
Ingérence russe: Poutine au coeur du complot pour faire élire Trump

C'est un nouveau chapitre du Russiagate que vient d'écrire The Guardian. Dans son édition du 15 juillet, le quotidien britannique affirme avoir pu consulter une série de documents classés qui auraient fuité du Kremlin. Selon ces derniers, Vladimir Poutine aurait ordonné, à ses agences d'espionnage, lors d'une réunion au sommet le 22 janvier 2016, d’utiliser « toute la force possible » pour aider Donald Trump à remporter la Maison Blanche dix mois plus tard. Le candidat républicain est décrit comme un « individu impulsif, mentalement instable et déséquilibré, souffrant d’un complexe d’infériorité », indique l'un de ces documents, avec l'espoir que sa victoire mènerait à la « déstabilisation du système sociopolitique » des Etats-Unis.
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Le but derrière ce projet d'ingérence est d'affaiblir la première puissance mondiale au moment de négocier avec la Russie, alors que les sanctions imposées par Washington après l’annexion de la Crimée en 2014 ont causé des tensions dans la société russe.
Exploiter les faiblesses américaines
Parmi les techniques envisagées : l’implantation de « virus médiatiques », autosuffisants et autoreproducteurs, dans le débat public, afin de manipuler l'opinion. Outre le président russe, le ministre de la Défense chargé des services secrets militaires, le GRU, Sergueï Shoigu, le chef des services du renseignement étranger de l’époque, Mikhaïl Fradkovd, et le grand patron du service de la sécurité fédérale (FSB), Alexander Bortnikov, auraient pris part à cette rencontre. Selon les révélations du Guardian, ils se sont entendus pour exploiter les faiblesses des États-Unis, comme le « fossé politique qui se creuse entre la gauche et la droite », la polarisation des médias et un sentiment anti-establishment qui s’est amplifié sous la présidence de Barack Obama.
Pour faire pression sur Donald Trump, le document affirme, tout en restant évasif, détenir des éléments « potentiellement compromettants » à son sujet, récoltés par les autorités russes lors d'un voyage « non officiel » de l'ancien magnat de l'immobilier en Russie. Au lendemain de cette réunion, Vladimir Poutine aurait créé par décret une nouvelle commission secrète interministérielle afin de mettre sa stratégie en application.
Scoop nuancé
The Guardian révèle que les agences de renseignement occidentales ont connaissance de ces documents depuis plusieurs mois. Les journalistes ajoutent par ailleurs avoir soumis leurs extraits à plusieurs experts indépendants qui les ont jugés « authentiques », tandis que le ton général serait « cohérent » avec la pensée du Kremlin en matière de sécurité.
Néanmoins, le quotidien britannique nuance son scoop avec des tournures rhétoriques prudentes. Les documents « sont estimés être » issus du Kremlin et auraient « fuité ». Ils apportent également « une confirmation apparente » que les services secrets russes détiennent un « kompromat », alors que le décret « semble » signé de Vladimir Poutine.
La Russie nie (encore)
Qu'importe, cet article vient confirmer les ingérences russes dans la présidentielle américaine de 2016, déjà démontrées par la publication en 2019 du rapport Mueller. Cette enquête avait prouvé que les renseignements russes avaient piraté le parti démocrate afin de le déstabiliser et nuire à la candidature de Hillary Clinton, tout en répandant de fausses informations sur les réseaux sociaux. Elle n'avait toutefois pas recueilli de preuves suffisantes pour établir une « collusion » entre la Russie et l'équipe de Donald Trump. Un an plus tard, un rapport de la commission du renseignement du Sénat, à majorité républicaine, évoquait déjà l'implication de Vladimir Poutine dans certaines opérations.
Depuis 2016, la Russie nie catégoriquement toutes ces allégations. Jeudi, le porte-parole du président russe a maintenu sa ligne de défense en qualifiant de « grand roman à sensation » les révélations du quotidien britannique. Dans un communiqué transmis par sa porte-parole, Donald Trump a, quant à lui, répété sa punchline favorite, qui nous manquerait presque : « c'est une fake news ».