
Cordon sanitaire: le MR pris en défaut par rapport à une charte?

Les présidents d'Ecolo, du PS et des Engagés ont réagi vendredi dans un communiqué commun à la participation du président du MR Georges-Louis Bouchez à un débat télévisé avec Tom Van Grieken, du Vlaams Belang. «Une ligne rouge a été franchie», estiment les trois partis, qui parlent d'un acte «très grave» qui ne «peut rester sans suite». Pour appuyer leur déclaration, ils ont notamment brandi une charte signée par le MR.
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Un code non-respecté?
Les trois partis francophones demandent aux «instances habilitées du MR» de «clarifier» leur position «d'ici lundi midi», quant à l'engagement du Mouvement réformateur par rapport à une charte signée en 2002, un «code de bonne conduite élaboré entre partis démocratiques francophones». Ce texte réaffirmait le principe du cordon sanitaire. Face à la montée de l'extrême droite en Europe, les responsables des quatre partis démocratiques francophones (Ecolo, MR, PS et PSC, à l'époque) avaient signé une version actualisée de la «Charte de la démocratie». La charte en question était accompagnée d'un code de bonne conduite, en 16 points, «à l'encontre des formations ou partis qui manifestement portent des idéologies ou des propositions susceptibles d'attenter aux principes démocratiques qui fondent notre système politique».
Le 11e point de ce code stipule qu'il faut «refuser de participer à tout débat télévisuel ou radiophonique auquel un mandataire issu de ces formations ou partis participerait». Un autre point préconise de privilégier «la concertation entre partis démocratiques» pour définir la manière de mettre en œuvre ces principes dans la pratique, comme celui d'éviter toute publicité des partis d'extrême droite. «S'agit-il d'une faute qui ne se reproduira plus ou le MR renie-t-il le point 11 de la charte sur laquelle il s'était clairement engagé?», interrogent les 4 (co-)présidents.
Le code de conduite auquel se réfèrent PS, Ecolo et Les Engagés, rattaché à la «charte de la démocratie» actualisée et signée une nouvelle fois le 8 mai 2002 par les responsables de ces trois formations et du MR, avait cependant clairement pour but de réagir à l'extrême droite, dans un contexte de «menace grandissante» des résultats électoraux de cette extrémité du spectre politique en Europe. Ce contexte est rappelé en préambule de la Charte, qui précise que le 8 mai «est la date anniversaire de l'Armistice de la Seconde Guerre mondiale» et que le texte «a vu le jour pour la première fois le 8 mai 1993 en réaction aux percées électorales des partis d'extrême droite en Belgique». Plus loin, le texte réaffirme l'importance de la législation visant à réprimer le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie et le négationnisme, qui font le lit de l'extrême droite.
Incompréhension dans la droite flamande, Défi propose une mise-à-jour du code
Contactée par Belga, la porte-parole du MR a indiqué vendredi après-midi que le parti ne souhaite pas faire de commentaire pour l'instant. Le débat entre Georges-Louis Bouchez et le président du Vlaams Belang a été diffusé jeudi soir par la VRT, dans son émission Terzake. Sans surprise, le débat télévisé fait beaucoup moins de remous en Flandre, où le cordon sanitaire médiatique est inexistant et où la présence de l'extrême droite est grandement banalisée, le Vlaams Belang étant le second parti au niveau régional.
Ce qui se manifeste par la réaction d'incompréhension relayée vendredi par différents responsables politiques. Reprenant l'argumentaire de plusieurs élus libéraux, le secrétaire d'Etat CD&V Sammy Mahdi a par exemple estimé vendredi que l'attitude des autres partis francophones était «plutôt hypocrite», si l'on pense que certains d'entre eux «envisagent de gouverner avec le PTB», affirme-t-il via Twitter. «Mettre une telle pression sur Bouchez pour ne plus débattre avec Van Grieken est le meilleur qui puisse arriver au Vlaams Belang», estime encore Sammy Mahdi. Celui qui est désormais président du PTB, Raoul «Hedebouw a plusieurs fois dit qu'il faut pouvoir débattre avec l'extrême droite», ajoute-t-il.
Le président de l'Open Vld, Egbert Lachaert, ne semble pas non plus comprendre cette idée de cordon sanitaire et d'isolement forcé de l'extrême droite, y compris dans le paysage médiatique. «Dans une démocratie, nous devons pouvoir débattre contre toute opinion. (...) On gagne dans une démocratie en affrontant les problèmes, pas en les niant», réagit-il vendredi via Twitter.
François De Smet, président de DéFI, propose quant à lui une nouvelle solution, «plus efficace que les menaces sans effet» des trois autres partis francophones ayant condamné la participation de Georges-Louis Bouchez au débat. «Mettons à jour entre partis démocratiques le 'code de bonne conduite' et signons-le à nouveau. Nous verrons alors où seront les volontés les plus déterminées», lance-t-il.