
Carnaval de Binche, Doudou, Marches… Le folklore wallon est-il sexiste?

Ce 21 février, c’est Mardi Gras. Le grand jour pour les Gilles de Binche, surtout après deux ans sans carnaval, Covid-19 oblige. Sous les chapeaux de plumes qui défilent dans les rues de la cité hennuyère, pas une femme. Seuls les hommes peuvent être Gilles. Même chose par exemple chez les Blancs Moussis de Stavelot.
La lecture de votre article continue ci-dessous
Quant aux marches de l’Entre-Sambre-et-Meuse, on n’y voit que peu de femmes en costume de marcheuses, quand elles ne sont tout simplement pas interdites de le porter. (Précisons cependant que dans les fanfares qui accompagnent bon nombre de ces événements, la mixité est totale).
Selon un recensement de La Libre, sur les 42 activités reconnues comme patrimoine immatériel (carnavals, marches folkloriques, confréries.) en Fédération Wallonie-Bruxelles, 22 excluent totalement les femmes. Le folklore wallon serait-il sexiste ?
Des traditions «vivantes»
Interrogé l’an dernier par Moustique, le Gille de Binche Robin Pletsier répondait «non» à la question de savoir s’il y aurait un jour des femmes Gilles. «Le folklore est une chose qui n’évolue pas - et c’est peut-être ce qu’on demande au folklore. Les Binchoises sont très fières d’être femmes de Gille, sans sa femme, un Gille ne peut pas faire le Gille», avançait-t-il.
🡢 À lire aussi : Tac au tac avec un Gille de Binche
Une conception que n’approuverait sans doute pas Clémence Mathieu, directrice du Musée international du Carnaval et du masque de Binche. «Les traditions sont vivantes et doivent évoluer avec leur temps, il faut pouvoir les réexaminer» jugeait-t-elle en 2020 au micro de la RTBF. Et ce, d’autant qu’elles «sont aux mains des hommes depuis toujours et presque partout sur le globe. Les traditions du Carnaval ont été récupérées par des hommes d’Eglise, puis des hommes de Loi. Et c’est encore le cas aujourd’hui à Binche, les autorités du Carnaval sont constituées essentiellement d’hommes».
Ladies Binchoises
Si elles n’ont pas le droit de défiler avec le cortège, les femmes jouent souvent un rôle clé, en coulisses, dans la préparation des Gilles. «Le matin, sa place est primordiale lors de l’habillage du Gille : c’est elle qui met le grelot, la barrette et le mouchoir du cou, c’est elle qui aussi tient le masque du Gille lorsqu’il ne le porte pas. C’est elle qui va entretenir son Gille durant toute la journée», expliquait Daniel Pourbaix, vice-Président de l'association de défense du folklore binchois.
En 2017, des amoureuses du carnaval ont toutefois créé la première société composée exclusivement de femmes. Les Ladies Binchoises défilent désormais le Lundi Gras, un jour avant les Gilles.
Doudou
La Ducasse de Mons (Doudou) est également un événement très masculin, même si deux personnages de femmes y ont été intégrés. Cybèle – incarnation de la cité originelle en noir et jaune – et Poliade – allégorie de la cité contemporaine aux couleurs de Mons (rouge et blanc) peuvent désormais participer au combat, avec les Chinchins ou les Diables.
Des rôles féminins jugés très superficiels. «C'est artificiel et d'ailleurs, certains à Mons n'hésitent pas à les qualifier de potiches», regrettait Françoise Lempereur, titulaire des cours de patrimoine culturel et immatériel à l'ULiège, auprès de La Libre.
Cwarmê de Malmedy et Saint-Feuillen
Certains carnavals laissent tout de même aux femmes la possibilité d’occuper une place importante. Comme au Cwarmê de Malmedy, où les femmes peuvent revêtir les habits des Haguètes.
En 2019, à la marche de la Saint-Feuillen, une femme a aussi défilé comme tambour-major, un rôle jusqu’alors strictement réservé aux hommes. Signe, malgré tout, de l'évolution de certaines traditions...
🡢 À lire aussi : Notre agenda des carnavals en Wallonie