
Bruxelles grignote ses espaces verts: Greenpeace dénonce une «tendance qui se poursuit de manière irresponsable»

À l'heure de l'écologie, Bruxelles prend-t-elle soin de ses espaces verts? Non, assène Greenpeace ce jeudi 5 janvier 2023 dans un communiqué de presse. Selon l'association de protection de l'environnement, la capitale belge a perdu pas moins de 14% d'entre eux ont disparu entre 2003 et 2016. Un pourcentage qui épouvante l'ONG qui dénonce des projets de construction «qui sonneront le glas de précieux écrins de nature». Une position qu'elle appuie avec plusieurs autres chiffres inquiétants, tout en pointant du doigt la responsabilité des autorités.
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Presque deux fois moins d'espaces verts qu'à Amsterdam
Selon Greenpeace, malgré les bonnes volontés affichées du gouvernement bruxellois en matière environnementale, les indicateurs ne vont toujours pas dans le bon sens. En témoigne le taux de bétonisation du territoire de la capitale, qui est passé de 47% en 2006 à 52% en 2020. «Ainsi, si l’on considère tous les espaces verts, jardins compris, comme un ensemble, Bruxelles compte 55 m² de verdure par habitant, contre 96 m² à Amsterdam», note l'association.
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Autre constat: il existe une inégalité frappante d'accès aux espaces verts publics en fonction des communes. Ceux-ci sont bien plus présents dans les quartiers plus aisés, c'est-à-dire globalement à l'est de la région. Les populations les plus pauvres sont plus éloignées de ces havres de verdure et lorsqu'ils existent, leur qualité est moindre. «À l’heure actuelle, un Bruxellois sur cinq n’a pas suffisamment accès aux espaces verts publics, principalement dans le centre et le nord-ouest», estime l'ONG qui dénonce une «tendance qui se poursuit de manière irresponsable».
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Sauver les espaces verts pour contrer le réchauffement climatique
L'enjeu de garder ces espaces verts est pourtant non négligeable. Avec le réchauffement climatique, les étés s'annoncent toujours plus chauds. En ville, l'effet «îlot de chaleur» provoqué par la bétonisation promet d'amplifier le phénomène, avec une chaleur parfois déjà suffocante lorsqu'arrivent les beaux mois.
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Pour contrer ce phénomène, la solution serait donc de multiplier les espaces verts, au lieu d'en supprimer. «Si nous tenons à vivre des étés supportables, la nature en ville est notre meilleure solution», alerte Greenpeace. «Les espaces verts, les grands espaces ouverts et les forêts agissent comme une sorte de système de refroidissement naturel. Même les toitures végétales, les jardins et les arbres en rue peuvent faire une différence de plusieurs degrés pour les habitants».
La tension entre crise du logement et préservation de l'environnement
Le problème, c'est que la pression immobilière est forte, surtout dans un territoire comme celui bruxellois. Pourtant, théoriquement, l'offre est supérieure à la demande dans la capitale, avec 559.260 ménages et 579.619 unités de logement au 1er janvier 2021. Reste qu'il existe une «inaccessibilité grandissante à ces logements pour une partie de plus en plus importante de la population», comme nous l'a confié Annaïk de Voghel, porte-parole de la secrétaire d’État au Logement et à l’Égalité des chances. Une crise du logement aux causes multiples, d'où la hausse des prix actuelle.
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Dans tous les cas, cela ne freine pas le développement de projets de construction à Bruxelles. Des «solutions faciles et court-termistes», déplore Greenpeace. C'est par exemple le cas à la friche Josaphat, à Schaerbeek, où 1.200 logements pourraient être bâtis sur 7,15 hectares d’espaces verts. Un dossier qui fait l'objet d'âpres discussions, Alain Maron (Ecolo), ministre bruxellois de l’Environnement, ayant même déclaré à BX1 que «bétonner la Friche Josaphat est inacceptable».
Greenpeace demande plus d'engagement politique
Face à ces constats, l'ONG reste dans l'expectative face aux promesses du gouvernement bruxellois. Elle salue la volonté de créer davantage d’espaces verts, comme le prévoit la nouvelle politique d’aménagement du territoire, le Règlement Régional d’Urbanisme (RRU). Une «évolution très positive», note-elle. Par contre, elle critique le fait qu'en parallèle, rien ne soit prévu dans le RRU pour protéger les espaces verts existants.
Pour inciter les autorités à aller dans son sens, Greenpeace a signé un «mémorandum sur la destruction de la nature jusqu’à l’adoption d’une nouvelle réglementation en matière d’aménagement du territoire». Elle soutient également plusieurs collectifs et appelle à une «politique responsable qui tiendrait compte des générations futures investirait dans la protection des espaces verts existants et trouverait des solutions créatives pour répondre aux besoins de logements». «La nature nous protège – ensemble, nous devons aussi la protéger», conclut-elle.