

« Le COVID-19 a mis en évidence et creusé les inégalités au sein des pays et entre les pays, et jeté une lumière crue sur le désintérêt sidérant de nos dirigeant·e·s à l’égard de notre humanité commune », a déclaré dans un communiqué Agnès Callamard, la nouvelle Secrétaire générale d’Amnesty International, à l’occasion de la publication du rapport 2020 de l’ONG sur la situation des droits humains dans le monde.
Analysant dans 149 pays les grandes tendances en matière de droits humains, ce rapport met en avant les « minorités, le personnel de santé et les femmes », qui font « partie des populations les plus durement touchées » par des « inégalité systémiques massives ». Et ce, en raison de décennies de politiques discriminatoires, de cures d’austérité, d’aides économiques et sociales « lacunaires », qui ont frappé de plein toutes celles et ceux qui se sont retrouvés en première ligne.
Amnesty International n’épargne pas la Belgique, où les autorités « se sont montrées incapables de garantir plusieurs droits humains », juge le rapport.
Sur le plan du droit de la santé, l’ONG rapporte plusieurs défaillances de l’État, que la pandémie aura révélées ou exacerbées : « Des violations du droit des résidents à la santé, à la vie et à la non-discrimination se sont produites du fait de manquements des pouvoirs publics: lacunes structurelles, absence d'attention prioritaire au début de la pandémie, non-accès aux hôpitaux, nombre insuffisant d'équipements de protection individuelle pour le personnel et trop faible dépistage », liste l’organisation, qui avait déjà alerté sur la situation dans les maisons de repos.
Toujours dans le cadre des mesures contre le virus, les autorités ont davantage recueilli nos données personnelles. « Des spécialistes du respect de la vie privée ainsi que des organisations de la société civile ont demandé que des garanties soient mises en place en vue de protéger le droit au respect de la vie privée, notamment en veillant à ce que les données permettant l'identification des personnes soient rapidement effacées », rappelle le rapport, qui se penche également sur les bases juridiques utilisées pour mettre en œuvre des restrictions massives de nos libertés.
« C’est une bonne chose que des travaux se tiennent actuellement sur l’élaboration d’une loi pour faire face à une situation épidémique, mais cette initiative aurait dû être prise il y a bien longtemps. Par ailleurs, beaucoup reste à faire dans le cadre de l’élaboration de l’avant-projet de loi pour garantir aux droits humains la place centrale qu’ils méritent. Nous insistons particulièrement sur le respect du principe de la non-discrimination, la prise en considération des personnes vulnérables, la modération dans l’exercice des pouvoirs de police, le type de sanctions prévues et la protection des données », a indiqué Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International.
La crise sanitaire aura vu également les réfugiés souffrir de restrictions dans leurs droits fondamentaux. Lors du premier confinement, les autorités belges ont fermé les bureaux de dépôt des demandes d’asile. « Des centaines de personnes ont ainsi été temporairement privées d'accès à la procédure d'asile, et de ce fait à une aide alimentaire et un hébergement », relève Amnesty. « Les autorités ont mis en place un système d'enregistrement en ligne, qui s'est révélé insatisfaisant ». L’ONG fait aussi part de ses préoccupations « quant aux excès de la police dans l’application des mesures, tels que le recours à une force disproportionnée et le profilage ethnique », et déplore certaines dispositions prises dans les prisons, qui ont réduit les possibilités de contact avec les familles.
Toutefois, malgré la pandémie, Amnesty International note quelques nouvelles positives pour les droits humains en Belgique, comme l’intensification de lutte contre les violences sexuelles, ou la création de l’Institut fédéral pour la protection et la promotion des droits humains.