
Défense : la Belgique va-t-elle interdire l’utilisation des robots tueurs ?

C’est un mini Terminator. Pesant 7 kilos, le drone kamikaze Kargu-2, de fabrication turque, peut atteindre 72 km/h et atteindre 2.800 mètres d’altitude. Il vole en essaims, et est conçu pour éliminer des combattants adverses avec les charges explosives qu’il transporte. La publication en 2021 d’un rapport de l’ONU a souligné une autre de ses caractéristiques : celle de cibler des humains en toute autonomie, au moyen de caméras de reconnaissance visuelle et de programmes d’intelligence artificielle.
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Comme le révélait le rapport onusien, ce drone armé a en effet été utilisé en Libye en 2020 contre les troupes du maréchal Haftar, chef de l’autoproclamée armée nationale libyenne. Un Kargu-2 a en effet «pris en chasse une cible humaine» alors en train de battre en retraite, sans avoir été piloté à distance par un opérateur humain. De telles armes létales «autonomes», c’est-à-dire capables de détecter, de sélectionner et d’attaquer une cible sans aucun contrôle humain, la Belgique pourrait être un des premiers pays au monde à en interdire l’utilisation.
Ce mercredi, en commission Défense de la Chambre, les parlementaires examineront une proposition de loi en ce sens déposée par le groupe socialiste. En 2018, la même commission avait voté une résolution demandant au gouvernement de faire en sorte que l’armée belge n’utilise jamais de «robots tueurs». Aucune décision n’est toutefois tombée depuis lors quant à l’interdiction de tels armes ; comme l’expliquait Le Soir, certains partis se sont en effet montrés d’abord réticents, par peur de compromettre les capacités opérationnelles de la Défense, comme l’utilisation de ses drones armés «traditionnels» (pilotés à distance).
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Décider de la vie ou de la mort d'un homme
«Ce texte ne compromet ni nos intérêts, ni ceux de la Défense. Cette interdiction renforcerait la Belgique qui milite au niveau international pour cette cause», expliquait au Soir le député PS Christophe Lacroix. En l’état, il n’existe, malgré des discussions diplomatiques ayant cours depuis de longues années, aucun traité international interdisant les robots tueurs. Et L'Inde et la Russie, ainsi que l’Australie, la Chine, la Corée du Sud, les États-Unis, l’Iran, Israël, le Royaume-Uni et la Turquie, ont d’ores et déjà investi massivement dans les applications militaires de l’intelligence artificielle afin de mettre au point des systèmes d’armes autonomes aériens, terrestres et navals.
Si le potentiel de ces armes n’est sans doute pas encore totalement exploité, plusieurs experts internationaux en robotique et en intelligence artificielle ont mis en garde contre les dangers de leur développement. Ceux-ci, rejoints notamment par de nombreuses organisations de la société civile, jugent inacceptable qu’un robot puisse seule décider de la vie ou de la mort d’un homme.
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Des questions juridiques se posent également : qui doit être tenu pour responsable lorsque ceux-ci ont tué des civils ? Un robot est-il capable de différencier un soldat d'un citoyen ? D’aucuns craignent également que le e développement de robots tueurs ne crée une nouvelle forme de course aux armements parce qu’ils réduiraient les pertes de soldats lors d’un conflit armé.