
Bientôt le permis de conduire à points en Belgique ? Pas si sûr…

En matière de sécurité routière, la Belgique est loin d’être exemplaire en Europe. Avec environ 56 tués par million d’habitants en 2019, notre pays est bien au-dessus de la moyenne européenne – qui s’élève à 51 morts par million d’habitants. Et même si la mortalité routière a diminué de près de moitié ces 15 dernières années, la Belgique reste néanmoins un mauvais élève face à ses voisins européens.
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Afin de remédier à cela et tenter de diminuer ce taux trop haut, passer à un permis à points – à l’image de bon nombre de pays européens - est de plus en plus envisagé. Mais l’idée est loin d’être neuve. C’est même un sujet de discorde depuis plus de 30 ans en Belgique où ce fameux permis de conduire à points était déjà évoqué sous le premier ministre Dehaene. Il n’empêche que le tant attendu permis à points était sur le point de voir le jour. Inscrit dans l’accord de gouvernement et porté par les ministres Georges Gilkinet (Mobilité, Ecolo), Annelies Verlinden (Intérieur, CD&V) et Vincent Van Quickenborne (Justice, Open VLD), tout semblait être prêt à sa mise en place. C’était sans compter le MR ni le PS, vivement opposés au projet.
Comment fonctionnerait le permis à points en Belgique ?
« Aujourd’hui, vous pouvez par exemple conduire tous les jours à 150 km/h sur l’autoroute, être plus tard pris avec une alcoolémie de 0,7, puis 15 jours après être pris pour GSM au volant, et ne jamais être inquiété (au-delà d’amendes à payer, NDLR). Et ça, l’étude le montre, ça n’existe nulle part ailleurs. Le permis à points serait une réponse à cette lacune», illustrait Benoit Godart, favorable à l’instauration du permis à points en Belgique sur les ondes de RTL-TVI. Dans cette idée, le permis à points permettrait de limiter la casse.
Concrètement, chaque détenteur belge d’un permis de conduire disposera de 12 points sur son permis. Une fois le système introduit, les compteurs sont mis à zéro. À chaque infraction commise (excès de vitesse, non-respect du code de la route, alcool au volant…), le conducteur recevra une amende mais aussi une pénalité de points sur son permis. Lorsqu’il aura cumulé 12 points sur son permis de conduire, celui-ci lui sera retiré.C’est tout l’inverse du système français où le conducteur belge accumule donc des points de pénalités.
Peut-on en regagner ?
Oui, après un certain laps de temps (qui reste à définir) variable en fonction de la gravité de l’infraction, la sanction de points sera levée. De plus, il est aussi possible de « regagner » des points en suivant une formation (payante) qui permet de récupérer quatre points, et ce à tout moment.
Pourquoi ça bloque ?
Mais le projet qui doit être discuté ce vendredi par le Kern est loin de faire l’unanimité. Notamment du côté du MR et du PS. D’ailleurs, le ministre Dermagne (PS) n’a pas mâché ses mots ce matin sur les ondes de Bel-Rtl où il s’est dit ne pas être “du tout convaincu de la pertinence du permis à points, notamment de son caractère trop automatique.”
“Le permis à points n’est pas la solution, indique le ministre. Il faut lutter de manière plus dure contre la délinquance routière. Et la Belgique n’est pas une bonne élève en la matière. Mais retirer son permis a quelqu’un qui fait 4 petites infractions, ça ne va pas. Certes il faut sanctionner mais pas par un retrait automatique.”
Ses propos ont été renforcés par son cabinet qui « ne veut pas d’un permis à points » car ce système ne fait pas de distinction entre « une personne qui utilise son véhicule pour travailler comme une infirmière à domicile et une autre qui peut s’en passer. Pour certains, être privé de permis, c’est aussi une sorte de mort sociale. On pense notamment aux personnes qui vivent dans des régions reculées. Le PS ne peut accepter cela”, y fait-on savoir.
Cette « mort sociale » est également décriée par le MR qui s’oppose farouchement à la mise en place du permis à points.
Le bras de fer continue
Après avoir torpillé le projet défendu par le ministre Gilkinet, les deux partis se sont attelés à une contre-proposition en maintenant que le permis à points n’avait pas prouvé son efficacité dans d’autres pays.
Cette contre-proposition remplace ainsi le permis à points par une meilleure identification des récidivistes, l’augmentation des contrôles routiers, une meilleure sensibilisation, les peines alternatives et un durcissement des sanctions en cas d’accident grave, peut-on lire dans les lignes de l'Écho.
Actuellement, cinq des sept partis de la Vivaldi soutiennent la proposition du ministre de la Mobilité mais le bras de fer entre les partis flamands et Écolo, favorables au permis à point face au MR et au PS continue.
« Pas une fin en soi »
Pourtant, ce fameux permis à point n’est pas une « fin en soi » comme l’a rappelé Georges Gilkinet, ministre de la Mobilité (Écolo) à l'initiative de la mesure « le Permis à Points n'a jamais été une fin en soi. C'est un des moyens que nous pourrions mettre en œuvre, comme dans pratiquement tous les pays européens, pour protéger mieux les Belges, trop souvent victimes de récidivistes à un comportement dangereux. Il y a un texte sur la table, équilibré et ciblé mais qui demande effectivement un accord de l'ensemble du Gouvernement. Si nous ne l'obtenons pas, nous avons d'autres pistes pour compléter les mesures que nous avons déjà prises pour améliorer notre sécurité routière en Belgique. C'est l'engagement que j'ai pris à l'égard des trop nombreuses familles qui ont perdu des proches dans des accidents de la route. Et je m'y tiendrai! » a-t-il fait savoir ce matin, auprès de nos confrères de la DH, face au blocage dit « définitif » du MR et du PS.