable entrée dans la vie active s’est dilaté. Les jeunes ne sont plus autant accompagnés qu’auparavant. Il y a une pression sociale grandissante, une injonction à l’autonomie. On dit au jeune : fais ta vie. Alors qu’il n’a pas toujours directement la maturité pour faire le bon choix, pour se lancer dans quelque chose qui lui correspond. Le service citoyen suspend cette pression : c’est une expérience, une tranche de vie, dans laquelle le jeune peut souffler, réfléchir. Avec un encadrement et des ressources, au contact de personnes bienveillantes, il va pouvoir tenter de trouver sa place dans la société. Et donner un sens à son parcours ».
Du côté de la Plateforme pour un Service Citoyen, on veut aussi mettre en avant les bienfaits indirects du programme. Celui-ci a d’autres effets, moins attendus, en plus de favoriser le brassage social et culturel entre des participants venant d’horizons parfois très différents. Active depuis 2011, l’association mène régulièrement des enquêtes de suivi auprès d’anciens participants. « À chaque fois ces dernières années, nous tournons autour de 80% de sorties positives, détaille François Ronveaux. Cela veut dire que dans les 6 mois qui suivent, le jeune a (re)- trouvé un travail ou une formation. Ce sont des résultats étonnants, qui sont égaux ou supérieurs à ce qu’on retrouve dans pratiquement tous les dispositifs d’insertion professionnelle. Et pourtant, ce n’est même pas l’objectif premier du service citoyen ».