Investir : ce qu'il faut savoir avant de se lancer

Les taux d’intérêt ont augmenté ces derniers mois. Pourtant, laisser son argent sur un compte d’épargne est souvent moins intéressant que de l’investir. Mode d'emploi.

Quelques centaines d’euros suffisent déjà pour investir mais il est alors conseillé de viser des fonds négociés en bourse (ETF). © Adobe Stock

C'est la panique sur les marchés financiers, ou presque. Depuis la faillite de la banque américaine Silicon Valley Bank mi-mars, puis la dégringolade du géant Crédit Suisse à peine quelques jours plus tard, les bourses font du yoyo au gré d’une actualité économique volatile. Raison de plus pour rester prudent et garder l’intégralité de son argent bien au chaud sur un compte d’épargne? Pas forcément, répond Charlotte de Montpellier, macro-économiste chez ING. Même si les taux d’intérêt ont été relevés jusqu’à 1% dans certaines banques belges, il reste souvent plus intéressant d’investir une partie de son épargne. Cinq questions pour vous aider à y voir plus clair sur les possibilités d’investissement à l’heure actuelle.

Est-ce le bon moment pour investir?

Une certitude, pour l’économiste Charlotte de Montpellier, c’est qu’il n’est pas possible de dire quel est le moment parfait pour investir. “Trouver le bon timing pour entrer sur les marchés, c’est fondamentalement impossible car ces derniers réagissent en fonction des nouvelles économiques et de la perception du risque, ce qui ne peut pas s’anticiper. Par contre, on peut faire en sorte d’utiliser ce qu’on sait de la situation actuelle pour en faire un allié dans sa décision.” Si aujourd’hui les marchés sont particulièrement volatiles, avec des indices boursiers qui peuvent provoquer des sueurs froides en montant et descendant régulièrement, “cela ne veut pas dire que c’est inintéressant d’investir aujourd’hui”, estime-t-elle. Les taux d’intérêt relevés par les banques centrales, pour contrer l’inflation, rendent notamment les obligations particulièrement attractives pour les nouveaux investisseurs. “On peut actuellement acheter des obligations d’État qui offrent des rendements de 2,5 %, voire 4 % par an et qui sont généralement plus sûres que des actions.” De son côté, le professeur en finances à l’UCLouvain Rudy De Winne souligne qu’à long terme, le réchauffement climatique et la raréfaction des matériaux risquent de peser sur les entreprises et de limiter les gains en bourse. “Il ne faut donc pas tout investir sur les marchés financiers, mais se diversifier”, assure-t-il.

Quel produit d’investissement est le plus intéressant?

Ni Charlotte de Montpellier, ni Rudy De Winne ne préconisent un actif en particulier. Actions, obligations, fonds négociés en bourse (ETF), immobilier, or… Chaque produit présente des avantages et des inconvénients. “Un investissement sûr et qui rapporte, c’est paradoxal. Il faut choisir le rendement ou la sécurité, ou faire un compromis entre les deux”, résume le professeur De Winne. L’immobilier et l’or sont souvent considérés comme des valeurs refuges, c’est-à-dire que ce sont des actifs stables et même grimpants, qui permettent de dégager un bénéfice à la revente. Gare pourtant à la conjoncture, souligne Charlotte de Montpellier. “Si pendant des années, les prix de l’immobilier n’ont cessé d’augmenter et permettaient aux investisseurs de dégager de gros bénéfices, aujourd’hui emprunter de l’argent pour acheter une maison coûte beaucoup plus cher. La demande chute donc drastiquement et les prix se tassent.” Ce qui compte, répètent nos deux interlocuteurs, c’est de jouer la prudence en diversifiant ses investissements… Mais évitez les cryptomonnaies, bien trop risquées.

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Par où commencer si je veux investir?

En premier lieu, explique Charlotte de Montpellier, il faut établir son profil d’investisseur en réfléchissant à trois critères: le but de l’investissement, l’horizon temporel et le type de risque. “Le nombre d’années durant lesquelles on est prêt à investir son argent va avoir une implication et des conséquences sur les choix d’investissement que l’on fait. On ne va pas investir dans les mêmes produits si on a deux ans ou vingt ans devant soi.” Même chose pour le risque: une personne qui ne veut pas subir de pertes va investir dans des produits plus sûrs (comme les obligations ou l’immobilier par exemple) mais certainement moins rentables qu’une personne qui est prête à voir disparaître une partie de son investissement.

Si on n’a pas identifié cela, on ne peut pas savoir dans quelle direction aller ni ce qu’il convient de faire.” Une fois ce profil établi, reste à choisir son intermédiaire pour investir en bourse: soit sa banque, soit une application de trading, de plus en plus populaire chez les particuliers. Comme une sorte de magasin, ces plateformes ont en rayon des milliers d’actions que chacun peut acheter ou revendre en quelques clics. Pour éviter les mauvaises surprises, mieux vaut passer par une application européenne, régulée par le gendarme des marchés financiers (ESMA).

Combien je peux investir au minimum?

Quelques centaines d’euros suffisent pour investir. Mais le montant doit influer sur le choix des produits, conseille l’économiste Charlotte de Montpellier. “Par exemple, si on a 1.000 euros et qu’on choisit avec ce montant d’acheter quelques actions d’entreprises, on court beaucoup de risques puisque l’investissement ne repose sur la santé financière que d’une ou deux sociétés. Plus le montant à investir est modeste, plus il faut viser des produits déjà diversifiés comme les fonds négociés en bourse (ETF).” Ces fonds, aussi appelés trackers, regroupent un ensemble de placement et sont négociés sur une bourse de valeurs.

Comment investir de manière socialement responsable?

Pour les personnes qui souhaitent investir tout en s’assurant de ne pas financer des entreprises liées aux armes de guerre ou encore aux énergies fossiles, les banques proposent de plus en plus de fonds étiquetés “socialement responsables”. Si théoriquement ces fonds garantissent d’exclure certains secteurs de leurs listes, dans les faits ce n’est pas toujours le cas, faute de réglementation suffisante. “Il y a une nomenclature qui est en train de se renforcer pour éviter que des fonds puissent se dire durables alors qu’ils ne le sont pas réellement”, précise Rudy De Winne. En attendant, l’organisme Financité a initié un label appelé Finance solidaire. Celui-ci regroupe des produits d’épargne et de placement qui tiennent compte des valeurs humaines et/ou environnementales. Une façon de donner du sens à son investissement, tout en permettant notamment le développement d’entreprises d’économie sociale.

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