
Engie prépare la fin du nucléaire en Belgique

Le 1er décembre 2025, Doel 2 sera le dernier des sept réacteurs nucléaires belges à s’éteindre définitivement ; c’est en tout cas ce que la loi de sortie du nucléaire prévoit. Un calendrier que le gouvernement De Croo s’est engagé à tenir. Avec une petite astérisque en bas du contrat, tout de même : une évaluation de la capacité d’approvisionnement énergétique du pays sera faite fin 2021. La Belgique se donne en effet un an pour évaluer si les alternatives- principalement la construction de nouvelles centrales au gaz- seront suffisantes pour combler le manque à produire consécutif à l’arrêt du nucléaire. Dans le cas contraire, la Vivaldi s’est dite prête à envisager la prolongation de Doel 4 et Tihange 3, les deux réacteurs les moins vieux du parc.
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De son côté, Engie Electrabel a une autre vision de l’agenda. Pour l’opérateur, le timing gouvernemental est trop serré. Lancer la prolongation de deux réacteurs nucléaires prend du temps ; il faut mener des études de conception, lancer des appels d’offre, entamer et finaliser les travaux de modernisation, commander du nouveau combustible. Selon l’exploitant, il est impossible de terminer la rénovation d’ici à 2025 - l’AFCN, l’autorité belge en matière de sûreté nucléaire, impose que les travaux soient réalisés à cette date - en recevant le go du fédéral l’année prochaine.
Investissements trop incertains
Dans une vidéo à destination du personnel, que Trends et l’Echo ont pu consulter, Engie prend acte de la volonté de la Vivaldi d’exécuter l’accord de gouvernement : « Nous pouvons donc en conclure que le gouvernement belge a définitivement opté pour la construction de nouvelles centrales au gaz. Cela signifie deux choses: une sortie complète du nucléaire. Ensuite, nous ne devons plus attendre une décision finale (pour une éventuelle prolongation des centrales, NDLR) pour la fin de 2021 ». Dès lors, l’opérateur a annoncé son intention d’arrêter tous les investissements liés à la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires, des investissements présentés comme trop incertains vus le contexte. « Engie Electrabel a annoncé l'arrêt des sept unités belges pour 2025, comme prévu dans l'accord de gouvernement, même si le gouvernement s'est laissé jusque fin 2021 pour acter sa décision », a confirmé à Belga Franco Vincent, délégué syndical Gazelco (CGSP/FGTB).
La porte encore entre-ouverte
Mais attention, il n’est pas encore dit que la Belgique fermera pour de bon la page du nucléaire en 2025. Dans sa communication à destination du personnel, Thierry Saegeman, patron des activités nucléaires d’Engie Electrabel, a en effet laissé la porte ouverte à une éventuelle prolongation. « Si, fin 2021, le gouvernement décidait finalement de garder les centrales, nous évaluerons la situation à ce moment-là et évaluerons ce que nous serons capables de faire ou non, à ce moment-là », a-t-il précisé, cité par la Libre.
Certains y verront une manière de faire pression sur le Fédéral, qui, dans les prochains mois, restera suspendu à une décision de la Commission européenne. L’Europe a en effet lancé une enquête pour juger de l’adéquation du mécanisme de rémunération de la capacité (CRM), sur lequel la Belgique compte pour subsidier la construction de nouvelles centrales au gaz. Celles-ci seraient condamnées si le CRM devait être jugé contraire à la réglementation européenne en matière d’aides d’État. Et, en l’absence de solutions renouvelables suffisamment développées, notre pays pourrait alors se trouver dans de beaux draps pour assurer sa sûreté énergétique. « (…) Il peut s’agir d’une stratégie d’Engie Electrabel dans le but de mettre un peu de pression sur sa volonté première : celle de prolonger deux unités. Ou tout du moins de prévoir la prolongation de deux unités » a jugé au micro de la RTBF Romain Wijckmans, secrétaire fédéral Gazelco.