Le bruit, un tueur qui fait 12.000 morts par an

L’Agence européenne pour l’environnement dénonce l’impact sanitaire de la pollution sonore. Une nuisance à laquelle la Belgique est particulièrement exposée. Et pourtant des solutions existent.

@BelgaImage

Le dimanche sans voiture a ramené le calme dans les rues mais le répit sera de courte durée, avec des conséquences manifestes pour la santé. Comme le note une nouvelle étude de l’Agence européenne pour l’environnement, le bruit fait 12.000 morts par an en Europe et provoque 48.000 maladies coronariennes (autrement dit des artères). Plus frappant encore: chaque année, les Européens perdent ensemble un total d’un million d’années de vie (des DALY dans le jargon scientifique). Il s’agit de la seconde cause de décès lié à l’environnement derrière la pollution de l’air et les données ne montrent pas de baisse. Et en la matière malheureusement, la Belgique n’est pas le pays le plus avantagé.

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Les dangers du stress sonore

Le bruit a toute une palette d’effets sur notre santé. L’Agence européenne de l’environnement en souligne quelques-uns particulier. Le plus logique, c’est l’impact direct sur l’audition, avec une perte auditive et des acouphènes. Mais cela est moins dû à une pollution sonore ambiante qu’à des moments spécifiques où le niveau sonore est élevé (écouter de la musique trop fort, environnement au travail, feux d’artifice…). Cela peut être invalidant mais ce qui est beaucoup plus vicieux, c’est le bruit ambiant qui augmente le niveau de stress. De là découle toute une série de conséquences fâcheuses: un sommeil plus pauvre et moins réparateur, voire une insomnie, des troubles psychiatriques (notamment chez les enfants), des effets métaboliques et cardiovasculaires (surtout chez les plus âgés), etc.

«On ne s’en rend pas compte, on vit avec et pourtant notre corps y réagit au niveau de la tension artérielle», a expliqué à la RTBF Marie Poupé, experte sur les questions de bruit à Bruxelles Environnement. «On dit souvent que les oreilles n’ont pas de paupières: elles sont toujours actives, elles analysent en permanence le moindre bruit […] On ne se souviendra pas forcément d’avoir entendu cette sirène et pourtant on l’a entendue, notre cerveau l’a analysée et notre corps a réagi en conséquence, notamment en sécrétant différentes hormones, des hormones de stress, de l’adrénaline».

Les personnes moins aisées plus exposées

En Europe, 20% de la population est exposée à plus de 55 décibels, un niveau critique pour la santé. Mais tout le monde n’est pas sur le même pied d’égalité. Les personnes avec un statut socio-économique plus faible sont plus affectées car elles vivent souvent dans des zones davantage exposées au bruit, par exemple à proximité des aéroports.

Parmi les pays où ce phénomène d’inégalité est le très éloquent, on trouve… la Belgique. Un fait lié à la densité de population particulièrement importante dans notre plat pays. Et évidemment, la région bruxelloise est particulièrement exposée en cumulant les sources sonores routières, ferroviaires, aériennes et industrielles. Sur la carte de la nuisance sonore, les zones les plus exposées de la capitale sont du côté d’Anderlecht, Schaerbeek et Evere, c’est-à-dire des communes parmi les plus pauvres. Le Sud-Est, plus riche, est lui relativement épargné. En région, la Flandre et le sillon Sambre-et-Meuse pâtissent logiquement de leur densité.

Et maintenant, que faire?

Les initiatives ne manquent pourtant pas pour lutter contre ce fléau. Au fil des années, Bruxelles a mis en place plusieurs plans d’action. Le dernier en 2019, dénommé «Quiet Brussels», a pour but  de réduire la charge sonore dans 30 «points noirs» particulièrement affectés. Cela peut passer par une ordonnance sur le bruit amplifié, la réduction de la vitesse sur la voirie, etc. Mais pas facile de s’attaquer à une pollution sonore désormais bien ancrée dans la société moderne. Comment réduire efficacement par exemple les nuisances sonores aériennes? La question reste d’actualité.

De son côté, l’Agence européenne de l’environnement préconise deux pistes. La première, c’est la réduction du bruit à la source à travers des mesures d'adaptation et de lutte contre la propagation du bruit. Ensuite, il y a la végétation, qui peut réduire les niveaux sonores par l'absorption de l'énergie sonore. Les toits végétalisés ont également montré une réduction du bruit. «Les zones naturelles tendent à libérer des nuisances sonores, ce qui induit une réduction des niveaux de stress et une amélioration de la qualité de vie», note l’agence.

Pour juger de l’enjeu de la réduction de la pollution sonore, l’expérience du confinement a été exceptionnelle. La réduction du trafic a permis de significativement baisser ces nuisances, avec des effets notables. «Alors que nous sommes devenus de plus en plus habitués à des niveaux de bruit insalubres en ville, cette réduction temporaire du bruit a permis à la population d'expérimenter les bénéfices immédiats lié au fait d'avoir des villes plus calmes», remarque l’étude. Une amélioration qui ne sera évidemment que temporaire.

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