
Immobilier : comment devenir propriétaire sans fonds propres

Depuis le 1er janvier 2020, la Banque nationale oblige les établissements bancaires privés à limiter la quotité d’emprunts à 90 %. Ils ont bien le droit d’aller au-delà pour une partie de leurs prêts (35 % des crédits destinés aux primo-acquéreurs), mais dans la pratique, depuis plusieurs années, ils font preuve de retenue pour octroyer des crédits avec une quotité supérieure à 100 %. Autrement dit, pour se faire prêter de l’argent aujourd’hui et devenir propriétaire, il faut avoir des fonds propres. Non seulement pour l’achat du bien lui-même, mais également pour les droits d’enregistrement et les frais de notaire.
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La part de la population capable de les déposer sur la table étant en diminution, les solutions alternatives aux crédits bancaires traditionnels sont de plus en plus prisées. Selon le Fonds du logement bruxellois, en 2022, la demande de crédits hypothécaires soumis au Fonds a augmenté de 40 %, avec une hausse de 20 % du nombre de dossiers octroyés. À Bruxelles, ce Fonds propose des crédits hypothécaires atteignant jusqu’à 120 % du montant du bien et peuvent donc couvrir les frais annexes. L’emprunt peut s’étaler sur une période de 30 ans, contre 25 ans pour les prêts bancaires traditionnels. Les taux ont grimpé moins vite que ceux des banques, ce qui explique le succès du Fonds l’an dernier, mais ils oscillent actuellement entre 3 et 4,5 %. À noter que le taux reste fixe mais que pour les primo- acquéreurs, la mensualité peut être progressive. L’accès à ces crédits diffère évidemment selon la situation du demandeur. Le revenu net imposable annuel des personnes isolées ou en situation monoparentale ne doit pas excéder 66.942 euros. Pour les autres types de ménages, le maximum est de 85.200 euros. Dans les deux cas, chaque personne à charge entraîne une majoration de 5.000 euros. Pour être soutenu par le Fonds du logement, vous ne pouvez pas être propriétaire d’un autre bien, devez résider en Belgique, acheter dans la Région bruxelloise et occuper pleinement l’habitation.
Il existe également un Fonds du logement en Wallonie, mais il se destine aux ménages comptant au moins trois enfants à charge. Les autres profils peuvent demander l’aide de la Société wallonne du crédit social. Les crédits de la SWCS, à taux fixe, vont de 5 à 30 ans, alors que les taux varient entre 2,7 et 4,1 %. Les conditions d’accès sont assez semblables à celles du Fonds du logement bruxellois, à savoir: être majeur, être domicilié en Belgique, ne pas posséder de bien immobilier, avoir un revenu net imposable sous les 69.400 euros (+ 5.000 euros par personne à charge). Cependant, la valeur du bien, qui doit se trouver en Wallonie, ne peut excéder 277.000 euros, sauf dans plusieurs zones de pression immobilière, comme Waterloo, Neupré, Arlon, Wavre… où elle peut atteindre 374.000 euros.
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Aide d’un tiers
Reste aussi la possibilité d’une aide d’un courtier ou d’un tiers. “Imaginons un couple, ils travaillent tous les deux comme employés et gagnent ensemble 3.900 euros, prend pour exemple Thomas Grosjean, courtier indépendant en assurance et crédit. Ils ont un crédit voiture et environ 7.000 euros d’épargne, mais ont des enfants, donc ont du mal à mettre de côté. Et ils paient 950 euros de loyer par mois. Il est facile de comprendre qu’avec ça, on peut payer des mensualités pour devenir propriétaire. Le problème, c’est qu’il faut les frais de notaire. Depuis 2017, il est interdit de contracter un crédit pour payer ces frais dans le cadre d’une acquisition immobilière.”

© Kanar
Le profil posé, quelles sont les solutions qui s’offrent à ce couple? “Certaines compagnies proposent aux parents de faire un crédit pour payer les frais de notaire de leurs enfants. Le crédit en question sera ensuite remboursé par les enfants. Petite astuce: les parents ne paieront pas durant dix ans un crédit à leur nom. On va plutôt attendre que la valeur du bien monte à une quotité de 90 %, via des travaux par exemple, pour le refinancer. Et on inclut alors le prêt des parents. Ça peut prendre trois, quatre, cinq ans, en fonction de ce que feront les enfants pour augmenter la valeur du bien.”
Deuxième piste, l’affectation hypothécaire. “On ne peut pas faire un crédit à but non immobilier, sauf si on a une garantie immobilière. Une personne va donc donner l’hypothèque d’un de ses biens immobiliers au profit d’un autre emprunteur. En règle générale, c’est toujours un rapport parents-enfants. Si les frais de notaire représentent par exemple 30.000 euros,ce montant sera au nom des enfants mais affecté en hypothèque sur la maison des parents.” Cette solution est particulièrement intéressante si des travaux permettent d’augmenter la valeur de l’habitation. Ces rénovations offrent plus facilement l’occasion de refinancer le bien sous de meilleures conditions par la suite. “Le but est de donner un coup de boost aux enfants. Si les parents n’ont pas de liquidités disponibles à leur donner, ils peuvent mettre leur bien en garantie. Et si le bien est rénové, on reviendra et on lèvera l’hypothèque des parents.”
Succès grandissant
Dernière alternative soulevée par l’expert en crédit, le recours à un tiers. “Soit la personne donne les fonds propres, avec un contrat entre les deux parties. C’est le cas par exemple d’un ami qui prête de l’argent pour les frais de notaire. Dans ce cas, on doit montrer qu’il y a un endettement et un remboursement futur. L’ami peut aussi se porter garant. Il est alors inclus dans le prêt hypothécaire, avec un intérêt économique. Et devient propriétaire d’au minimum 25 % du bien. Plus tard, le couple pourra racheter ses parts.”
Ces différentes opérations permettant d’éviter le recours aux institutions bancaires et à leurs contraintes, sans surprise, gagnent en popularité. Thomas Grosjean estime d’ailleurs à presque une opération sur deux l’affectation hypothécaire entre parents et enfants. “Je n’ai jamais eu autant de personnes qui viennent pour discuter de ces solutions alternatives qu’aujourd’hui. Le bouche à oreille se fait de plus en plus. On organise d’abord un rendez-vous de capacité d’emprunt, pour voir ensemble ce qu’ils ont comme possibilités. Je pense qu’il est essentiel d’aller voir son courtier avant pour être certain que quand on va signer une offre, on est capable d’acheter. D’autant que j’insiste sur le fait que les courtiers sont gratuits, car ils sont payés via les compagnies et leurs prestations.”