
Liège, la ville la plus contaminée d'Europe?

C'est la deuxième fois que les yeux du monde entier se tournent vers la Belgique. D'abord pour son lourd bilan assumé au nom de la « transparence ». Aujourd'hui pour son retour à une situation de crise. Les projecteurs sont avant tout braqués - pour l'instant - sur la Wallonie, et plus particulièrement sur Liège. « La ville la plus contaminée d'Europe », selon certains médias, même si toute la province est concernée.
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Les hôpitaux tirent la sonnette d'alarme
« Pour le moment, effectivement, la province de Liège est la région où le virus circule le plus dans la population sur le monde entier », confirme auprès de la RTBF Philippe Devos, médecin aux soins intensifs du CHC de Liège et président de l'Association belge des syndicats médicaux. 2,5% des Liégeois sont positifs au Covid-19, soit deux fois plus que la moyenne du pays. Les hôpitaux sont au bord de la saturation. Au CHR de la Citadelle, ce dimanche, 153 patients étaient hospitalisés pour cause de Covid-19, dont 27 en soins intensifs, dépassant ainsi le pic de la première vague. Craignant le pire, les hôpitaux rappellent du personnel en urgence, ouvrent de nouvelles salles Covid et transfèrent des patients vers d'autres provinces belges et l'Allemagne voisine.
La situation est alarmante, d'autant que le personnel médical est sur les rotules ou absent. « On est dépassés, on est débordés, on est aussi un peu amers puisqu'on s'y attendait depuis deux mois. Les décisions n'ont pas été prises en temps voulu », dénonce le chef des soins intensifs au CHU de Liège Benoît Misset, en colère. « Personne n'a pris la situation au sérieux. Les politiques comme la population. »
Au CHR Citadelle à Liège, le 23 octobre - BELGA
Samedi, la gouverneure faisant fonction de la province de Liège, Catherine Delcourt, a annoncé des mesures supplémentaires, en matière de commerces et d'événements. Reste à voir si celles-ci seront suffisantes pour ralentir la propagation du coronavirus.
Un test liégeois sur trois est positif
« On a comme l’impression qu'inévitablement tout le monde va y passer ici », redoute Lucie, une Liégeoise vivant dans une colocation de sept personnes. Alors qu'elle est la troisième au sein de son foyer à avoir développé des symptômes ces deux dernières semaines, la jeune femme de 27 ans est consciente que « le virus est fort présent » autour d'elle, mais elle pointe aussi « l'effet testing ». « Quasiment tout le monde autour de moi a été se faire tester ces dernières semaines, parfois sans prescription, parfois plusieurs fois », observe-t-elle. L'augmentation des tests est-il la raison de l'augmentation des cas? C'est plus compliqué que ça. Tandis que le nombre de tests ne diminue pas - et reste important bien que seules les personnes symptomatiques soient désormais testées -, le taux de positivité, lui, augmente selon les derniers chiffres de l’Institut de santé publique Sciensano. Un test sur cinq est actuellement positif en Belgique, contre un sur trois dans la province de Liège. « C'est sûr que certaines personnes font moins attention que d'autres, mais je pense que c'est valable partout, et pas uniquement à Liège », compare Lucie, en quarantaine. « C'est facile de coller ce genre d'étiquette sur une ville réputée chaleureuse et ardente. On doit tous être plus prudents. Hier, c'était Anvers qui était touchée, aujourd'hui c'est Liège. »
Question de timing
Ces propos rejoignent ceux de Philippe Olivier, directeur médical du CHC MontLégia. « On nous regarde aujourd'hui comme le nouveau Bergame. Mais c'est une question d'heure pour que la situation soit la même dans les autres grandes villes », avait-il déclaré vendredi à L'Echo. Effectivement, les provinces du Hainaut, de Namur, du Brabant Wallon ainsi que Bruxelles ont toutes battu les tristes records du nombre d'admissions à l'hôpital observés lors de la première vague. « J'ai des craintes pour la crise sanitaire dans l'ensemble du pays », confie le bourgmestre de Liège Willy Demeyer. « Le virus circule vite et partout. »
Toutes les provinces sont atteintes, « avec un timing différent », a confirmé ce lundi le porte-parole interfédéral de la lutte contre le coronavirus, Yves Van Laethem. Si le sud du pays concentre le plus de cas actuellement, le nord du pays présente « les plus fortes augmentations en pourcentage », a constaté l'infectiologue, estimant que la Flandre a « dix jours de retard » sur les francophones.