
Élections en Géorgie : les démocrates à un siège de contrôler le Sénat américain

Il va rentrer dans l’histoire : Raphael Warnock, pasteur d’une église d’Atlanta où officiait en son temps Martin Luther King, va devenir le premier sénateur noir élu dans cet État du Sud. Selon les dernières informations publiées par CNN, le candidat démocrate aurait remporté un des deux sièges en jeu dans cette élection sénatoriale partielle en Géorgie, en décrochant 50,6% des voix contre 49,4% à son adversaire républicaine, la sénatrice sortante Kelly Loeffler (98% des suffrages dépouillés).
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Dans la nuit de mardi à mercredi, Raphael Warnock avait déjà revendiqué la victoire; de son côté, Kelly Loeffler n'a jusqu'ici pas concédé sa défaite. Les démocrates doivent encore arracher l’autre siège en jeu en Géorgie, pour empocher le Sénat. Quelques heures après la fermeture des bureaux de vote, le républicain David Perdue et le démocrate Jon Ossoff restaient au coude à coude, dans l’autre élection sénatoriale partielle. À 11h40 (heure belge), Ossoff émergeait toutefois d’un cheveu, avec 50,2% des voix contre 49,8% pour le républicain. Les démocrates semblent donc en mesure de créer la surprise, en l’emportant de justesse dans un grand État du Sud, qui vote traditionnellement conservateur.
Lourds enjeux
Lors du scrutin du 3 novembre, aucun des candidats en lice aux sénatoriales n’avaient obtenu plus de 50% des voix ; voilà pourquoi deux mois après les Présidentielles, les électeurs de Géorgie sont de nouveau appelés aux urnes. Pour l’instant minoritaires dans la chambre haute du Congrès, les démocrates doivent impérativement conquérir les deux sièges en jeu pour revenir à la hauteur des républicains (avec Raphael Warnock, ils comptent pour l’instant 49 sièges contre 50 pour les républicains). En cas de 50/50 au Sénat, c’est la future vice-présidente, Kamala Haaris, qui départagera les votes. En contrôlant l’ensemble du Congrès américain (les troupes de Biden ont 222 sièges à la Chambre des représentants, contre 211 pour les conservateurs), Joe Biden aura ainsi la voie beaucoup plus dégagée pour faire passer des réformes.
Signe des enjeux, les présidents élu et sortant avaient chacun fait lundi le déplacement en Géorgie pour mobiliser leurs électeurs. « Tout se joue aujourd'hui [mardi, jour de l’élection, ndlr]», avait prévenu Joe Biden, qui deviendra le 20 janvier le 46e président des Etats-Unis. Ces élections partielles pourraient être « votre dernière chance de sauver l'Amérique telle que nous l'aimons », avait quant à lui lâché Donald Trump, refusant toujours d’admettre sa défaite.
La victoire de Biden bientôt formalisée
Avant même le 5 janvier, plus de trois millions d’électeurs - un nombre record pour une sénatoriale partielle en Géorgie - ont voté par anticipation, soit près de 40% des inscrits. Probablement boostés par la victoire de Joe Biden dans l’État (une première depuis 1992), les démocrates auront réussi à mobiliser leurs troupes. Comme le relève l’AFP, Dave Wasserman, analyste du site indépendant Cook Political Report, a estimé que les républicains avaient un « problème de participation ». « C'est ce que nous avons vu en 2018: de nombreux électeurs de Trump ne se mobilisent simplement pas quand Trump n'est pas sur le bulletin. Est-ce que l'histoire se répète ce soir? Jusqu'ici, oui », a-t-il tweeté, rappelant la vague bleue à la Chambre il y a deux ans.
Le scrutin en Géorgie intervient à quelques heures d’une réunion du Congrès qui vise à formaliser la victoire de Joe Biden à la Présidentielle. Ce mercredi, Mike Pence, vice-président des États-Unis, conduira la séance conjointe de la Chambre des représentants et du Sénat. Celle-ci doit officialiser le vote des 306 grands électeurs en faveur de Biden, contre 232 pour Trump, avant l’investiture du démocrate, le 20 janvier.
La pression sur Pence
« J'espère que notre grand vice-président ne nous décevra pas », a lancé le président sortant en meeting en Géorgie lundi soir. « C'est un type formidable », a-t-il ajouté, « mais s'il nous déçoit, je l'aimerai moins ». Donald Trump a mis la pression sur son vice-président pour qu’il entrave la certification des résultats du 3 novembre. Mais selon la Constitution, le rôle du vice-président consiste uniquement à « ouvrir » les certificats envoyés par chacun des 50 Etats pour transmettre les votes de leurs grands électeurs. Seuls les élus, suivant une procédure bien précise, peuvent contester les résultats.
Bien que certains poids-lourds républicains, comme le chef des sénateurs Mitch McConnell, ont fini par admettre la victoire de Joe Biden, le président sortant peut encore compter sur le soutien de dizaines de parlementaires. A la Chambre comme au Sénat, ces élus ont promis d'exprimer leurs objections mercredi. Des objections qui ne pèseront toutefois pas lourd ; pour être retenues, celles-ci doivent être adoptées dans les deux enceintes du Capitole. Ce qui n’a aucune chance de se produire, vu la majorité démocrate à la Chambre. C’est donc un bien mauvais coup que Donald Trump joue à Mike Pence, écartelé entre les prescrits constitutionnels, sa loyauté envers le locataire actuel du Bureau ovale et les ambitions présidentielles qu’on lui prête pour 2024, ambitions qu’il pourrait bien devoir ranger au placard s’il venait à subir le courroux du président sortant et de ses plus fervents supporters.