Maisons de repos: le scandale Orpea touche aussi la Belgique

Course à la rentabilité, « rationnement » des soins d’hygiène et des repas des pensionnaires… En France, le groupe de maisons de retraite est sous le feu des critiques. Chez nous aussi, des dysfonctionnements sont dénoncés.

Orpea scandale maison de repos Wallonie
En France, le groupe de maisons de retraite est sous le feu des critiques @BELGAIMAGE

Le groupe Orpea, l’un des géants mondiaux du secteur, est dans la tourmente depuis la publication, mercredi 26 janvier, de l’enquête Les Fossoyeurs (Fayard). Dans ce livre, le journaliste Victor Castanet met à nu le système développé par Orpea pour maximiser à tout prix la rentabilité… au détriment des résidents et des travailleurs.

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Rationnement des fournitures médicales et de la nourriture dans des établissements qui affichent pourtant des tarifs forts salés, carences systémiques en personnel soignant… Selon l’enquête, Orpea a mis en place une stratégie complexe, à base de réductions de coûts et de captation maximale des financements publics. Le but ? Maximiser les bénéfices du groupe et les dividendes des actionnaires. Et tant pis si au passage, le bien-être des résidents et des travailleurs s’en trouve amoindri.

Suites aux révélations du livre de Victor Castanet, Orpea a perdu près de 50% de sa valeur en Bourse. Dans la foulée, le conseil d’administration a mis fin aux fonctions d’Yves Le Masne, Directeur général de la multinationale depuis une décennie. Les autorités françaises ont demandé l’ouverture d’une enquête et convoqué la nouvelle direction du groupe.

Manque de matériel et de personnel

En Belgique aussi, Orpea est sur la sellette. Mardi, la ministre wallonne de la Santé, Christie Morreale a indiqué que 12 des 18 maisons de repos gérées par la société en Wallonie avaient été inspectées par l’Agence wallonne pour une vie de qualité (Aviq). Celle-ci a remis un avis positif pour 8 établissements, un avis plus mitigé pour 2 et un avis très préoccupant pour la dernière institution.

« Ces informations sont celles dont je dispose à ce stade. Les investigations se poursuivent", a souligné la ministre selon qui « tous les faits qui sont et seront portés à notre connaissance feront l’objet d’un suivi par les services d’inspection de l’Aviq". Quatre maisons de repos gérées par Orpea faisaient déjà l’objet d’un suivi particulier à la suite des inspections de l’Aviq menées depuis 2018, a également indiqué Christie Morreale.

Et selon la DH, qui a recueilli plusieurs témoignages de travailleurs, les dysfonctionnements révélés en France auraient « similitudes avec la situation en Belgique". Les salariés seraient ainsi soumis à des conditions de travail très pénibles, et ce, bien avant le covid. "La situation n’a pas évolué depuis 2015, explique au quotidien Fabien Boucqueau, représentant syndical à la CNE. Il n’y a pas de consignes ni d’ordres qui imposent aux travailleurs de limiter le nombre de couches par personne et par jour. Mais le système mis en place fait que les travailleurs n’ont pas accès au matériel en suffisance".

Conséquence ? "Dans certaines maisons de repos d’Orpea, quand les protections incontinence ne sont pas pleines, on ne les remplace pas", assure une autre déléguée syndicale. Cette dernière accusation a été réfutée par Orpea Belgique.

"Incapables de surveiller tout le monde"

Comme en France, le manque d’effectifs est pointé du doigt. Restrictions budgétaires, mauvaises planifications des tâches et horaires éprouvants conduiraient à de la maltraitance involontaire. "Certaines nuits, il est arrivé qu’une maison avec 148 résidents ne dispose que d’une infirmière et d’un aide-soignant, raconte une source à la DH. Dans ces conditions, les soignantes sont incapables de surveiller tout le monde. Une résidente qui était incapable de se relever est une fois restée près de trois heures sur le sol avant qu’on ne vienne l’aider".

Une situation qui ne serait toutefois pas l’apanage d’Orpea ; les restrictions budgétaires étant monnaie courante dans le secteur. « Sans attendre et complémentairement aux nombreuses mesures déjà prises, j’ai également demandé que l’on tire des premiers enseignements pour aboutir à des mesures plus structurelles", a déclaré Christie Morreale, mardi, en commission du parlement wallon.

La ministre a notamment annoncé que la Commission de convention accueil et hébergement de l’Aviq, regroupant les fédérations des maisons de repos et les organismes assureurs wallons, se réunira la semaine prochaine pour proposer des modifications législatives « afin de conditionner le financement public à des indicateurs qualité concernant notamment l’hygiène et l’alimentation dans les maisons de repos".

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