
Faut-il craindre une pénurie de jouets pour les fêtes?

Pour les vendeurs de jouets, décembre, c’est déjà demain. Tout le secteur s’active en ce moment à finaliser les catalogues qui inspireront les listes de cadeaux de Saint-Nicolas et Noël. Mais la frénétique période des fêtes sera-t-elle à nouveau perturbée par la pandémie de Covid? Serait-il même possible qu’il n’y ait rien à glisser sous le sapin? Mi-octobre, l’entreprise américaine Hasbro annonçait qu’elle n’avait pas pu livrer l’équivalent de quelque 100 millions de commandes au troisième trimestre. La raison: des “perturbations sur la chaîne d’approvisionnement”. “Il pourrait y avoir encore des défis imprévus dans la chaîne d’approvisionnement et il est difficile de dire ce que l’avenir nous réserve”, déplorait quant à lui Ynon Kreiz, le PDG de Mattel, autre poids lourd du secteur. Une mise en garde qui a trouvé de nombreux échos ces dernières semaines. Outre-Manche, on s’inquiète carrément de voir les rayons des magasins vides à Noël. À tel point que le chancelier de l’Échiquier, Rishi Sunak a dû démentir, assurant qu’”il y aura suffisamment de jouets au Royaume-Uni”. Aux États-Unis, la secrétaire au Trésor Janet Yellen a dû faire de même, face à la crainte d’une pénurie.
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Le Père Noël se fournit en Chine
C’est que la pandémie et les problèmes de production qui en ont découlé affecte toute une série de produits. En plein redémarrage économique, l’offre n’arrive plus à suivre la demande. Bois, plastique, papier…, un certain nombre de matières premières font défaut. La Chine, qui reste la grande usine du monde, a été fortement perturbée par le virus. Il lui faut un certain temps pour revenir à sa capacité normale de production. Les stocks doivent être reconstitués. S’ajoutent à cela des problèmes de logistique et de surcoût du transport maritime, qui freinent l’arrivée de la marchandise, chez les grossistes puis les détaillants. Un conteneur venant de Chine, qui pouvait coûter avant le Covid autour de 3.000 dollars, en vaut désormais autour de 19.000.

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Cependant, malgré les tensions sur les marchés mondiaux, la hotte du Père Noël ne sera pas vide pour autant. Si certains articles pourraient manquer dans les rayons, une rupture totale n’est pas envisagée par les détaillants belges. “90 % de notre catalogue de fin d’année est déjà en stock”, explique Cédric Haleng, directeur marketing pour l’enseigne Broze, qui compte 25 magasins implantés en Wallonie et à Bruxelles. ”Initialement, je pensais que les retards de livraison impacteraient 15 % du catalogue. On sera plutôt autour de 10 %.” Du côté de DreamLand, la chaîne de magasins de jouets du groupe Colruyt, on admet également ne “pas exclure la possibilité que certains produits soient retardés, par exemple les articles de Noël qui devraient déjà être dans les magasins, ou certains jouets. Certains articles sont encore en route et il est difficile d’estimer exactement quand ils seront livrés. Il est donc possible qu’ils soient dans les magasins plus tard que ce à quoi les gens sont habitués (au lieu de 10 semaines avant Noël, puis 5 semaines avant Noël). Grâce à la très large gamme de DreamLand, nous avons des alternatives pour tous les articles qui pourraient arriver trop tard”, assure-t-on.
Légère augmentation des prix
Grandes chaînes ou petites enseignes, toutes scrutent avec attention les moindres soubresauts du marché. Le secteur a pris les devants, anticipant les délais d’approvisionnement. “On s’y est pris à temps pour constituer nos stocks, se félicite Olivier Adriaensen, cogérant d’Oli Wood Toys (7 magasins à Bruxelles et dans le Brabant wallon). Il devrait y avoir du retard dans la livraison de certains articles, mais pas une vraie pénurie.” Pour les assortiments de fabricants européens, tels Lego ou Playmobil, le risque est vraiment minime. Il l’est un petit peu moins pour certains produits en provenance d’Asie, surtout s’ils sont équipés de puces électroniques. En cause: une autre pénurie, celle des matériaux semi-conducteurs.
“Le contexte mondial étant ce qu’il est, on peut s’attendre à des problèmes de réassort plus importants qu’à l’accoutumée”, prévient quand même Olivier Adriaensen. Une fois les stocks des détaillants écoulés, ils devraient en effet mettre plus de temps à être reconstitués. “Pour les parents qui ont déjà une idée précise de cadeaux, cette année, encore plus que d’habitude, il vaut mieux anticiper”, conseille-t-il. De quoi éviter les (mauvaises) surprises de dernière minute, avant le 6 ou le 24 décembre. D’autant que pour les bourses un peu plus serrées, acheter à l’avance certains cadeaux permet d’étaler les dépenses sur plusieurs mois. D’ailleurs, faut-il prévoir un budget “jouets” un peu plus important? Avec la hausse des prix des matières premières et des coûts de transport, les fournisseurs ont commencé à adapter leurs tarifs. Pour les détaillants en aval, difficile de ne pas suivre la tendance, et de ne pas la répercuter sur le ticket de caisse des consommateurs. “Pour certains produits, on peut compter sur une augmentation de l’ordre de 2 à 3 %. C’est du cas par cas, il n’y a pas d’augmentation générale”, détaille Olivier Adriaensen. Pas de hausse brutale donc à prévoir d’ici à la fin de l’année. Mais “si en amont les prix continuent de grimper, les détaillants ne pourront pas indéfiniment rogner sur leurs marges”, prévient Cédric Haleng.