
Coronalert fait un flop

« Le testing et le tracing sont à présent performants dans notre pays » a jugé vendredi Karine Moykens. En Commission spéciale de la Chambre, la présidente du comité interfédéral Testing&Tracing est revenue sur les multiples couacs (centres de tests débordés, suivi défaillant des contacts à risque, etc.) qui ont fragilisé deux des piliers stratégiques (avec l’isolement et la vaccination) de la lutte contre le Covid-19. Au total, près de 900.000 personnes infectées ou ayant eu un contact à haut risque ont été contactées. Quelque 85% des patients et 88% des cas contact ont pu être joints dans les 24 heures, a déroulé Karine Moykens.
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Cette dernière a toutefois dû concéder une ombre (au moins) au tableau : la nette sous-utilisation de Coronalert. Pour rappel, cette application mobile devait compléter le tracing manuel, en enregistrant de manière cryptée et anonyme les signaux bluetooth échangés entre smartphones. Le but : prévenir les inconnus que l’on a vite croisés et aussi vite oubliés, en cas de test positif. En date du 26 février, 2,5 millions de personnes avaient téléchargé l’application, a détaillé Karine Moykens à la Chambre. Soit 28% des utilisateurs de smartphone en Belgique. Un chiffre impressionnant, supérieur à l’objectif des 15% fixé par les concepteurs de l’app.
Mais après un démarrage sur les chapeaux de roue (on comptait plus d’un million de téléchargement à la mi-octobre, quinze jours après le lancement), l’engouement pour l’application est progressivement retombé. Comme le note L’Echo, malgré l’interconnexion, début janvier, avec 10 autres apps anti-Covid en Europe, les téléchargements ont connu un net ralentissement.
Bugs, incompatibilités et occasions manquées
En plus de quelques bugs recensés ici et là, des problèmes de compatibilité ont ralenti la progression de Coronalert. Pendant longtemps, les smartphones un peu trop anciens ne supportaient pas l’application ; après modification, Coronalert nécessite désormais au minimum la version 6 d’Android, ou un iPhone 6. Et puis, le système implique, sur Android, d’activer en permanence le bluetooth et la localisation. Ce qui est fort couteux sur le plan énergétique et décharge rapidement la batterie de l’appareil. Même activée, l’application demande quelques manipulations de la part de l’utilisateur. Il faut encore lier le test Covid à l’app, via un code à 17 chiffres.
Et si ce test s’avère positif, donner son autorisation pour que le résultat du test soit transmis à tous les contacts croisés. Sur les 46 000 tests positifs reçus via l’application (selon des données avancées par L’Avenir), seules 16 700 personnes- soit un plus d’un tier- ont choisi de lancer l’alerte. Le choc du diagnostic ou les craintes concernant le respect de la vie privée pourraient expliquer toutes ces occasions manquées. Enfin, la dernière étape dans le processus est elle aussi défaillante. Via un écran rouge (qui se substitue au vert de l’application), l’utilisateur est informé qu’il a croisé un contact à risque. Il faut alors soi-même entreprendre les démarches pour se faire tester.
Ce qui, semble-t-il, n’a pas été compris par tous. « Des gens qui ont eu l’écran rouge déplorent que personne ne les ait contactés par la suite, a expliqué Karine Moykens (propos relayés par L’Avenir). Mais c’est impossible, c’est à eux de faire les démarches ».
Booster son utilisation
Malgré tous ces écueils, la présidente du comité interfédéral Testing&Tracing continue de trouver l’application nécessaire. « Je suis convaincue qu’il apporte une plus-value, en étant complémentaire au tracing classique. C’est très utile lorsqu’une personne contaminée a eu des contacts qu’elle ne peut signaler, même avec la meilleure volonté du monde : dans les transports en commun par exemple ». Pour booster son utilisation, une campagne de communication va être lancée, a annoncé Karine Moykens.
À une autre échelle, les déboires de Coronalert rappellent ceux du baromètre « Covid », un temps présenté comme l’outil décisif pour apprendre à « vivre avec le virus ». Il était destiné à informer le plus clairement possible la population belge de l'état de l'épidémie sur notre territoire, via quatre niveaux d’alerte auxquels correspondait une batterie de mesures sanitaires. Annoncé comme imminent durant une bonne partie de l’automne, il n’a finalement jamais été implémenté.