Uber, Deliveroo & co : les travailleurs des plateformes en quête d’un meilleur sort

(Faux) indépendants ou salariés ? Chauffeurs et livreurs de l’économie « collaborative » veulent sortir du flou qui entoure leur statut et réclament une rémunération correcte. La Commission européenne lance une consultation.

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Rien de plus facile que d’avoir un repas servi à domicile, une voiture à disposition : en un clic de smartphone, le tour est joué. Mais pour notre confort, certains paient un prix très élevé à l’autre bout de la chaine. C’est ce qu’ont dénoncé les syndicats ce mercredi, unis avec un collectif de coursiers et la fédération européenne des travailleurs des transports. Ce front commun a manifesté devant le siège de la Commission européenne (rond-point Schuman, à Bruxelles), contre l’exploitation des livreurs de repas et plus largement, des travailleurs des plateformes numériques.

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Avec la pandémie, celles-ci ont plus que jamais le vent en poupe. Dans les entreprises comme Uber Eats ou Deliveroo, le travail a augmenté de 30% ces deux dernières années. Bruxelles estime que 24 millions de citoyens européens ont travaillé au moins une fois sur ces plateformes, dont 3 millions à titre principal. Des données non négligeables, qui a poussé la Commission à lancer, ce mercredi également, une large consultation des syndicats et des organisations patronales de l’UE. L’objectif sera de mettre en œuvre des actions pour remédier aux « conditions de travail précaires (…) et d’accès insuffisant à la protection sociale » offerts par certains emplois pour le compte des plateformes, a souligné la Commission dans un communiqué. C’est ce que pointent d’ailleurs les syndicats, qui demandent une rémunération correcte pour les livreurs et une amélioration de leur statut.

Que les inconvénients, et pas les avantages

« Nous voulons que ces travailleurs soient mieux protégés. Aujourd'hui, il n'y a pas de salaire minimum, le régime sous lequel ils exercent leur activité n'est pas déterminé et il s'agit souvent de faux indépendants avec des contrats précaires. Ils doivent se soumettre entièrement aux grandes entreprises pour lesquelles ils travaillent », a expliqué à Belga Tom Peeters (FGTB/ABVV). Outil de travail acheté à leurs frais, dépendance à l’égard des plateformes et de leur algorithme qui sélectionnent les trajets des courses, baisse de leur cotation en cas de refus d’une course… Pour les syndicats, les travailleurs des plateformes ne bénéficient d’aucun des avantages que confèrent le statut d’indépendant, tout en ne jouissant pas de ceux offerts par le statut salarié, à commencer par un accès digne de ce nom à la sécurité sociale.

« Les coursiers ne peuvent compter que sur eux-mêmes lorsqu'ils rencontrent des problèmes ou quand leur moyen de transport est endommagé. Les grandes entreprises se déchargent de leurs responsabilités, mais elles continuent d'engranger des bénéfices. C'est inacceptable », lâchait Tom Peeters. Dans ce contexte, la Confédération européenne des Syndicats revendique une « présomption de salariat », pour que les travailleurs d’Uber, Deliveroo et autres soient, par défaut, considérés comme des salariés.

Incompatible avec le statut d’indépendant

Du côté des plateformes, on accueille favorablement l’ouverture d’une consultation par la Commission européenne. « Nous sommes impatients de contribuer aux discussions de manière constructive avec les décideurs politiques et les partenaires sociaux de l'UE sur ce sujet important afin que nous puissions collectivement offrir ce que les coursiers demandent », a réagit une porte-parole de Deliveroo Belgique.

Si la Commission est forcée de s’emparer du débat, c’est aussi parce que de nombreuses décisions de justice se sont succédés ces dernières années. En Espagne, la Cour suprême estimait en 2021 que les travailleurs de Glovo (plateforme de livraisons de repas présente dans 25 pays) étaient des employés. Même chose début d’année au Royaume-Uni, mais pour les chauffeurs Uber. En janvier 2021, la Commission Relation de Travail (ou CRT, l'organe qui tranche les litiges en cas de doute sur la nature de la relation de travail) rendait son avis sur le statut social d’un chauffeur Uber belge. La CRT a estimé que les conditions de travail fixée par l’entreprise étaient incompatibles avec la qualification de travailleur indépendant.

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