Frank Vandenbroucke: Une communication qui dérange

Le ministre de la Santé publique Frank Vandenbroucke a déclaré que les commerces ont dû fermer parce qu'il fallait une « décision choc » psychologiquement, avant de brandir une justification plus argumentée. Trop tard, le mal est fait.

Frank Vandenbroucke: Une communication qui dérange

Frank Vandenbroucke est au cœur de la tourmente. Non pas parce qu'il a commandé pour 4,27 millions d'euros d'un traitement inefficace contre le Covid-19, mais pour ses propos à la sortie du Comité de concertation. Revenant sur la réouverture des commerces dits non-essentiels à partir de ce mardi, le ministre de la Santé publique a indiqué que faire du shopping ne présentait « pas de grand risque », si cela se faisait de manière contrôlée. Mais alors, pourquoi ont-ils dû fermer leurs portes pendant un mois? Parce qu'il fallait une « décision choc » pour provoquer « un électrochoc » dans la population, a-t-il répondu au micro de la VRT, admettant qu'il s'agissait d'une mesure « psychologique ».

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Cet électrochoc, le socialiste flamand l'aura finalement obtenu avec cette déclaration. Outré, le patron de Comeos Dominique Michel, invité sur le plateau de RTL-TVi, rappelle que des milliers de commerçants risquent la faillite. Le Syndicat Neutre pour Indépendants (SNI) juge, de son côté, la sortie du ministre « totalement irresponsable et irrespectueuse pour tous les efforts faits par ces entrepreneurs ». Quant à l'Union des classes moyennes, elle urge les autorités à revoir leur communication, « qui manque de clarté et de cohérence ».

Car, à entendre Frank Vandenbroucke, la fermeture des commerces n'était pas tant une recommandation scientifique, mais une décision politique. De quoi décrédibiliser encore davantage la parole politique aux yeux des citoyens.

Critiqué de toutes parts

L'opposition n'a pas raté cette occasion pour critiquer le gouvernement. « Une interview surréaliste », s'étonne la cheffe de groupe cdH à la Chambre, Catherine Fonck. « Quel cynisme face à tous ceux qui sont aujourd'hui laminés par la perte de leur activité. » Bart De Wever en rajoute une couche. « Si vous voulez conduire à la faillite les commerçants et convaincre les Belges de ne plus suivre les mesures, c'est exactement comme ça qu'il faut faire », regrette le président de la N-VA. Rappelons toutefois que son collègue, le ministre-président flamand Jan Jambon, a approuvé ces mesures.

Mais la communication de Frank Vandenbroucke est également critiquée dans les rangs de la majorité. « Des propos maladroits qui créent de la confusion », selon le président du PS, Paul Magnette. « Et c'est vraiment la dernière chose dont on avait besoin. » « On ne peut pas jouer avec le projet de vie de plusieurs milliers de personnes juste pour créer un électrochoc », a réagi son homologue libéral, Georges-Louis Bouchez. « Comment espérer l’indispensable adhésion de nos indépendants et des citoyens en procédant de la sorte ? » a répliqué Denis Ducarme, l'ancien ministre des PME et des indépendants, pointant le manque d'empathie de celui dont le sourire en conférence de presse agace lorsqu'il annonce des mesures pourtant négatives.  

Le président du sp.a Conner Rousseau est l'un des rares à avoir soutenu totalement Frank Vandenbroucke, son collègue de parti, préférant réagir aux critiques des libéraux. « Nous connaissons tous l’approche du MR sous le précédent gouvernement: un assouplissement trop rapide nous a mis dans cette merde. »

La riposte du ministre de la Santé

Pour se justifier, le ministre critiqué de toutes parts rappelle qu'il « était nécessaire de prendre des mesures qui allaient réduire rapidement et au maximum le nombre de contacts et de déplacements, et qui rendraient les risques de contaminations les plus faibles possibles ». Il évoque également un rapport de la Cellule d'évaluation (dissoute depuis), qui recommandait d'interdire tout déplacement non essentiel, soit en fermant les commerces non essentiels, soit en instaurant un périmètre de déplacement, comme en France. « La décision du Comité de concertation était de manière générale moins stricte que les propositions de la Celeval, mais le Comité de concertation a maintenu la fermeture des commerces non essentiels », a expliqué son cabinet lundi, renvoyant la balle aux experts.

Reste que ses propos mettent à nouveau en lumière la communication désastreuse du gouvernement, qui risque d'engendrer encore davantage de la méfiance. Pour rattraper le coup, les libéraux proposent d'ailleurs un nouveau Comité de concertation avant Noël, mi-décembre, pour évaluer toutes les décisions prises, dont celle de la bulle sociale maintenue à son strict minimum pour les fêtes de fin d'année.

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