Mort à la prison de Nivelles: une violation du droit à la santé?

La mort d'un détenu soulève des questions quant à la qualité des soins dans la prison de Nivelles, et ailleurs.

prison de Nivelles
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La nuit du 26 au 27 novembre 2021, C.Z. est mort à la prison de Nivelles. Le médecin légiste qui s'est rendu sur place à la demande du parquet de Nivelles a conclu à une «mort naturelle». Pourtant, cet événement a poussé le Conseil central de surveillance pénitentiaire (CCSP) à demander au directeur général des établissements pénitentiaires de mener une enquête interne.

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«Inattendu»?

Interrogé en commission de la Chambre par la députée Claire Hugon (Écolo) le 12 janvier dernier, Vincent Van Quickenborne (Open VLD) expliquait que le détenu, incarcéré le 24 novembre, avait été vu endéans les 24 heures par le médecin - c'est la loi -, qui lui a prescrit des médicaments pour les symptômes qu'il présentait, sans qu'aucun problème grave ait été identifié, rapporte La Libre. C.Z. est «malheureusement décédé de façon inattendue le 27 novembre», ajoutait le ministre de la Justice. Mais une autre version met à mal ces propos.

Appels à l'aide restés vains

C.Z. est entré en prison deux jours avant sa mort, le 24 novembre. Faute de cellule libre, lui et son codétenu avaient été placés vers 20 heures en cellule de punition. Malade, il se plaignait de douleurs au ventre, mais aucun médecin pour l'examiner à cette heure-là. Le lendemain, un soignant s'est présenté au guichet de sa cellule, sans ouvrir la porte.

Emmené vers la cellule sécurisée 5114, C.Z. va de plus en plus mal. Vers 15 heures, une infirmière lui donne un médicament, sans l’ausculter, ni prendre sa tension. «Plusieurs fois, son codétenu a appelé à l'aide car C.Z. vomissait du sang.» Il tente même d'alerter un gardien en lui montrant le contenu du seau, en vain. «Il sera vu le lendemain en bonne et due forme», lui aurait-il répondu. Le lendemain matin, C. Z. est «raide et froid». Il est mort durant la nuit.

Selon cette version remontée vers les membres de la commission de surveillance de la prison de Nivelles, il n'aurait jamais été «ausculté, ni sorti de sa cellule pour un examen et des soins.»

prison de nivelles

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Manque de soins banal et banalisé

Le CCSP a déposé plainte au Parquet, sans suite pour le moment. Cinq mois plus tard, ce tragique événement reste sans réaction des autorités. Loin d'être cas isolé, il pose question sur la qualité des soins prodigués dans la prison de Nivelles.

Comme dans d’autres établissements pénitentiaires du pays, le cadre médical n'y est pas rempli: un médecin est présent seulement de 8h à 16h en semaine, et de 8h à 12h le week-end, décrit à la RTBF Giuseppe D’Orazio, délégué CGSP à la prison de Nivelles.

En cas d'urgence nocturne, les procédures sont «lourdes», déplore l’Observatoire International des Prisons. Il faut l'avis de l'agent responsable sur place, qui n'a pourtant aucune formation médicale, puis de la direction pour ouvrir une cellule. Si le détenu est emmené à l'hôpital, il devra le plus souvent être accompagné par deux agents, car la police ne se déplace pas systématiquement. La prison reste alors avec une permanence insuffisante. «Des procédures si lourdes qu'il est à craindre qu'elles ne soient pas initiées», poursuit l'OIP.

Un détenu en danger risque donc de devoir attendre le lendemain matin pour être vu par l'équipe médicale. Comme dans le cas de C.Z., c'est «parfois trop tard». Le manque de soins et de continuité dans les soins est banal et banalisé en prison, dénonce encore l'Observatoire, sans oublier de rappeler que «les mises en danger régulières de la santé des détenus» valent aussi pour d'autres établissements pénitentiaires.

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