

Depuis plusieurs semaines, la crise de l'accueil est au cœur de l'actualité. Les articles s'enchaînent sur les personnes installées dans la rue ou dans des squats. Mais ce qui est moins visible, c'est qu'il ne s'agit pas toujours d'adultes. Un fait qui entre en écho avec la journée internationale des enfants des rues de ce 12 avril. S'ils sont Belges, ils peuvent bénéficier de droits pour éviter de finir véritablement sans toit. Ils sont dirigés principalement vers des maisons d'accueil, des logements de transit ou temporairement dans la famille ou chez des amis. Mais ce n'est pas le cas de ceux des mineurs étrangers non accompagnés (MENA). Selon la Plateforme "Mineurs en exil", entre 5 et 20 MENA arrivent ou sont découverts en moyenne par jour en Belgique, et c'est sans compter ceux qui passent sous les radars. Sans adultes pour les accompagner, leur situation est particulièrement précaire, notamment à Bruxelles.
Même s'il est difficile d'obtenir des chiffres exacts, la Plateforme "Mineurs en exil" estime que le nombre des MENA "augmente depuis la dernière décennie", bien que "le phénomène ne soit pas nouveau". Christophe Thielens, chargé de communication au Samusocial Brussels, déclare lui aussi qu'il y a aujourd'hui "de plus en plus de MENA à Bruxelles", avec une "augmentation constante" de leur nombre. "C'est une problématique diverse parce qu'il s'agit de mineurs étrangers en migration, dont certains avec des problèmes psychologiques ou d'assuétude. Il faut donc une prise en charge qui tienne compte de cela. Heureusement, ils ont plus de chances d'être reconnus dans leurs demandes d'asile, vu que c'est un public particulièrement vulnérable, et généralement l'État belge en tient compte dans la décision d'accorder l'asile".
Le souci, c'est que tous les MENA ne font pas des demandes d'asile. Ils sont alors démunis et livrés à eux-mêmes, d'où le fait qu'ils finissent à la rue. Cette absence de demande d'asile peut être liée à un manque d'informations, mais pas seulement. "Il y a des MENA qui ne sont pas sûrs de vouloir rester en Belgique, ou qui ne savent pas très bien s'ils sont en transit ou pas. Or lorsque l'on fait une demande d'asile dans un pays, il faut s'y fixer. C'est toujours compliqué mais en attendant, ils séjournent chez nous de manière très précaire", nous explique Christophe Thielens.
Pour répondre à cette situation, le Samusocial déploie des équipes mobiles d'aide pour aller vers le public sans-abri, dont une partie ne fait pas la démarche de venir frapper à sa porte. Parmi ces derniers, "on trouve beaucoup de mineurs", assure le chargé de communication. "C'est tout notre travail d'être le plus possible, notamment dans les lieux qui sont connus pour abriter beaucoup de ces personnes: des gares, des stations de métro, des parcs ou encore la multitude de squats qui parsèment la capitale. Il y a du boulot".
Puis la tâche ne s'arrête pas là pour le Samusocial. Il faut ensuite accueillir les sans-abris dans des centres, où les MENA sont prioritaires vu leur vulnérabilité, afin de remplir leurs besoins primaires (logement, sécurité, nourriture, soins). "À partir de là, on peut entamer un travail de réflexion puis d'accompagnement pour voir ensemble ce qu'ils veulent faire. S'ils préfèrent rester en Belgique, on sait exactement ce qu'il faut faire comme démarches avec la demande d'asile, ce qui les fera rentrer dans le circuit de Fedasil", explique Christophe Thielens qui compte sur les dons pour aider le Samusocial à continuer son travail.
La Croix-Rouge accueille elle aussi des enfants, en l'occurrence au sein de familles sans logement. Jusqu'en mars dernier, son centre bruxellois était situé dans le quartier Lemonnier mais celui-ci a dû partir à Schaerbeek à cause de la fin d'un bail, ce qui a fait passé le nombre de places d'une centaine à une soixantaine aujourd'hui. "Il s'agit essentiellement de mères seules avec leurs enfants", nous précise Nancy Ferroni, porte-parole de la Croix-Rouge. "Sur une année, nous avons accueilli 117 mineurs, dont un sur cinq avait moins de trois ans. Dans un quart des cas, ces familles avec enfants arrivaient chez nous suite à une perte de logement dans le privé, donc dans une situation de grande précarité. On s'efforce de trouver des solutions pour ces personnes mais en attendant, elles ont la certitude d'avoir un toit au-dessus de leurs têtes et les enfants peuvent aller à l'école".
Prochainement, un centre spécifiquement dédié aux MENA devrait ouvrir avec la coopération du Samusocial. "C'est imminent", promet Christophe Thielens qui ne peut pas donner beaucoup plus de précisions à ce sujet, si ce n'est qu'"il y a juste une question de bâtiments qui doit être réglée". "Je ne prétends pas que cela va répondre à tous les besoins, loin de là. Mais en tout cas, on a des discussions avec les autorités qui nous montrent qu'elles sont conscientes de la réalité actuelle des besoins des MENA. Maintenant, il y a aussi le cas des familles avec enfants qui doivent rester en rue. Là, c'est une autre histoire".