

La participation citoyenne est une des modes de ces dernières années en politique, notamment en Belgique. En soi, elle est plutôt positive. Alors que la déconnexion entre les élus et la population est un sujet qui revient régulièrement sur la table, elle consiste à demander plus souvent l’opinion de tout un chacun dans la prise de décision, de lui donner plus d’importance, de poids, voire parfois, les pleins pouvoirs.
Lors des dernières élections communales, de nombreuses listes locales n’avaient que ces mots-là à la bouche, promettant, ou réclamant, à leurs concitoyens plus d’implication dans la vie de leur entité. Certaines de ces listes étaient d’ailleurs composées, totalement ou en partie, de citoyens non affiliés à un parti politique.
C’est ce qui explique qu’aux quatre coins du pays, de plus en plus de démarches de participation citoyenne sont mises en place : comités consultatifs, budgets participatifs, etc.
Désormais, c’est la Région wallonne qui lance une initiative de la sorte. Dans le cadre de son objectif de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55% entre 1990 et 2030, elle a décidé de demander à la population les décisions qu’elle devrait prendre. Non pas via une enquête publique mais bien en tirant au sort une cinquantaine de Wallons, formant le « panel citoyen sur le climat », comme le révèle Le Soir. A partir d’avril, ce comité se réunira un week-end par mois pour trouver des solutions ensemble.
Réunir ce panel n’a pas été une mince affaire. La Wallonie a contacté 5.000 personnes pour n’en garder que 75 (50 effectifs et 25 suppléants), avec un objectif de diversité et de représentativité.
Faire confiance à la population plutôt qu’à des experts en la matière, le choix étonne, mais le ministre wallon du Climat, Philippe Henry (Ecolo), est confiant. « Derrière des apparences qui peuvent être jugées techniques, c’est un débat facilement appropriable » argumente-t-il dans les colonnes du quotidien. « Il touche à la vie de tous les jours : le télétravail, les livraisons de l’e-commerce, la mobilité... On doit de toute manière trouver des solutions ambitieuses dans tous les secteurs (mobilité, énergie, agriculture, bâtiment, économie…). La position du curseur, les arbitrages et le phasage feront partie des débats. »
Philippe Henry. (Belga)
Le but : obtenir, d’ici la fin de 2021, une position citoyenne sur ces diverses thématiques qui permettront d’aider à réviser le plan « air-énergie-climat » wallon. Celui-ci devra être adopté avant la fin de l’année prochaine.
Pour ne pas livrer à eux-mêmes ces 50 "élus", ils pourront baser leurs discussions sur un document de l’administration, ainsi que sur les opinions de différents acteurs : syndicats, patronat et associations. Tout pourrait être mis sur la table, accepté ou rejeté. Le monde politique, lui, sera absent des débats. « Même si toutes les propositions ne sont pas reprises, elles serviront, y compris ce qui concernera les autres niveaux de pouvoir comme le fédéral », assure le ministre.
Difficile de ne pas penser à nos voisins français, où un tel projet avait été lancé à l’échelle nationale en 2019. Il s’agissait d’une des réponses du gouvernement Macron aux manifestations des Gilets Jaunes qui frappaient le pays.
(Crédit: Maxppp)
Là aussi 150 Français avaient été tirés au sort pour former la Convention Citoyenne sur le Climat. L’idée principale était la même que chez nous : faire baisser les émissions de CO2 entre 1990 et 2030, mais de 40%. Ce comité devait discuter de 5 thèmes, notamment en questionnant des spécialistes de chaque sujet : la mobilité, le logement, l’alimentation, travail et production et la consommation.
La CCC a remis ses 149 propositions au gouvernement en avril 2020. Celles-ci ont été transposées en un projet de loi, présenté au conseil des ministres français, il y a quelques jours seulement. Il comprend 65 articles, basés sur à peine la moitié des suggestions citoyennes, alors que le président de la République avait promis que leurs conclusions seraient transmises « sans filtre » mais qui a, à plusieurs reprises, changé de discours entre temps.
Pour un des 150 Français, qui a écrit un livre sur son expérience dans cette CCC, le projet de loi « ne va pas suffisamment loin, ne frappe pas suffisamment fort ». Il précise « qu’il y a certaines victoires aussi, mais selon nous il faut pouvoir avoir plus d'ambition. »
Le texte de cette loi sera présenté à l’Assemblée fin mars.