Comment l'extrême droite cherche (encore) à utiliser Molenbeek

Les communes de Molenbeek et d'Anderlecht ont interdit la venue de Filip Dewinter et Geert Wilders ce vendredi. Mais pourquoi ces leaders de l'extrême droite flamande et néerlandaise veulent-ils à se montrer dans Bruxelles ?

Comment l'extrême droite cherche (encore) à utiliser Molenbeek
Geert Wilders et Filip Dewinter – Belga

« Une visite de travail à Molenbeek ». C'est ainsi que Filip Dewinter et Geert Wilders, leaders de l'extrême-droite en Flandre et aux Pays-Bas, ont annoncé leur venue dans les quartiers nord de Bruxelles. Comme ça, pour le plaisir. Ou la provocation ? L'annonce de la visite a été faite jeudi, aucun parcours n'a été arrêté. Juste une balade suivie d'un petit discours sur la place communale...

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Visite interdite

Mais la bourgmestre de la commune bruxelloise a interdit cette « visite de voisinage ». Elle met en avant le risque, relevé par l'OCAM (Organe de Coordination pour l'analyse de la Menace) de « trouble grave à l'ordre public » sur le territoire de la commune, et par le fait que « l'organisation de l'événement risque de porter gravement atteinte à la paix publique par son caractère ostensiblement provocateur, injurieux et discriminatoire envers les habitants de la commune de Molenbeek-Saint-Jean ».

Pas grave, les deux hommes changeront de parcours. Mais ce matin, c'est le bourgmestre d'Anderlecht qui dit « pas question ». « Face à cette menace grave pour l'ordre public, j'ai signé ce (vendredi) matin à la première heure une ordonnance de police interdisant toute forme de rassemblement en lien avec ce projet nauséabond sur le territoire d'Anderlecht », indique le maïeur anderlechtois, Fabrice Cumps (PS). « Jamais nous ne céderons aux provocations de l'extrême-droite qui visent uniquement à détruire toute la dynamique positive et inclusive que nous tissons au jour le jour avec tous les Anderlechtois(es) quelles que soient leurs origines », ajoute-t-il dans un communiqué.

Offensive de l'extrême droite

Il semble pourtant bien que les deux extrémistes récoltent exactement ce qu'ils sont venus chercher. Un coup de pub mesquin mettant en avant "qu'on ne peut même pas se promener tranquillement dans les rues de certaines communes bruxelloises". Que, décidément, "on n'est plus chez nous". C'est du moins ce qu'ils aimeraient nous faire croire.

Au départ, en effet, il y a les propos de Conner Rousseau, le jeune président du sp.a qui s'est dit « ne pas se sentir chez lui à Molenbeek ». Propos malheureux ou manoeuvre électorale ? En tout cas, le Vlaams Belang a sauté sur l'occasion. Filip Dewinter et son ami néerlandais Geert Wilders annonçant rapidement une visite en expliquant à la presse que « Molenbeek ne doit jamais, jamais devenir le nouveau Marrakech ou le nouveau Kaboul ».

S'appuyant aussi sur le nauséabond esprit de « reconquête » d'Eric Zemmour, quatrième homme de la présidentielle française, les deux hommes ont décidé de lancer une offensive extrémiste sur Bruxelles. Sur Twitter, Geert Wilders en a dit un peu plus sur cette « visite de travail », parlant de « safari de l'islam » dans cette « parcelle de califat » qu'est Molenbeek. Texto. Si ce n'est pas de la provocation, de quoi s'agit-il ?

Fins purement électoralistes

Selon l'ordonnance de police, l'OCAM estime qu' « une menace terroriste et extrémiste grave pèse sur la personne très controversée de Geert Wilders et qu'il serait particulièrement déconseillé de l'exposer dans le contexte d'un événement ouvertement provocant et largement annoncé publiquement ». Le leader extrémiste néerlandais, champion de la provoc', a récemment reçu des menaces de mort venant du Pakistan pour ses propos sur le premier ministre pakistanais. En ce qui concerne Filip Dewinter, tout comme pour l'événement, la menace est évaluée au niveau 2 (moyenne).

Catherine Moureau n'est pas surprise de « cette démarche de l'extrême droite dont le fonds de commerce est de toujours d'opposer les gens, qui attise la haine des autres et stigmatise toute une population à des fins purement électoralistes ».

« Nous représentons ce que l'extrême droite déteste »

Elle a expliqué que « Molenbeek est fatiguée du bashing permanent à son encontre. Elle mérite le respect, en particulier, sa jeunesse, et mieux que les caricatures des bien-pensants. Malgré nos difficultés dues au contexte économique et à l'après-pandémie, nous nous efforçons jour après jour de renforcer nos services publics, d'améliorer la qualité de notre enseignement, de financer notre CPAS, de valoriser notre jeunesse ? »

« C'est peut-être ça qui dérange fondamentalement. Nous sommes une grande commune dans une des régions d'Europe comptant une population des plus jeunes, une commune multiculturelle et ouverte sur la diversité. Nous représentons tout ce que l'extrême droite déteste et pourtant, l'avenir de Bruxelles, de la Belgique, voire de l'Europe se construira à l'image de ce que nous sommes: ouverts à l'autre et chérissant la différence comme atout et non comme obstacle »

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